FRÉDÉRIC MION CAP SCIENCES PO 2022
Arrivé en 2013 après la mort accidentelle de Richard Descoings, le directeur veut transformer le célèbre institut en campus dans la cité.
Aproximité de la rue Saint-Guillaume, il n’est pas rare de croiser des grappes d’étudiants au pas pressé, s’exprimant en anglais, chinois ou portugais. Avec près de la moitié (47 %) de ses 13 000 inscrits venus de l’étranger, Sciences Po affiche un dynamisme cosmopolite envié. Hormis la fameuse péniche, sorte de long banc en bois usé dans le hall d’accueil, et quelques noms d’amphis (Chapsal, Boutmy, Jean Moulin), l’Institut d’études politiques (IEP) est méconnaissable : après deux décennies de réformes à tous crins, le modèle français de formation des élites se dissout inexorablement dans la mondialisation. Enarque inconnu du sérail académique il y a cinq ans, Frédéric Mion a remis de l’ordre dans la gestion hasardeuse de son prédécesseur, s’employant à rationaliser les dépenses : une douzaine de loyers seront bientôt supprimés au profit de quelques grandes acquisitions (le 13, rue de l’Université et, plus récemment, l’Artillerie, l’ancien couvent attenant à l’église Saint-Thomas-d’Acquin). En 2022, cent cinquante ans après la création de l’école, des salles, des cafétérias, des open spaces, des laboratoires de recherche ouvriront sur trois cours intérieures, formant un campus intégré, sur le modèle des grandes universités américaines, au coeur de Paris. De quoi renforcer l’attractivité de l’institut, déjà forte : « Sans être en mesure d’en expliquer toute la complexité, j’ai le sentiment, explique Frédéric Mion, d’assister à un “moment français” qui marque une attractivité nouvelle de la France. A Sciences Po, ajoute-t-il, cela se traduit par l’augmentation spectaculaire de 50 %, par rapport à l’année dernière, des candidatures internationales pour nos masters.»
Effet Macron ou Donald Trump ? Peut-être un peu des deux. Sciences Po caracole à la quatrième place mondiale en « science politique et relations internationales » dans le classement QS 2017 qui référence les meilleures universités par discipline, juste derrière Harvard, Oxford et la London School of Economics. Par ailleurs, alors qu’aucun établissement français ne figurait dans le top 100 mondial en sciences sociales du Times Higher Education (THE), l’institut occupe depuis l’année dernière la cinquantième position. Un bilan que n’a pas manqué de vanter Frédéric Mion pour damer le pion à son unique concurrente, Isabelle Barth. Sous des apparences tout en retenue, cet ami d’Edouard Philippe, plus motivé que jamais, s’autorise même quelques embardées : « Après ces cinq années, je ressens une grande émotion, un amour, en tout cas un véritable attachement à l’institution que je ne sais pas dissocier des étudiants. »