Le Figaro Magazine

En vue : Jacques Brunel, opération survie

Le Gersois de 64 ans a été appelé cet hiver au chevet d’un XV de France en plein doute. Sa connaissan­ce des hommes, ses paroles fortes et justes sont censées soigner les maux. Mais après deux défaites dans le tournoi des Six-Nations, sa situation est déjà

- • DAVID REYRAT

Regrette-t-il d’avoir accepté la propositio­n de son « ami » Bernard Laporte ? Peu probable. Jacques Brunel, voix rocailleus­e et épaisse moustache, n’est pas du genre à nourrir des regrets, ni à se lamenter sur son sort. A 64 ans, il a accepté cet hiver le défi. Immense. Prendre la succession de Guy Novès, icône du peuple ovale de France, premier sélectionn­eur limogé de l’histoire du XV de France. Fin décembre, quand le président de la fédération l’a appelé à la rescousse, l’entraîneur lui a d’abord répondu « tu m’emmerdes ». Il faut le prendre comme une apostrophe affectueus­e. Et la pleine conscience qu’il allait s’embarquer dans les ennuis. Puis il a dit oui. Fidèle en amitié. Soucieux, aussi, de l’intérêt général. On n’a pas le rugby chevillé au corps et à l’esprit depuis cinq décennies, dont trois à entraîner, pour déserter quand l’heure est grave. Déterminé. Mais pas naïf. « Pourquoi tout le monde me souhaite bon courage ? » avait-il ainsi lâché à l’heure des premières confidence­s médiatique­s, peu après sa nomination. Pas son exercice préféré. Mais son bon sens paysan – l’image n’a rien de péjoratif pour ce fils de viticulteu­rs qui produisit lui-même un temps son propre armagnac – conjugué à une franchise n’incitant pas à la riposte lui permet de se tirer sans encombre de l’obligation.

De toute façon, sa préoccupat­ion est autre. Jacques Brunel ne cherche pas à plaire. Il dit, c’est tout. Aux journalist­es comme à ses joueurs. Technicien reconnu, capable de passer des heures à décrypter les tactiques adverses ou à en inventer d’innovantes, le Gersois de Courrensan est aussi à son aise à l’heure de puiser le meilleur dans les âmes. « Le rugby, c’est l’histoire des hommes », a-t-il coutume de répéter. Il est à l’écoute. Aux aguets. Sait quand il faut flatter, quand il faut sévir. Les joueurs exclus du groupe après la virée nocture dans Edimbourg, dimanche dernier, quelques heures après avoir perdu contre l’Ecosse, peuvent en témoigner...

Mais l’ancien arrière audacieux n’a pas non plus son pareil pour remonter les rudes avants, les envoyer au combat, au sacrifice. Le nouveau sélectionn­eur sait qu’après avoir perdu ses deux premiers matchs du Tournoi des Six-Nations, la défaite sera interdite face à l’Italie, vendredi 23 février, à Marseille. Face à une sélection transalpin­e qu’il dirigea de 2011 à 2016, il va lui falloir trouver les bons mots pour ragaillard­ir ses Bleus, leur éviter une humiliatio­n de plus. De trop ?

 ??  ?? Ancien joueur d’Auch, entraîneur de Colomiers, Pau et Perpignan puis sélectionn­eur de l’Italie, Jacques Brunel relève, à la tête du XV de France, le plus grand défi de sa carrière.
Ancien joueur d’Auch, entraîneur de Colomiers, Pau et Perpignan puis sélectionn­eur de l’Italie, Jacques Brunel relève, à la tête du XV de France, le plus grand défi de sa carrière.

Newspapers in French

Newspapers from France