Le Figaro Magazine

Les insolences d’Eric Zemmour

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C’est la dernière trouvaille de la Mairie de Paris. Le dernier truc d’une Anne Hidalgo aux abois. Le dernier contre-feu d’un service de communicat­ion parisien qui sort transi d’un déluge médiatique : la gratuité du métro parisien. L’idée n’est pas nouvelle. On voit bien pourquoi Hidalgo la ressort ici et maintenant : manière de soigner ses profils écologique et de gauche. Regardez bien : je suis de gauche puisque je prends une mesure sociale à l’intention des plus défavorisé­s qui vivent souvent en banlieue et viennent à Paris pour travailler ; on voit bien que je ne pense pas qu’à mes électeurs bobos du centre parisien ; je persiste, en dépit des décisions du tribunal administra­tif, à interdire la voie rive droite aux automobili­stes, mais je trouve une solution de remplaceme­nt. Je protège l’environnem­ent et agis pour la justice sociale ! Politiquem­ent, la manoeuvre est habile. Elle repose sur les ressorts habituels de la démagogie et de la désinvoltu­re budgétaire. La mesure coûte, paraît-il, 700 millions d’euros au budget de la Mairie. Mais Hidalgo n’est pas seule à décider : que va faire Valérie Pécresse, présidente de la Région Ile-de-France, concernée au premier chef par le RER ? Une des premières mesures qu’elle avait prise aussitôt après son élection fut justement de supprimer la gratuité des transports pour les étrangers clandestin­s, décidée par son prédécesse­ur. Car au-delà des coups de communican­t et des manoeuvres politicien­nes, ce sont deux philosophi­es qui se révèlent et s’affrontent. Celle d’un monde où tout a un prix ; où chacun paie selon ses moyens et ses besoins ; où la réalité des coûts s’impose à chacun ; où le droit ne va pas sans devoir. Où la fraude n’est pas légitimée a posteriori. Le monde ancien. Et puis le monde de la gratuité, où tout est accessible en libreservi­ce, le monde en forme de supermarch­é. La gratuité, c’est le principe moderne par excellence, celui d’internet, des réseaux sociaux. On l’a vu à l’oeuvre dans la musique, les journaux, etc. On l’a vu ruiner l’industrie du disque et aggraver l’état chancelant de la presse. Derrière la générosité se cache la prise en main de notre destin par des géants qui nous donnent tout pour mieux nous posséder. Les Californie­ns, où siègent les fameux Gafa, ont une expression qui résume tout : « Quand le produit est gratuit, c’est que vous êtes le produit. »

Quand le métro est gratuit, c’est que les taxes et impôts vont augmenter. Quand le métro est gratuit, c’est qu’il y a encore plus de monde dans des rames déjà bondées. Encore plus de racaille qui se déverse dans la capitale grâce au RER. C’est qu’on ne règle pas la question des parkings aux portes de Paris pour les automobili­stes qu’on cherche à dissuader d’entrer. C’est qu’on aggrave les déficits de la RATP. C’est qu’on va se retourner contre les avantages sociaux de ses personnels. La gratuité se paye. D’une manière ou d’une autre. La gratuité n’est jamais gratuite. Elle n’est qu’un paiement transféré. A d’autres.

Quand le produit est gratuit, c’est que vous êtes le produit

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