LES CLÉS POUR COMPRENDRE
Le troisième sommet intercoréen de l’Histoire, après ceux de 2000 et 2007, doit se tenir ce 27 avril à Panmunjeom, dans la zone démilitarisée qui divise la péninsule depuis 1953.Une rencontre qui intervient après l’annonce faite par Pyongyang de suspendre
1 LE NORD ET LE SUD SONT TOUJOURS TECHNIQUEMENT EN GUERRE
L’armistice de Panmunjeom, signé le 27 juillet 1953, met fin à un conflit qui aura duré trois ans et fait 2 millions de morts. Il entérine la division de la péninsule au niveau du 38e parallèle en créant une « zone démilitarisée » (DMZ) de 248 km de long et 4 km de large. De chaque côté de cette ligne de démarcation, qui est en réalité « surmilitarisée » (mines, radars, patrouilles), les soldats du Nord et du Sud se regardent en chiens de faïence. Des accrochages s’y produisent régulièrement. L’armistice de Panmunjeom, qui s’est traduit par la cessation des hostilités, a été conclu entre la Corée du Nord, le commandement de l’ONU et la Chine. Mais la Corée du Sud ne l’a jamais ratifié, ce qui signifie que les frères ennemis sont juridiquement toujours en guerre. L’un des objectifs du prochain sommet est d’étudier la possibilité d’un traité de paix entre Pyongyang et Séoul. A cet égard, la déclaration de Moon Jae-in, le président sud-coréen, est sans ambiguïté : « L’armistice qui traîne en longueur depuis soixante-cinq ans doit prendre fin. Il faut rechercher la signature d’un traité de paix. Après la déclaration de la fin de la guerre. »
2 UN RAPPROCHEMENT AMORCÉ LORS DES JO D’HIVER
Après l’escalade (verbale) de l’été 2017 entre Donald Trump et Kim Jong-un, une détente s’est esquissée lors des Jeux olympiques d’hiver de Pyeongchang (en Corée du Sud). En invitant Kim Yo-jong, soeur du leader nord-coréen, à la cérémonie d’ouverture, Moon-Jae-in a non seulement créé la surprise mais il a amorcé un processus de rapprochement. C’est d’ailleurs par son entremise que la rencontre Trump-Kim Jong-un (programmée début juin) a été acceptée sur le principe. Pacifiste convaincu et catholique pratiquant, il a multiplié les signes d’apaisement. Une délégation sud-coréenne de haut rang a été envoyée à Pyongyang le 5 mars afin d’évoquer « la dénucléarisation de la péninsule coréenne, ainsi que l’instauration d’une paix sincère et durable ». Une ligne de communication directe entre lui et Kim Jong-un a été inaugurée le 20 avril en vue de préparer ce sommet du 27 avril. Le lendemain, dans un revirement spectaculaire, Pyongyang annonçait la suspension de ses essais nucléaires et balistiques. Ce qui ne signifie en rien le démantèlement de l’arsenal nucléaire existant et la mise en sommeil des centres de production !
3 UN CONTEXTE POSITIF MAIS DES RÉSULTATS INCERTAINS
La communauté internationale attend beaucoup du futur sommet. Elle risque d’être déçue, car les points de friction restent nombreux. Le fameux traité de paix, souhaité par tous (et notamment par Donald Trump), est loin d’être acquis. D’abord parce que Pyongyang et Séoul revendiquent tous deux la pleine et entière souveraineté sur l’ensemble de la péninsule. La signature d’un traité équivaudrait à une reconnaissance mutuelle et à l’acceptation de jure de l’actuelle division. Repoussant par là même la perspective de réunification, toujours prônée de part et d’autre de la DMZ. Ensuite parce que cet hypothétique accord va faire l’objet de tractations serrées et sensibles. Moon Jae-in souhaite profiter de sa rencontre avec Kim Jong-un pour faire renoncer la Corée du Nord à ses ambitions nucléaires. Or, pour Pyongyang, l’atome demeure un bouclier dissuasif et un gage de survie. De son côté, le leader nord-coréen exigera probablement le retrait des 25 000 GI stationnés en Corée du Sud : les bombardements américains (notamment au napalm) effectués pendant la guerre de Corée sont encore gravés dans les mémoires nordistes…