Delahousse et Moati reviennent sur l’élection de 2017. L’un a des moyens, l’autre du talent.
Vraiment ridicule. Dans le film « proposé et présenté » par Laurent Delahousse (1), les scènes de la campagne présidentielle de 2017, commentées par une trentaine de témoins, acteurs et spécialistes, sont jouées par des figurants filmés de dos. Dans une esthétique de romanphoto, on reconstitue le bureau de Hollande – fauteuils râpés –, le QG de Fillon, les promenades de Sarkozy à bicyclette, le logis de Juppé. Tout cela est moche, grotesque, insultant et raté. De dos, Sarkozy ressemble à Drucker, et Juppé à Fernand Sardou. Certes, cela distrait entre les interventions convenues des exégètes. On nous a promis des histoires secrètes, on nous sert un feuilleton rebattu. Qu’apprendon ? Rien, parce que les personnalités sont mal interrogées. On reste à la surface. Delahousse, c’est de la mousse – artificielle. En deux fois moins de temps, sur le même sujet, Serge Moati nous emmène deux fois plus loin (2). Lui a du talent, un regard, un discours et une esthétique. Avec sa liberté de ton habituelle, il nous présente son carnet de notes, nous emmène partout, arrive à faire que les principaux acteurs de la campagne se livrent comme jamais. Benoît Hamon, banal chez Delahousse, crève l’écran chez Moati. Avec le temps, celui-ci a acquis une bonhomie, une gentillesse, une rondeur et une empathie qui n’obstruent cependant pas son regard perçant. C’est Victor Hugo dans
Choses vues. Moati s’autorise tout. Il a bien raison. L’avenir est à lui.
(1) Présidentielles 2017 : histoires secrètes, France 2, mardi 1er mai, 20 h 55.
(2) Ma dernière campagne, de Serge Moati, France 5, dimanche 29 avril, 22 h 30.