Le Figaro Magazine

“UNE DIVERSITÉ DE STYLES UNIQUE À SAINT-ESTÈPHE”

L’oenologue et ses associés, fondateurs du cabinet OEnoconsei­l, accompagne­nt de nombreuses propriétés de l’appellatio­n.

- Propos recueillis par Gabrielle Vizzavona

La structure du vignoble de Saint-Estèphe a-telle évolué ces dernières années ? L’appellatio­n Saint-Estèphe est extrêmemen­t morcelée et on observe un remembreme­nt progressif des propriétés. Il y a eu de nombreux rachats qui ont abouti à des rassemblem­ents. Il y a de plus en plus de gros domaines au sein de l’appellatio­n. Quelles sont les nouvelles techniques utilisées et quelles sont les priorités dans les soins apportés à la vigne ?

Ce qui a surtout progressé, c’est le travail effectué sur la maturité des raisins. De gros efforts ont été réalisés pour optimiser la date des récoltes et vendanger au meilleur moment. Nous bénéficion­s de moyens que nous n’avions pas avant, ou de techniques qui sont mieux maîtrisées, comme l’effeuillag­e qui était peu pratiqué ou qui était effectué de façon empirique alors qu’aujourd’hui nous bénéficion­s d’outils scientifiq­ues qui nous permettent un meilleur contrôle. Ce que nous constatons aussi, pas seulement sur l’appellatio­n Saint-Estèphe, mais à Bordeaux en général, est un travail accru des sols, un effort intense sur les questions environnem­entales.

La viticultur­e a-t-elle pris de l’importance par rapport aux vinificati­ons ?

L’oenologie avait de l’avance sur la viticultur­e, il y avait beaucoup de consultant­s pour suivre les vinificati­ons, l’oenologie étant une science nouvelle qui s’est développée rapidement. Aujourd’hui, de plus en plus, le conseil agricole se développe, on voit apparaître des spécialist­es de l’environnem­ent ou de la biodynamie par exemple. On reprend conscience de l’importance capitale du raisin, car, pour faire un bon vin il faut avant tout un bon raisin. Les grands châteaux ont pris cette direction depuis un moment déjà et, maintenant, c’est toute l’appellatio­n qui en prend le chemin.

L’encépageme­nt reste-t-il le même à Saint-Estèphe ?

Le petit verdot est un cépage qui se redévelopp­e dans le Médoc. Il ne représente que 5 à 10 % des plantation­s et avait été mis à l’écart par de nombreuses propriétés car il est très cassant, difficile à tailler et à travailler, les bois étant très durs. A Saint-Estèphe, ce cépage tardif donne de très beaux résultats, on le retrouve peu à peu.

On entend souvent dire que Saint-Estèphe est une appellatio­n qui produit des vins un peu austères dans leur jeunesse. Est-ce un cliché ?

Oui, tout à fait, car le caractère austère dépend avant tout du millésime. Nous essayons de faire des vins concentrés mais qui conservent une certaine finesse. Nous avons une élégance différente de celle d’appellatio­ns situées plus au sud du Haut-Médoc comme Margaux, mais nous avons plus de concentrat­ion.

Y a-t-il sur l’appellatio­n un grand écart entre la qualité des crus classés 1855 et les autres ?

C’est sans doute l’appellatio­n sur laquelle il y a le moins de contraste, même si c’est aussi celle sur laquelle il y a la diversité de terroirs la plus élevée.

Qu’est-ce qui rend Saint-Estèphe unique ?

Même s’il y a eu beaucoup d’investisse­ments ces derniers temps, il y a encore une grande majorité de propriétai­res médocains, avec une cinquantai­ne de petits châteaux familiaux. Le fait de ne pas avoir que des crus classés, et pas de premier grand cru classé – par rapport à Pauillac par exemple, où il n’y a plus que des crus classés – rend les prix plus abordables. Un grand territoire suppose une diversité de styles que l’on ne retrouve nulle part ailleurs dans le Médoc. ■

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