Le Figaro Magazine

“LA NOUVELLE GÉNÉRATION VA PORTER LE BIO”

Après des études de droit et d’entreprene­uriat, la fille de Jacky Lorenzetti rejoint ses parents à la direction des propriétés bordelaise­s.

- Propos recueillis par Gabrielle Vizzavona

Qu’est-ce qui a motivé l’achat du Château Lilian Ladouys à Saint-Estèphe par votre famille en 2008 ? Lilian Ladouys, c’est notre coup de coeur. C’est le premier investisse­ment que nous avons fait dans le vin et nous en sommes aujourd’hui à notre dixième millésime. C’était surtout un investisse­ment humain. Nous y sommes venus pour diverses raisons affectives. Ma mère est originaire de Gironde, et de ce côté-là de la famille, nous avons toujours été bercés par cette culture vinicole. Mon père, quant à lui, est passionné depuis longtemps par les crus de la rive gauche.

Avez-vous conservé ce lien affectif avec la propriété ?

Nos journées de travail se passent au Château Pédesclaux, à Pauillac, où sont situés nos bureaux, mais ici, à SaintEstèp­he, c’est une maison de plaisir. On s’y sent bien. Notre vin est en ligne avec le ressenti et l’atmosphère, il est facile à boire même s’il conserve la robustesse d’un saintestèp­he. Nous sommes très bons vivants dans la famille, nous aimons beaucoup la cuisine de terroir et Lilian Ladouys est un vin de terroir. Cela rejoint l’univers du rugby ; nous sommes des épicuriens.

Vous venez d’acquérir deux nouvelles propriétés à SaintEstèp­he. Qu’est-ce qui a motivé cette décision ?

Lilian Ladouys compte 50 hectares au total, dont 45 en production. Grâce aux achats en mars du Château Clauzet et du Château Tour de Pez, nous doublons notre surface et passons à 100 hectares. Ce qui va nous permettre de poursuivre la restructur­ation du vignoble entamée à l’achat de Lilian Ladouys il y a dix ans. Notre stratégie est de renforcer le Château Lilian Ladouys sans détruire ces belles propriétés. Pour cela, il nous faut rassembler notre vignoble, dont le parcellair­e était très éclaté.

Que représente pour vous l’appellatio­n Saint-Estèphe ?

Ce sont plus les vins que l’appellatio­n elle-même qui représente­nt quelque chose pour moi. L’appellatio­n est très belle, bien entendu, peut-être un peu dans l’ombre de Pauillac ou Margaux. Je pense que les vins représente­nt plus l’appellatio­n que le contraire. Ce sont des crus qui ont une matière souple, une texture particuliè­re, structurés mais faciles à boire. C’est aussi une appellatio­n qui est en plein renouvelle­ment : la nouvelle génération de propriétai­res lui apporte un souffle nouveau, comme le fait par exemple Basile Tesseron du Château Lafon-Rochet.

Vous faites partie de la jeune génération de propriétai­res. En quoi votre façon de mener les choses sera-t-elle différente de celle de vos parents ?

Je ne sais pas si nous allons avoir une façon différente de mener les propriétés. Notre éducation nous influence énormément. Le fait de travailler en famille me permet d’apprendre autant que je le peux, de mon père mais aussi de ma mère, qui est très investie. C’est un beau challenge d’apprendre aux côtés de mon père, sur tous les aspects liés à l’entreprene­uriat. Je progresse à vitesse grand V. De mon côté, j’essaie d’ouvrir leurs goûts sur d’autres appellatio­ns, même si je reste moi-même une grande adepte des bordeaux. Je suis surtout très porteuse du sujet bio, j’y mets corps et âme pour convaincre les derniers réfractair­es, même si désormais tout le monde est plutôt convaincu. C’est la nouvelle génération qui va porter cela, je donne un petit coup de pouce. C’est un défi au niveau économique, mais cet investisse­ment dans la viticultur­e biologique est indispensa­ble, et il nous faut aujourd’hui trouver la vitesse de croisière qui nous permettra d’y aller complèteme­nt.

Quand vos vignobles seront-ils convertis en viticultur­e biologique ?

Rapidement pour le Château Pédesclaux, puisque la moitié du vignoble sera convertie en 2018. Pour le Château Lilian Ladouys, cela fait dix ans que nous avons entamé le travail des sols qui permettra une conversion future. Nous essayons de nous en rapprocher car nous voulons faire le vin de la meilleure qualité possible pour pouvoir postuler comme cru bourgeois exceptionn­el au nouveau classement qui sera remis établi en 2020.

Saint-Estèphe est-elle une appellatio­n dynamique ?

Ce qui est beau à Saint-Estèphe, c’est qu’il y a une concurrenc­e saine entre les propriétai­res par la grande qualité des crus bourgeois. Cela apporte effectivem­ent beaucoup de dynamisme. ■

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