DES ASSURANCES POUR SE PROTÉGER DES MAUVAIS PAYEURS
Les garanties loyers impayés coûtent entre 2 et 4 % du loyer. Mais elles nécessitent une grande vigilance au moment de la souscription du contrat et du recrutement du locataire.
Le loyer a cessé de tomber, les charges s’accumulent et la procédure judiciaire intentée pour récupérer les loyers traîne en longueur. Voilà le scénario qui fait faire de mauvais rêves aux propriétaires-bailleurs. La quasi-totalité des logements loués en France le sont par des particuliers, qui se sont souvent endettés pour acquérir leur bien, ou comptent sur les revenus qu’ils en tirent pour compléter leur retraite et payer les charges. Ce qui explique que les impayés soient si redoutés, « même s’ils sont finalement assez rares », constate l’association de consommateurs CLCV. Quelque 150 000 contentieux ont été recensés par le ministère de la Justice l’année dernière, soit 1,2 % des baux. « Mais lorsqu’ils surviennent, ils vous concernent à 100 % et peuvent vous mettre en difficulté financière », poursuit-elle. Pour s’en prémunir, il peut être tentant de souscrire une assurance loyers impayés. « Elle est particulièrement utile en cas de fort taux de rotation des locataires car le risque d’impayés est alors plus grand », constate Jean-Sébastien Nénon, du courtier en assurances LesFurets.com. Moyennant 2 à 3 % du loyer perçu en moyenne hors options, l’assureur s’engage à prendre le relais du locataire défaillant. Ce filet de sécurité a d’autant plus d’intérêt que les primes d’assurance sont déductibles des revenus fonciers.
« Les assurances loyers impayés présentent toutes plus ou moins les mêmes garanties », constate Christophe Triquet, directeur général du comparateur MeilleureAssurance.com. Elles couvrent en général les loyers impayés, les éventuelles dégradations commises par le locataire, et point particulièrement apprécié des bailleurs, prennent en ____ charge la procédure contentieuse ainsi que les frais
qu’elle occasionne. Cette garantie est précieuse : en cas de conflit avec un locataire, la procédure peut s’avérer longue, 18 mois en moyenne, et coûteuse. La plupart des assurances loyers impayés incluent aussi une protection juridique, qui ne doit pas être confondue avec la couverture des frais de contentieux. Elle vous protégera plutôt en cas de procédure intentée par votre locataire, par exemple s’il y a désaccord quant au remboursement de la caution. Ces contentieux sont cependant rares. En 2016, 10 300 locataires se sont tournés vers les tribunaux, selon le ministère de la Justice. Certaines assurances, pour faire baisser la prime, excluent d’ailleurs cette dernière protection. Peuvent s’ajouter à ces garanties de base certaines options, comme la garantie contre la vacance locative ou encore le départ prématuré du locataire (ou son décès). « La garantie contre la vacance locative est cependant limitée. Elle ne couvre généralement qu’une partie du loyer, sur une période courte. Mais cela peut suffire à faire doubler le prix de la prime », met en garde Christophe Triquet. Toutes les assurances loyers impayés ne se valent pourtant pas, et il est important de regarder de près le contrat avant de souscrire. « Il faut notamment être attentif à l’ampleur du délai de carence, s’il y en a un, et au montant maximal indemnisé », précise Pierre Hautus, directeur de l’Union nationale de la propriété immobilière (UNPI). Toutes les assurances prévoient en effet des plafonds d’indemnisation. Certaines fixent un montant maximal de loyer indemnisé, en général de 2 000 €, parfois 3 000 €, accompagné d’une durée maximale d’indemnisation. « Cette durée maximale est généralement de 24 mois d’impayés, et peut dans le meilleur des cas atteindre 30 ou 36 mois », constate Christophe Triquet. Le premier montant est à scruter avec attention si votre loyer est élevé.
DES INDEMNITÉS PLAFONNÉES
Plutôt qu’une durée maximale, d’autres assurances préfèrent fixer un montant global maximal d’indemnisation (souvent entre 70 000 et 90 000 €). Attention, les détériorations du locataire ne sont pas toujours incluses. Ces plafonds, par ailleurs, ne sont valables que pour un sinistre. « Si un propriétaire-bailleur souhaite continuer à s’assurer après qu’un locataire lui a fait défaut, il devra contracter un nouveau contrat, sur la base d’un nouveau locataire », précise MeilleureAssurance.com.
Surtout, il faut être attentif aux critères fixés par l’assureur pour valider le dossier du locataire. La plupart des
IL FAUT ÊTRE ATTENTIF AU DÉLAI DE CARENCE ET AU MONTANT MAXIMAL INDEMNISÉ
AU MOMENT DE LA SIGNATURE DU BAIL, LE LOCATAIRE DOIT ABSOLUMENT FOURNIR TOUTES LES PIÈCES EXIGÉES PAR L’ASSURANCE
contrats exigent qu’il gagne trois fois le montant du loyer. « La plupart des assureurs n’excluent pas purement et simplement les locataires en CDD ou en période d’essai, mais peuvent exiger pour eux des garanties supplémentaires », explique Christophe Triquet. « Ils assurent des locataires qui sont bien peu susceptibles de faire défaut, constate de son côté Pierre Hautus. Et se montrent particulièrement exigeants au moment de rembourser les loyers non perçus. » Il est ainsi capital d’obtenir préalablement du locataire toutes les pièces exigées par l’assurance, comme les bulletins de salaire.
L’UNPI alerte les propriétaires dont les locataires auraient fourni de fausses fiches de paie. « Les assureurs ont des outils qui leur permettent de les détecter, et ne remboursent pas les propriétaires qui se sont laissé abuser », constate Pierre Hautus. Pour éviter ces mauvaises surprises, il est possible de faire valider le dossier de son locataire par l’assureur, avant son entrée dans les lieux. Une option utile, que certaines assurances proposent gratuitement.
UNE GARANTIE PUBLIQUE POUR LES MOINS DE 30 ANS
Mais si votre bien immobilier se situe dans une zone où le pouvoir d’achat des locataires est faible et l’offre importante, il sera difficile de trouver un locataire présentant toutes les garanties requises par l’assureur… alors passez votre chemin ! Les garanties loyers impayés constituent dans ce cas une dépense inutile. D’autant plus que la loi interdit aux propriétaires-bailleurs qui ont souscrit une assurance loyers impayés de demander une caution solidaire à leur locataire. Seule exception : lorsque ce dernier est un étudiant. « Cette interdiction était au départ applicable à tous les locataires, se souvient David Rodrigues, de la CLCV. Cela s’est avéré une catastrophe, tant les propriétaires sont attachés à disposer d’une caution familiale pour les étudiants. »
Dans certains cas, la garantie Visale, proposée par l’organisme public Action Logement, peut constituer une bonne alternative. Depuis le 1er février 2016, Action Logement se porte garant pour certains locataires, et prend intégralement en charge le paiement des loyers et des charges s’ils venait à faire défaut. Cette garantie est gratuite, mais n’est pas applicable à tous : seuls sont couverts les locataires de moins de 30 ans ou ceux qui entrent dans leur logement dans les 6 mois après avoir signé un contrat de travail (CDD, intérim, contrats aidés, CDI en période d’essai…). Le loyer peut représenter jusqu’à 50 % des ressources du locataire – soit un taux d’effort beaucoup plus élevé que les assurances loyers impayés classiques. Mais il ne doit pas excéder 1 500 € par mois en Ile-de-France et 1 300 € en régions. Certains bailleurs regrettaient que la garantie ne fonctionne que les trois premières années de la location, contrairement aux assurances loyers impayés qui fixent une durée globale d’impayés. Si le locataire faisait défaut au-delà de ce laps de temps, le propriétaire n’était pas indemnisé. La donne est en train de changer : à partir de la fin du mois de mai, la garantie Visale couvrira 36 mois d’impayés au total, soit autant que la plupart des garanties loyers impayés privées. Un bémol persiste : « Visale ne propose pas de garantie contre la dégradation du logement », regrette David Rodrigues. Et les deux formules, assurance privée et garantie Visale, ne sont pas superposables. ■