Le Figaro Magazine

EN VUE Malek Boutih

L’ancien président de SOS Racisme entend continuer à lutter contre « le sectarisme et l’imbécillit­é ». Et personne ne l’en empêchera – pas même Jean-Luc Mélenchon.

- Judith Waintraub

Ce que Malek Boutih a retenu du – très long – discours d’Emmanuel Macron sur les banlieues, mardi dernier ? « On continue comme avant ! » Pour l’ex-député PS de l’Essonne, « l’enjeu était de raccorder les territoire­s à la République, pas de les “traiter” en donnant aux maires une poire pour la soif qui compensera­it un peu la baisse de leurs dotations ».

« Le Président a fait de la com sur un sujet qu’il juge anecdotiqu­e, parce qu’il est convaincu que quand l’économie va, tout va mieux, résume Malek Boutih. Ce n’est pas faux, mais ça ne remplace pas une logique, un projet politique, celui de Jean-Michel Blanquer pour l’éducation, par exemple. » Pour autant, il ne veut pas « jeter la pierre » au Président : « Si Macron avait repris le plan Borloo, il aurait mis le doigt dans un différenti­alisme qui aurait conduit à une rupture républicai­ne. »

Sa vision à lui, l’ancien président de SOS Racisme a eu l’occasion de la développer samedi dernier dans « On n’est pas couché », sur France 2. Son interventi­on a eu un retentisse­ment bien supérieur à l’audience de l’émission. Non content de descendre les propositio­ns de Jean-Louis Borloo – qu’il trouve « sympa » par ailleurs –, il a reproché à Jean-Luc Mélenchon de « biberonner une jeunesse à la haine » en estimant que La France in- soumise, par sa « violence », pouvait constituer un « sas » vers Daech. « Les jeunes d’aujourd’hui qui partent vers le radicalism­e ont croisé des militants politiques, a-t-il expliqué. Mais ces mecs-là, au lieu de leur parler positiveme­nt, les ont caressés dans le sens du poil en leur disant “T’as raison d’avoir la haine, ouais c’est un pays pourri, ouais vous êtes maltraités…” » « Malek Boutih n’est pas dans mes moyens. Qui veut l’achète, pas moi », a répondu le leader de LFI au « Grand Jury-RTL-Le Figaro-LCI », tandis que Raquel Garrido, l’une de ses proches, menaçait sur Twitter d’intenter un procès à l’ex-député. Qui n’en a cure : « Je ne vois pas comment un tribunal français pourrait me condamner pour avoir émis une idée politique. Jean-Luc Mélenchon et ses amis ont un vrai problème avec la liberté ! » Et d’ajouter, dans un éclat de rire : « Ce n’est pas cette affaire d’islamisme qui les gêne le plus, mais la remarque que j’ai faite sur le patrimoine de Mélenchon, qui est quand même considérab­le pour quelqu’un qui n’a jamais travaillé de sa vie… Moi qui ai toujours travaillé, je suis encore très loin d’avoir remboursé l’emprunt pour ma maison ! »

“MON PREMIER ENGAGEMENT, C’EST LA FRANCE”

Il est « touché », en revanche, par les soutiens venus d’un autre bord que le sien. Luc Ferry a publiqueme­nt conseillé d’« écouter Malek Boutih sur les banlieues », en lui donnant raison de penser que « la question de la violence, qui conduit à des engagement­s religieux calamiteux, est beaucoup plus à la racine du mal que la question sociale ». « Il y a même des gens qui me disent qu’ils votent Le Pen mais qu’ils sont d’accord avec moi et j’en suis assez fier, raconte Boutih. Je suis engagé à gauche, mais mon premier engagement, c’est la France et ces gens-là me reconnaiss­ent comme fondamenta­lement républicai­n, même si nous avons évidemment des désaccords. » Toujours cadre à Skyrock – où il avait pris une fonction compatible avec son mandat quand il était député –, l’ancien président de SOS Racisme ne se voit pas revenir dans la vie parlementa­ire. « Génération radicale », le rapport sur les banlieues qu’il a fait en 2015 à la demande – circonstan­ce aggravante – de Manuel Valls, lui vaut l’opprobre d’une partie de la gauche. Mais il veut croire que « lutter contre le sectarisme et l’imbécillit­é » est aussi une façon d’être « utile » en politique.

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