CROIX DU CHRIST CONTRE CROIX GAMMÉE
En un volume, le portrait de 27 chrétiens, hommes ou femmes, que leur foi a encouragés à s’engager contre Hitler.
Ouvrons les Libres propos de Hitler recueillis sur l’ordre de Martin Bormann (Flammarion, 1952). Page 7, on y lit ceci : « Le coup le plus dur qui ait jamais frappé l’humanité fut l’avènement du christianisme. » Prenons ensuite le Journal de Joseph Goebbels, sans doute le plus proche du Führer parmi tous les grands chefs nazis, à la date du 14 décembre 1941 (Tallandier, 2009) : « Le christianisme est une doctrine de la déchéance. Pour un homme moderne, il ne mérite que le mépris intellectuel. » En 1944, à Filippo Anfuso, ambassadeur de l’Italie fasciste à Berlin, le chancelier du IIIe Reich, déclarait ceci : « Je ne suis pas chrétien,
mais païen » (parole figurant dans les Mémoires d’Anfuso, parus chez Perrin en 2006). On remplirait un livre entier avec des citations illustrant l’antichristianisme obsessionnel, corrélé à l’antisémitisme, de Hitler et de ses compagnons. Pour autant, par tactique, dans un pays alors composé de 40 millions de protestants et de 20 millions de catholiques, les nazis avaient dû composer ou biaiser afin d’accéder au pouvoir. Après 1933, et surtout pendant la guerre, afin de mobiliser les Allemands, ils dissimulèrent plus ou moins, de même, la persécution qu’ils faisaient subir aux Eglises. Nombreux furent néanmoins, parmi tous ceux qui résistèrent à Hitler, ceux qui furent conscients de cette dimension antichrétienne. Dominique Lormier, historien et écrivain prolifique, brosse 27 portraits d’hommes et de femmes, catholiques, protestants ou orthodoxes, pour qui la foi a été un moteur d’engagement contre le national-socialisme. Il y a là des militaires, dont quatre maréchaux (Juin, de Lattre, Leclerc, Koenig), des officiers de la Résistance (le colonel de Carrère, le général Pommiès, le colonel Rémy, le lieutenant « Tom » Morel, héros des Glières), mais aussi des religieux (le père Marie-Benoît, capucin décrété Juste parmi les nations, le père Grégoire Péradzé, prêtre géorgien ordonné à Paris et exécuté à Auschwitz) ou des pasteurs (de Dietrich Bonhoeffer à André Trocmé), sans oublier, de Laure Gatet à Germaine Ribière, d’admirables figures féminines qui ont donné leur vie pour les autres. Une lecture qui permet de ne pas désespérer du genre humain. Ces chrétiens qui ont résisté à Hitler, de Dominique Lormier, Artège, 304 p., 18,90 €.