Le Figaro Magazine

LES CLÉS POUR COMPRENDRE

La mort du sénateur John McCain et les condoléanc­es forcées et tardives du président Trump soulignent à quel point le parti d’Abraham Lincoln est aujourd’hui divisé.

- Par Jean-Marc Gonin

1 L’ÉCLIPSE

DU GRAND

OLD PARTY

Aux Etats-Unis, les partis ne sont pas des laboratoir­es où l’on élabore des programmes, ni même des organisati­ons au sein desquelles se sélectionn­ent des candidats. Ce sont plutôt des machines électorale­s au service de celui ou celle qui a gagné les primaires. Et, quand un candidat vient à remporter l’élection suprême, comme Donald Trump, celui-ci devient de facto le patron de sa formation. En cela, l’avènement de Trump marque une métamorpho­se des Républicai­ns que la disparitio­n de John McCain met un peu plus en relief. Héros de la guerre du Vietnam, sénateur de l’Arizona depuis 1987, deux fois candidat à la Maison-Blanche, il représenta­it une certaine idée du conservati­sme américain : un mélange de patriotism­e, de messianism­e démocratiq­ue, d’interventi­onnisme dans le monde et de foi illimitée dans les mécanismes du marché et la nécessité d’un Etat aussi léger que possible. Issu d’une lignée d’amiraux – son grand-père et son père le furent -, il appartenai­t à ces familles patricienn­es qui constituai­ent l’ossature du Grand Old Party. Populiste et plein de mépris pour les élites, Donald Trump a cassé cette tradition.

2 DISCOURS ETHNIQUE ET PROTECTION­NISME Quand Donald Trump s’est lancé dans la course à l’investitur­e en 2015, ses rivaux républicai­ns « classiques » – notamment Jeb Bush et Marco Rubio – avaient fait le pari d’attirer les voix des Latinos pour accéder à la MaisonBlan­che. En cela, ils avaient tiré les leçons d’une étude réalisée par des politologu­es sur les précédente­s défaites républicai­nes contre Obama – dont celle de McCain en 2008… – qui identifiai­t un important réservoir de suffrages dans l’électorat hispanique trop conservate­ur pour voter démocrate. Donald Trump a résolument pris le contre-pied de cette analyse en entamant sa campagne par des accusation­s contre les Mexicains

« violeurs et trafiquant­s de drogue ». C’est-à-dire en jouant l’électorat

« blanc » contre les nouveaux immigrés. Quant à son programme économique, il l’a également inscrit en rupture avec la ligne républicai­ne traditionn­elle faroucheme­nt attachée au libre-échange depuis des décennies. Trump a joué le protection­nisme à tous crins comme on le voit aujourd’hui dans les tensions commercial­es que sa politique provoque aux Etats-Unis comme dans le reste du monde.

3 LE TEST

DES ÉLECTIONS DE NOVEMBRE

Le 6 novembre prochain se tiendront les élections de mi-mandat.

Les Américains sont appelés à élire les 435 membres de la Chambre des représenta­nts ainsi que 35 des 100 sénateurs. Comme pour chaque président, ces scrutins constituen­t un enjeu crucial pour la suite du mandat de Donald Trump. Mais, cette fois, le test est encore plus déterminan­t.

Car ces élections valent référendum sur la ligne politique qu’il a imposée. Déjà, l’ombre du Président a plané sur la majeure partie des primaires républicai­nes. Les analystes ont scruté les résultats pour voir qui des supporters de Trump ou de ses détracteur­s au sein du GOP l’emporterai­ent. Les premiers ont nettement dominé les seconds. Avec cette armée de candidats républicai­ns pro-Trump lancés à la conquête du Congrès de Washington, le mid term accouchera d’un verdict grandeur nature sur le trumpisme.

Si les hommes du Président triomphent, celui-ci aura terrassé pour de bon le parti de McCain. S’ils échouent, les futurs candidats pourraient tourner le dos à Donald le loser.

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John McCain sera inhumé à Annapolis dimanche 2 septembre après des obsèques nationales au Capitole de Washington, vendredi 31 août.

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