STÉPHANE HOFFMANN
Pressons-nous d’en rire…
Il est l’antihéros par excellence. Spectateur d’un monde qu’il déteste, il se contente de contempler le ridicule des uns et la bêtise des autres. A 25 ans, Amblard Blamont-Chauvry ricane et baye aux corneilles. Polytechnicien et énarque, un peu par hasard, surtout parce qu’un Versaillais de bonne famille ne peut faire autre chose, son avenir est tout tracé. Mais, en ce début des années 1970, l’avenir, c’est la politique, et la politique est aux mains des technocrates : l’horreur. Il laisse donc cette ambition-là aux autres, préférant se balader dans sa ville et prendre du plaisir avec Coquelicot, charmante et sensuelle jeune femme, bien plus divertissante qu’Isabelle Surgères, désespérément carriériste, qu’il épousera pour ne pas faire de vagues.
Stéphane Hoffmann nous a habitués à ne jamais prendre de gants et c’est pour cela qu’on l’aime. Il n’y va pas par quatre chemins pour tirer à boulets rouges sur les copains qui vieillissent mal, les salons mondains où de pauvres zèbres rêvent de portefeuilles, tandis que de vieilles femmes du monde espèrent être citées dans Jours de France. Mais les quelques belles ambitieuses dont il se moque, en tête l’irrésistible comtesse de Florensac, au sens de la repartie inégalable, il ne peut s’empêcher de les admirer, peut-être même de les aimer. Elles sont au fond ce qu’Amblard ne sera jamais : courageuses, passionnées, exaltées. Bien trop fatigant pour cet énergumène paresseux, nonchalant, mélancolique. En un mot : délicieux. L. C.
Les Belles Ambitieuses, Albin Michel, 270 p., 19,50 €.