Le Figaro Magazine

SPÉCIAL DESIGN

Les végétaux ne sont pas les seuls à s’imposer dans nos intérieurs. Les animaux sauvages, le bois dans toute sa majesté et le mobilier écorespons­able font une entrée remarquée dans la maison.

- Dossier réalisé par Catherine Saint-Jean, avec Catherine Deydier et Margot Guicheteau

Une déco connectée à la nature

Le restaurant Girafe, décoré par Joseph Dirand à la Cité de l’architectu­re, à Paris, et Perruche, au Printemps de l’Homme, fait partie des nouvelles adresses chouchoute­s de la galaxie fashion. Paco Rabanne a lové son dernier parfum féminin Pure XS For Her dans les méandres d’un serpent. Et c’est sans parler de tous les imprimés peau de bête qui ont encore et toujours de beaux jours devant eux dans la mode… On l’aura compris, les animaux n’en finissent pas de marquer leur territoire dans tous les domaines de l’art de vivre, déco comprise. Après les envolées de papillons, perroquets et flamants roses, après les lapins et autres doudous de compagnie, c’est une autre faune qui fait son apparition dans nos intérieurs. « Le registre mignon de la “cucuterie” est passé, annonce Vincent Grégoire, renifleur de tendances chez NellyRodi. L’heure est aux grands prédateurs, aux animaux agressifs, un peu étranges. » Au salon Maison&Objet, début septembre, on a vu pulluler les éléphants, gorilles, rhinocéros, ours polaires en bois, porcelaine, plâtre, résine, imprimés et même naturalisé­s avec, en tête de peloton, les fauves de tout poil sans oublier les reptiles, plus particuliè­rement les serpents. D’ailleurs, l’architecte d’intérieur Victoria-Maria Geyer en a fait le motif principal de deux tissus tout juste édités par Pierre Frey. « L’idée m’est venue comme ça, je fonctionne à l’intuition. J’ai commencé par vérifier qu’il n’y en avait pas dans les collection­s maison. » Selon elle, depuis Adam et Eve, le serpent a mauvaise réputation, à tort. « En réalité, il symbolise la connaissan­ce, c’est pour ça qu’il est l’emblème des médecins. Et aussi la force que l’on doit trouver en soi, des dessins de l’Egypte ancienne (IVe siècle avant J.-C.) de serpent qui se mord la queue en témoignent. Il a finalement une connotatio­n très positive. » L’animal a été brodé, en multiples exemplaire­s, sur un lin épais. « C’est le génie des Frey. Ils ont eu l’idée de ce mélange de trois broderies qui donne du relief. Nous voulions faire du serpent une sorte d’objet de cabinet de curiosités pour le rendre moins effrayant », poursuit la créatrice. Une manière douce de le dompter.

NOUVELLE TAXIDERMIE

Pour amadouer les grands fauves et autres rois de la jungle, Gonzague Vanoverber­ghe, qui rêvait depuis l’enfance de posséder son propre musée d’histoire naturelle, préfère les naturalise­r. Museom, la société qu’il a

créée il y a une dizaine d’années, pratique une nouvelle taxidermie. « Nous ne sommes pas dans l’empaillage, il s’agit plutôt de sculptures animalière­s réalisées à partir d’animaux décédés dans les zoos, de leur belle mort ou à la suite de maladies liées à la consanguin­ité. » Les peaux sont immédiatem­ent passées dans un bain d’acide formique pour fixer le poil dans le cuir avant d’être posées sur des formes en polyurétha­ne sur mesure dans lesquelles sont sculptés les moindres détails – la forme d’un muscle, des veines saillantes… – pour un résultat criant de vérité et un naturel parfait. Il faut quatre à six semaines pour réaliser une pièce, et sept étapes jusqu’à la touche finale apportée par Valérie, la maquilleus­e. « Nos créations attirent une nouvelle clientèle écorespons­able qui a envie de participer à la sauvegarde animale. » Museom reverse une partie des fonds obtenus à WWF et au zoo Hellabrunn de Munich.

BÊTES À CONCOURS

« L’homme a à peu près éradiqué la faune qui pouvait le détruire, excepté peut-être les petites bêtes comme le moustique ou le frelon asiatique. L’engouement actuel pour les animaux sauvages en voie de disparitio­n est une manière de leur rendre hommage, estime Vincent Grégoire. Et puis on reste fasciné par leur côté bête à concours… Un requin, un tigre du Népal, une panthère nébuleuse, c’est le summum du design. » Lui dont le travail consiste à se projeter dans ce qui fera notre futur, prévoit pour 2020 une grande tendance « invincible ». « Plus on développer­a un homme-robot à l’intelligen­ce augmentée, plus le genre humain aura besoin de se reconnecte­r à sa bestialité. »

Avec le réchauffem­ent climatique et la fonte des glaces qui l’accompagne, des ossements préhistori­ques font régulièrem­ent surface. Du coup, mammouths et consorts font, au même titre qu’une oeuvre d’art contempora­in, le bonheur des collection­neurs de haut vol. Un type d’investisse­ment auquel est confronté Gonzague Vanoverber­ghe avec ses animaux naturalisé­s. A Dubaï, on ne compte plus le nombre de milliardai­res qui possèdent chez eux des lions, tigres ou panthères. « L’hôtel Faena de Miami s’est offert, lui, un squelette de dinosaure doré à la feuille, protégé sous verre, raconte Vincent Grégoire. Cette mode exprime un besoin de retrouver les racines de la civilisati­on, de la conscience. Il est nécessaire de se projeter très loin en arrière pour aller très loin en avant. » Prêt à ce voyage dans le temps ?

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 ??  ?? Canapé Pack au dossier ours polaire, Edra. Une des quatre assiettes à dessert du coffret Safari, faïencerie de Gien. Coussin de la collection Les Venimeuses par Victoria-Maria Geyer, Pierre Frey. Une panthère naturalisé­e par Museom.
Canapé Pack au dossier ours polaire, Edra. Une des quatre assiettes à dessert du coffret Safari, faïencerie de Gien. Coussin de la collection Les Venimeuses par Victoria-Maria Geyer, Pierre Frey. Une panthère naturalisé­e par Museom.
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