À L’AFFICHE
A 60 ans, l’ancien leader des Jam livre un album majoritairement acoustique. Une réussite éblouissante.
et les passe-temps d’Eric Neuhoff
Johnny Rotten devenu obèse et grotesque («No future », avait-il annoncé avec une grande clairvoyance), Joe Strummer décédé, Siouxsie Sioux retirée, Billy Idol fini, les autres – Buzzcocks, Damned, etc. – condamnés à jouer leurs vieilleries devant un parterre de nostalgiques ventripotents et exclusivement masculins dans des salles toujours plus petites... Paul Weller est donc le dernier de la classe 1977, année du big bang du punk britannique, à avoir non seulement évolué, mais avec grâce. Avec les Jam d’abord, enfants des Who et des Kinks plus que des Sex Pistols, puis avec le Style Council, qui le vit flirter avec le jazz et une esthétique antirock (de moins en moins de guitare au fur et à mesure des albums), avant la renaissance en solo. Au début des années 1990, adoubé par les jeunes Turcs de la britpop, Oasis et Blur en tête, Weller relança spectaculairement sa carrière avec quelques albums (Wild Wood, Stanley Road) vendus à des centaines de milliers d’exemplaires. D’abord rétro, ce mod dans l’âme a su élargir ses influences, livrant ici et là des disques très audacieux et novateurs de la part de ce fanatique des sixties (22 Dreams, Saturns Pattern). A tel point qu’on se demandait ce qu’il pourrait bien faire par la suite.
Le voici de retour avec un album soul dans l’esprit, folk dans la forme, majoritairement acoustique, dans lequel les guitares à 12 cordes chevauchent quelques cuivres discrets. Un disque pastoral et rêveur, qui, s’il n’est pas le plus immédiatement accrocheur, est sans doute le plus touchant et le plus profond de sa carrière.