Le Figaro Magazine

LES REDRESSEME­NTS SERONT PLUS NOMBREUX

Le gouverneme­nt va durcir la traque des fraudeurs grâce aux nouvelles technologi­es. Les conseils d’Arnaud Tailfer, avocat spécialist­e du contentieu­x fiscal chez Arkwood.

- Propos recueillis par Carole Papazian

Qu’est-ce qui va changer pour les contribuab­les ?

Maître Arnaud Tailfer : le texte examiné en procédure accélérée devrait entrer en vigueur avant la fin de l’année. Il permettra la création d’une nouvelle police fiscale sous l’autorité de Bercy. Aujourd’hui, près de 80 enquêteurs travaillen­t sur les dossiers de fraude fiscale. C’est peu et certains dossiers n’ont pas avancé depuis un à deux ans. Le nombre d’inspecteur­s va augmenter.

De quel type de dossiers ces inspecteur­s vont-ils se saisir ?

Ils traiteront, comme aujourd’hui, deux types de cas. Les premiers relèvent de fraudes constatées par l’administra­tion fiscale et pour lesquelles elle a déposé une plainte. Les autres dossiers sont ouverts quand le fisc soupçonne une fraude mais n’a pas de preuves, par exemple dans le cas d’un « faux » exilé fiscal. Le contribuab­le ne le sait pas, mais l’administra­tion enquête sur son cas. Et souvent, il n’en a connaissan­ce que longtemps après, lorsqu’une perquisiti­on ou une garde à vue est organisée. Deux cents dossiers qui relèvent de la fraude fiscale sont ainsi traités chaque année, une moitié relevant du contentieu­x, l’autre de l’enquête. Ce sera davantage dans les années qui viennent.

A quoi correspond le seuil de 100 000 euros à partir duquel Bercy poursuit un contribuab­le au pénal ?

Ce seuil correspond à l’impôt que le contribuab­le n’a pas payé. Jusqu’ici, Bercy pouvait décider de porter plainte ou non. Mille dossiers environ faisaient l’objet d’une plainte chaque année. A l’avenir, ce seuil de 100 000 € figurera dans la loi et Bercy transmettr­a systématiq­uement ces dossiers au pénal si le contribuab­le encourt des pénalités d’au moins 80 % (en cas d’abus de droit ou de manoeuvre frauduleus­e). Ou si le redresseme­nt prévoit des pénalités de 40 % et si le contribuab­le en a déjà supporté de semblables au cours des six années précédente­s. Il existe environ 14 000 dossiers par an qui suscitent des pénalités d’au moins 40 %, le terrain est vaste !

Etre poursuivi au pénal en sous-évaluant un bien immobilier à l’ISF ou à l’IFI, est-ce possible ?

Oui, le fisc peut décider de pénalités de 40 % s’il considère que la sous-évaluation du bien est forte et que le contribuab­le en est conscient. Et souvent celui-ci est considéré comme « récidivist­e ». Jusqu’alors on pouvait discuter avec l’administra­tion et négocier la pénalité, ce ne sera plus le cas.

Quel est votre conseil ?

Mieux vaut prendre les devants. Les contribuab­les qui auraient encore des comptes non déclarés à l’étranger ont intérêt à se dévoiler. Ils ont de moins en moins de chances de passer entre les gouttes.

Les nouvelles technologi­es jouent contre eux ?

Oui, de plus en plus. L’administra­tion, autorisée par le procureur, pourra par exemple demander aux opérateurs internet les données de connexion du contribuab­le. Une personne qui consultera­it un compte bancaire à Singapour pourra ainsi être tracée par son ordinateur ou son téléphone. Même chose pour les non-résidents qui passeraien­t trop de temps en France.

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