LA PAGE D’HISTOIRE de Jean Sévillia
A travers une fresque prodigieuse, Jean-Yves Le Naour restitue toutes les facettes d’un conflit dont est sorti le monde moderne.
C’était il y a cent ans. Le 7 novembre 1918, le clairon Pierre Sellier, du 171e régiment d’infanterie, sur ordre de son capitaine qui accueillait le convoi des parlementaires allemands venus négocier avec le maréchal Foch à Rethondes, sonnait le cessez-le-feu. Quatre jours plus tard, le 11 novembre 1918, à la onzième heure du onzième jour du onzième mois de l’année, Pierre Sellier embouchait de nouveau son instrument, comme des centaines d’autres clairons régimentaires postés sur le front, afin de sonner l’Armistice. Après 1 561 jours de combats, la Première Guerre mondiale venait de prendre fin pour la France. Au moment du bilan, on compta près de 1,4 million de tués sur plus de 8 millions d’hommes mobilisés, sans oublier les 2 millions de blessés qui conservèrent une invalidité partielle, et les 300 000 mutilés.
Cet effroyable holocauste est aujourd’hui incompréhensible. Incompréhensible politiquement, puisque nous sommes habitués à vivre en paix avec nos voisins allemands, et incompréhensible humainement, tant il nous paraît inimaginable que des millions d’hommes aient pu endurer, quatre ans durant, ce que nos aïeux les poilus ont subi : le froid, la faim, la soif, la boue, les rats et la vermine, le vacarme des mitrailleuses et de l’artillerie, la peur omniprésente de la mort. Historien de la Première Guerre mondiale, Jean-Yves Le Naour a raconté celle-ci à travers cinq ouvrages parus entre 2012 et 2016 : 1914. La grande illusion, 1915. L’enlisement, 1916. L’enfer, 1917. La paix impossible et 1918. L’étrange victoire. Voici les cinq livres réunis en un seul tome sous le titre 1914-1918. L’intégrale, volume accompagné d’un précieux index des noms propres qui couvre les ouvrages d’origine. La fresque est d’autant plus passionnante que, puisée aux meilleures sources et scientifiquement irréprochable, elle est par ailleurs écrite d’une plume alerte qui permet à cette somme historique de se lire – l’expression, pour une fois, n’est pas usurpée – comme un roman. Qui est responsable de ce conflit ? Pourquoi a-t-il autant duré ? Pourquoi cette guerre n’était-elle pas du même type que toutes celles qui l’ont précédée ? En quoi a-t-elle changé le monde ? Pourquoi n’a-t-elle pas été, comme l’espéraient les anciens combattants, « la der des ders » ? Réponses chez Le Naour.
1914-1918. L’intégrale, de Jean-Yves Le Naour, Perrin, 1 598 p., 35 €.