JOHNNY, LES RATS ET L’ART DU MARKETING
NOUS VIVONS UNE ÉPOQUE FORMIDABLE, PAR NICOLAS UNGEMUTH
Vous vous méfiez des prix littéraires ? Vous avez raison : ils ne couronnent pas que des bons livres. En 1932, déjà, les jurés du Goncourt ont préféré Les Loups de Guy Mazeline (qui ça ?) à Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline – le Renaudot avait eu plus de flair. Certains prix littéraires prêtent à sourire : il y eut, durant quelque temps, un prix PaulLéautaud alors que l’écrivain avait passé sa vie et son Journal à les vilipender. Heureusement, il reste les fans de Johnny, « l’Elvis français ». Comme ils se sont tous acheté son album posthume et qu’il leur faudra patienter avant que l’on exhume de nouveaux fonds de tiroir, un éditeur qui reçoit rarement des prix littéraires, a pensé à eux et tente de combler leur admiration passionnelle pour celui qui chantait en 1976, dans Les Chiens de paille (on notera l’hommage à Sam Peckinpah), la phrase mythique
« C’était fin août, début juillet… ».
Sur la couverture de Mémoires d’un rat
d’Andrzej Zaniewski, figure un gros bandeau : « Le livre que Johnny Hallyday offrait à ses amis ».
Voilà du marketing finaud. Johnny, c’est notoire, aimait faire des cadeaux. Il était connu pour sa générosité. Ce qu’on savait moins et qu’on apprend aujourd’hui, c’est qu’il lisait, et donc offrait ce livre polonais écrit en 1979 et publié en France en 1994… C’est l’histoire d’un rat. Une allégorie, évidemment, comme
Maus, la souris d’Art Spiegelman. Et Johnny l’a tant aimé, ce livre, que, paraît-il, il l’« offrait à ses amis ». La semaine prochaine,
« le DVD que Gilbert Montagné a le plus regardé ».