Le Figaro Magazine

VOIR VENISE ET GRANDIR

★★★ UN ÉTÉ VÉNITIEN, de Francesco Rapazzini, Bartillat, 183 p., 18 €.

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C’est l’été 1978. Sur la Giudecca, face aux Zattere, un adolescent s’occupe comme il peut dans la Venise qui est la sienne, alors que déferlent des hordes de touristes. Il habite un ancien bordel ayant appartenu au poète Giorgio Baffo, « le rival de

Goldoni », avec sa mère écrivain, des chiens, des chats, un perroquet et un aquarium rempli de poissons. Il se baigne dans le canal, fraie avec tout le monde, de tous âges, de toutes classes : fils de pêcheurs, clochardes, riches Anglais de passage. Il se déniaise avec une Française, commence à fumer, tombe amoureux d’Erica Jong, croise Anthony Burgess, prend le thé avec sa mère chez Peggy Guggenheim qui s’apprête à fêter ses 80 ans, sympathise avec le peintre Karel Appel, et sillonne la ville et les îles alentour de rendez-vous en rendez-vous pour faire passer le temps.

Le 26 août, Albino Luciani,

« patriarche de Venise », devient Jean-Paul Ier. Il mourra trentetroi­s jours plus tard. La fête du Redentore « née des cendres de

la peste », à l’occasion de laquelle, une fois par an, on prépare les

sarde in saor (sardines en sauce), bat son plein. L’Eté, des Quatre

Saisons de Vivaldi, est joué fort :

« Ce soir Venise a sorti sa robe longue et ses bijoux de famille pour séduire un vieux mari qui ne la regarde plus […]. Mais ce soir elle a décidé que ce vieux mari doit retomber amoureux, doit oublier que parfois elle empeste, qu’elle fait la putain avec les touristes […]. Ce soir elle a décidé qu’elle sera la plus belle du bal. Ce sera avec elle que tout le monde voudra coucher. Non par vice, mais par amour. » Dans ce roman sans histoire, c’est la cité lacustre qui est la véritable héroïne, et cet Eté vénitien devra être de toutes les valises avant de s’y rendre, avec Venises de Paul Morand, et quelques autres.

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