CINÉMA et l’apostrophe de J.-Ch. Buisson
Le journaliste-animateur ne défend pas que les vieux monuments mais aussi ceux qui les ont construits et/ou habités.
CHER STÉPHANE BERN, il a toujours été de bon ton de se moquer de vous. Il y a vingt ans, on vous reprochait votre condescendance vis-à-vis des monarques que vous fréquentiez ou interrogiez ; il y a quinze ans, on ricanait de votre entrain, de votre générosité et de votre enthousiasme audiovisuels tant il est vrai que se portent beaucoup mieux à l’écran ou devant un micro les mauvais sentiments, la tristesse et le ricanement ; plus récemment, ce sont vos prestations publicitaires ou votre « animation » du concours Eurovision de la chanson qu’on raillait abondamment. Sans oublier votre engagement auprès d’Emmanuel (et Brigitte) Macron vous ayant conduit à croire, touchant naïf que vous êtes, que vous seraient accordés par la classe politique et l’administration financière françaises les moyens de mener un juste combat en faveur de la réhabilitation et de l’entretien de notre patrimoine national quand la peste brune et la catastrophe écologique sont respectivement à nos portes et au-dessus de nos têtes. Mais tout cela n’est rien au regard de cette faute impardonnable que vous commettez depuis des décennies : faire aimer l’Histoire au plus grand nombre. Par les images et par les textes. Par la voix et par la plume.
Le huitième volet de vos Secrets d’Histoire vient de paraître (Albin Michel) et ce ne sont que nez qui se pincent, volets qui se ferment et dents qui grincent parmi les arbitres des élégances médiatiques et universitaires. Ah le bougre ! Ah le luron ! Ah le ouistiti, qui parvient à nous passionner avec rigueur pour des sujets qu’on croyait connaître par coeur : les destins incroyables de Jacques Coeur, Edouard VII et Néfertiti ; les caractères exceptionnels de MarieThérèse d’Autriche, Marguerite de Valois et Alexandre le Grand ; les ressorts du génie des Strauss, d’Agatha Christie ou d’Alexandre Dumas, etc. Et toujours cette abnégation à chercher l’anecdote inédite, le détail méconnu, la citation qui tue. Tiens, celle-ci, de Sacha Guitry, par exemple, à propos d’un monument de notre patrimoine qui n’est pas trop en danger, merci – le château de Versailles :
« Les rois faisaient des folies sans pareilles /
Ils dépensaient notre argent sans compter /
Mais quand ils construisaient de semblables merveilles / Ne nous mettaient-ils pas notre argent de côté ? » Post-apostrophum : vous ne voulez pas, quand même, arrêter de commenter l’Eurovision ?