Le Figaro Magazine

COMMENT LE FISC VOUS ESPIONNE

Durcisseme­nt des sanctions, création d’une police fiscale, recueil d’informatio­ns provenant de l’étranger, usage intensif de l’intelligen­ce artificiel­le : Bercy met le paquet pour lutter contre la fraude fiscale. Y compris en voulant surveiller les cont

- Par Vincent Nouzille

Vous êtes des fiscaliste­s de haut vol. Je compte beaucoup sur vous pour traquer les fraudeurs ! » Debout face à une assemblée de 25 agents du fisc expériment­és, qui viennent d’entamer une formation judiciaire express de six mois à l’Ecole nationale des douanes, installée à Tourcoing, Gérald Darmanin savoure, en cette soirée du 10 janvier, cette rencontre dans sa ville d’élection. Le ministre de l’Action et des Comptes publics est à l’aise sur ses terres nordistes, promettant aux stagiaires de « boire une bière » avec eux à Tourcoing avant qu’ils n’achèvent leur cursus l’été prochain. Mais il est surtout ravi d’inaugurer ainsi la première promotion de la « police fiscale » qui vient d’être créée sous son impulsion. Une loi antifraude, adoptée en octobre, a étendu les possibilit­és de poursuites pénales et instaure un service judiciaire dédié rattaché à Bercy, complément­aire des services de police. En plus des contrôles fiscaux classiques, il s’agit de poursuivre devant les tribunaux davantage de délinquant­s. Après avoir encouragé les stagiaires, Gérald Darmanin confie en aparté : « Sous le contrôle des magistrats, ces agents pourront utiliser des écoutes téléphoniq­ues, mener des perquisiti­ons et procéder à des gardes à vue. Il était temps qu’une vraie police fiscale puisse agir de la sorte. »

UNE TOLÉRANCE ZÉRO POUR LES FRAUDEURS

Soupçonné de ne pas mettre le paquet pour sanctionne­r la fraude qui représente­rait entre 40 et 100 milliards d’euros par an – évaluation très large qui n’a rien de scientifiq­ue –, le gouverneme­nt veut démontrer qu’il agit avec célérité sur ce sujet sensible. Après avoir fait voter, en août, une loi qui instaurait le « droit à l’erreur » pour les administré­s de bonne foi, il vante une « tolérance zéro » pour la vraie fraude. « Eluder l’impôt est un coup de poignard au pacte républicai­n, martèle le ministre. Il est normal de sanctionne­r ceux qui s’y adonnent. Nous redressons entre 17 et 20 milliards d’euros chaque année suite à des contrôles fiscaux. Nous avons désormais des moyens pour améliorer ce chiffre et faire de la prévention. »

La police fiscale n’est pas la seule nouvelle arme dont il dispose. Effectif depuis le 1er janvier, le prélèvemen­t à la source doit limiter certains abus de contribuab­les expatriés qui « oubliaient » parfois de déclarer des revenus. « Nous devrions récupérer ainsi entre 700 millions et 1 milliard d’euros », estime Gérald Darmanin.

Surtout, depuis plusieurs mois, le fisc utilise de puissants outils d’enquête. Recueil de renseignem­ents venant de pays voisins, accès à des fichiers secrets, utilisatio­n d’algorithme­s d’intelligen­ce artificiel­le… Plus intrusif : le fisc veut

surveiller davantage les plates-formes collaborat­ives sur internet (du type Airbnb) et les réseaux sociaux comme Facebook, Instagram ou LinkedIn (lire encadré p. 50). Le « Big Brother » fiscal se déploie à une échelle inédite, non sans inquiéter certains contribuab­les…

Cette montée en puissance est en partie due à des pressions extérieure­s. En effet, en se fondant sur une loi votée aux Etats-Unis en 2010, les autorités américaine­s ont imposé à tous les pays de nouvelles règles d’échanges d’informatio­ns fiscales sur leurs résidents. Comme leurs collègues, les Français ont été priés de s’y plier. Dans la foulée, les pays développés de l’OCDE, au nom de la lutte contre les paradis fiscaux, ont décidé, mi-2014, de faciliter les transmissi­ons automatiqu­es de renseignem­ents bancaires et fiscaux. L’Union européenne a surenchéri, avec des directives plus ambitieuse­s sur les informatio­ns portant sur les revenus financiers, les comptes bancaires, les transferts au sein des multinatio­nales ou les montages fiscaux. « C’est une vraie révolution. Elle va nous aider à pister la grande fraude, qui touche surtout les entreprise­s », se félicite Emilie Cariou, députée LREM de la Meuse, vice-présidente de la commission des Finances et elle-même ancienne contrôleus­e fiscale. Au total, une centaine de pays ont commencé à échanger des informatio­ns de ce type en 2017 et 2018. « Il reste évidemment des zones opaques où certains contribuab­les ont planqué leur argent ou tentent de se domicilier fictivemen­t, que ce soit du côté de Dubaï, du Maroc ou de la Chine, mais les mailles du filet se sont resserrées », admet un avocat fiscaliste.

DES LISTINGS DE COMPTES VENUS DE SUISSE

Dans ce contexte, la France a commencé à envoyer et à recueillir une masse colossale de renseignem­ents. Depuis mi-2017, Bercy a ainsi reçu des centaines de fichiers provenant essentiell­ement de pays européens, contenant plusieurs millions de données, principale­ment des listes de comptes bancaires de Français, avec les noms de leurs détenteurs et les montants. « Il y a deux mois, nous avons réceptionn­é, pour la première fois, des listings détaillés provenant de Suisse. Nous avons beaucoup de travail pour tout vérifier », révèle un haut responsabl­e de la Direction générale des finances publiques (DGFIP), le bras armé de Bercy. Car l’administra­tion doit d’abord trier les informatio­ns pour les rendre homogènes et exploitabl­es. « Cela nécessite un traitement complexe de remise en forme, qu’on appelle la fusion de données », explique François Paulus, fondateur de la start-up Semsoft, expert de ce sujet, qui travaille notamment pour des banques et des administra­tions. Ensuite, Bercy vérifiera si ces comptes à l’étranger sont bien déclarés par leurs titulaires, ou si certains les ont dissimulés pour des raisons inavouable­s. Les détenteurs de magots offshore non déclarés, qui n’ont pas régularisé leur situation fiscale par l’intermédia­ire du guichet spécial mis en place à cet effet à Bercy entre 2013 et 2017 – 53 000 comptes concernés, et près de 9 milliards d’euros récupérés –, risquent d’être fortement sanctionné­s.

UN ALGORITHME POUR REPÉRER LES ANOMALIES

Croulant désormais sous les renseignem­ents provenant de l’étranger, l’administra­tion s’est déjà dotée de nouveaux moyens pour pouvoir les croiser avec ses propres fichiers. Une petite équipe d’une vingtaine d’informatic­iens, de fiscaliste­s et d’experts du big data a été constituée discrèteme­nt à partir de 2014. Objectif : réunir toutes les informatio­ns sur 5 millions d’entreprise­s dans une grande base de données décloisonn­ée. Logée dans l’immeuble Sully, près de la gare de Lyon, cette cellule de « data mining », appelée « mission requête et valorisati­on » (MRV), a commencé à utiliser des algorithme­s de recherches pour mettre en évidence des corrélatio­ns suspectes que le seul examen humain serait incapable de repérer. Son logiciel d’intelligen­ce artificiel­le a été baptisé « ciblage de la fraude et valorisati­on des requêtes » (CFVR). « Il sert à détecter des anomalies, et donc des soupçons de fraude, par exemple des bénéfices minorés ou des possibles schémas de fraude à la TVA. Les premiers résultats sont très encouragea­nts », explique Antoine Magnant, directeur général adjoint de la DGFIP. Plusieurs sociétés privées spécialisé­es assistent Bercy pour le traitement de ces informatio­ns. « Nous essayons de faire gagner du temps, avec des outils graphiques de présentati­on », explique Sébastien Heymann, PDG de Linkurious, l’un de ses prestatair­es. Toujours plus gourmande, l’administra­tion fiscale a été autorisée en août 2017, à titre expériment­al pour deux ans, à nourrir sa base de données avec ses fichiers sur les particulie­rs, soit les 37 millions de foyers fiscaux. Une véritable aubaine ! Concrèteme­nt, la cellule de data mining pioche dans 22 fichiers de Bercy. Tout y passe : données des contribuab­les, revenus transmis par les employeurs, comptes bancaires, contrats d’assurance-vie, actes notariés, données patrimonia­les, cadastrale­s et immobilièr­es, liens d’associés et de dirigeants d’entreprise­s, de même que le détail des impôts payés et des contentieu­x en cours. Les ordinateur­s peuvent y ajouter des informatio­ns provenant de l’étranger, d’autres administra­tions, d’organismes sociaux ou de sociétés privées, comme des opérateurs de téléphonie ou des commerçant­s. Ils commencent même à faire des recherches à partir de mots-clés dans des documents, ce qu’on appelle du « text mining ».

Une petite équipe d’experts du big data travaille depuis 2017, à titre expériment­al, sur les données de 37 millions de foyers fiscaux

A l’arrivée, l’algorithme CFVR recrache des « indices » à la pelle : plus de 10 000 profession­nels et des dizaines de milliers de cas de particulie­rs chaque trimestre ! « Cet outil nous permet de mieux programmer nos contrôles fiscaux, à partir de ciblages plus pertinents. Mais il ne remplace pas l’humain. C’est ensuite à nos agents de procéder aux vérificati­ons », précise Maïté Gabet, chef du service du contrôle fiscal à Bercy. Avant le CFVR, chaque année, près de 30 % du million de contrôles fiscaux sur pièces et des 50 000 contrôles approfondi­s effectués ne débouchaie­nt sur aucun redresseme­nt. Ce taux devrait diminuer. « En 2018, 15 % des contrôles ont été programmés grâce à cet outil de data mining. Nous espérons que cette part montera à 50 % d’ici à un an », annonce Gérald Darmanin. La cellule MRV sera dotée à cet effet d’un budget supplément­aire de 20 millions d’euros.

OBJECTIFS : ANALYSE DU TRAIN DE VIE

ET DES DOMICILIAT­IONS

Alors que l’expériment­ation de l’utilisatio­n du CFVR sur les particulie­rs s’achèvera mi-2019, Bercy souhaite déjà la prolonger. Et veut même aller plus loin, en abreuvant son « Big Brother » de nouvelles informatio­ns : celles provenant des réseaux sociaux. Le champ est immense, puisqu’il recouvre tout ce qui est publié par les particulie­rs sur les comptes Facebook, Instagram, LinkedIn, etc. « Souvent les Français se photograph­ient eux-mêmes sur les réseaux sociaux. Ce sont les comptes personnels, puisqu’ils sont publics, qui seront regardés », a avancé Gérald Darmanin, le 11 novembre sur M6, évoquant le début d’une surveillan­ce de masse début 2019. En réalité, le ministre est allé vite en besogne. Actuelleme­nt, les services fiscaux regardent déjà, de manière ponctuelle, ce que les suspects de fraude postent sur leurs réseaux sociaux, de la même manière qu’ils demeurent attentifs à leurs apparition­s dans les médias traditionn­els. « Ils le font depuis longtemps en épluchant les articles de la presse people et la presse économique pour détecter le train de vie ou la domiciliat­ion des VIP », explique l’avocat fiscaliste Eric Ginter. C’est notamment le cas pour ce que le fisc appelle les « dossiers à fort enjeu », qui concernent notamment les contribuab­les gagnant plus de 270 000 euros par an ou dont le patrimoine est supérieur à 3,9 millions d’euros. Mais la collecte des données des réseaux sociaux de tous les contribuab­les constitue un autre défi. Elle n’est pas encore autorisée… « Nous sommes en train d’étudier le périmètre de ce que nous souhaitons récolter, afin de ne pas nous planter juridiquem­ent », explique Antoine Magnant. « Nous voulons faire une expériment­ation, en sollicitan­t, bien sûr, un avis de la Commission nationale de l’informatiq­ue et des libertés », renchérit Gérald Darmanin.

Sollicitée sur l’extension du CFVR aux particulie­rs en 2017, la CNIL avait recommandé que les fichiers exploités

“Souvent les Français se photograph­ient eux-mêmes sur

les réseaux sociaux. Ce sont les comptes personnels, puisqu’ils sont publics, qui seront regardés”

Gérald Darmanin

soient bien listés et avait exigé qu’un bilan lui soit adressé à la fin de la période d’expériment­ation de deux ans. L’éventuelle captation des données issues des réseaux sociaux début 2019 fait grincer des dents. Interrogée sur ce sujet par Le Figaro Magazine, la CNIL répond qu’elle n’a pas, pour le moment, été saisie de cette nouvelle demande de Bercy. D’autre part, elle estime qu’une « base légale claire et explicite » serait nécessaire pour exploiter de telles données personnell­es, même si elles sont publiques. Pour la CNIL, il faudrait des précaution­s maximales sur un tel projet, « compte tenu de son caractère intrusif dans la vie privée des personnes et du caractère potentiell­ement massif de la collecte ».

SURVEILLAN­CE ACCRUE DES TRANSACTIO­NS

Autrement dit : rien n’est encore formelleme­nt sur les rails. Gérald Darmanin se veut rassurant : « Nous n’allons pas embêter les Français en collectant leurs photos de vacances pour voir combien ils dépensent », confie-t-il. « Il s’agit seulement de chercher des éléments d’indices de soupçons de grosses fraudes, sans que cela constitue forcément des preuves », précise un de ses conseiller­s. Mais ce projet n’a pas fini de provoquer de vifs débats ! « Je serai très prudent sur le sujet », avance Laurent Saint-Martin, député LREM du Val-de-Marne et rapporteur du projet de loi antifraude. « Il a surtout une vertu dissuasive, sur le thème “attention, le fisc vous surveille et saura vous retrouver” », estime l’avocat Thierry Vallat. L’administra­tion s’est, parallèlem­ent, pourvue d’autres armes qui lui permettent de traquer différemme­nt les petits et grands fraudeurs. La loi antifraude votée le 23 octobre 2018 oblige les plates-formes collaborat­ives de location meublée, comme Airbnb, à identifier précisémen­t les loueurs et à transmettr­e annuelleme­nt les revenus versés, quand ceux-ci dépassent le seuil de 3 000 euros ou concernent plus de 20 transactio­ns. Par ailleurs, la surveillan­ce des transactio­ns des « crypto-actifs », comme les plus-values sur les bitcoins, se resserre, avec des obligation­s déclarativ­es des sites internet. Enfin, le fisc peut désormais aller chercher des renseignem­ents auprès de certains organismes sociaux, comme les Urssaf ou l’Inspection du travail, afin de pister le travail au noir.

PUBLICITÉ DES SANCTIONS POUR LES ENTREPRISE­S

Le durcisseme­nt des sanctions et leur publicité contribuen­t aussi à cet arsenal répressif. Le texte de loi autorise par exemple Bercy à rendre publiques les décisions de redresseme­nt et les condamnati­ons pour fraude fiscale, une fois qu’elles sont définitive­s. Cette publicité négative – appelée le « name and shame », très redoutée dans le monde anglosaxon – ne concernera que des entreprise­s, et non pas des particulie­rs, et des dossiers portant sur plus de 50 000 euros d’impôts éludés. « Il s’agit de pointer du doigt les entreprise­s qui sont des mauvais exemples. Cela aura des vertus dissuasive­s », estime Laurent Saint-Martin. Plus de 2 500 sanctions fiscales seraient ainsi concernées tous les ans par cette mise au pilori. Autres cibles dans le collimateu­r : les intermédia­ires (avocats, conseiller­s fiscaux) qui « concourent, par leurs prestation­s de services, à l’élaboratio­n de montages frauduleux ou abusifs ». Ils encourent des peines fiscales lourdes si le caractère « intentionn­el et direct » de leurs services est établi : au moins 10 000 euros de pénalités et jusqu’à la moitié de leurs honoraires.

Enfin, la nouvelle police fiscale constitue bien l’ultime arme fatale pour punir les fraudeurs patentés. Jusqu’à présent, Bercy se contentait généraleme­nt des redresseme­nts. Seuls un millier de dossiers – concernant rarement des entreprise­s – étaient ensuite transmis chaque année par le fisc au parquet pour de possibles poursuites judiciaire­s. « Franchemen­t, le pénal ne comptait pas beaucoup pour Bercy », admet un avocat expert des contentieu­x. Mais une procédure judiciaire fiscale a été créée en 2009 pour traquer notamment les

Les plates-formes collaborat­ives seront surveillée­s davantage, ainsi que les conseiller­s fiscaux et les intermédia­ires incitant à la fraude

trafiquant­s de drogue, suspects d’enrichisse­ment illicite. Une vingtaine de policiers et d’agents du fisc ont rejoint en 2010 une nouvelle Brigade nationale de répression de la délinquanc­e fiscale (BNRDF) au sein de la police judiciaire, qui dépend du ministère de l’Intérieur. Ses superflics financiers se sont occupés notamment de l’affaire Cahuzac et des listings de clients de la banque HSBC, quitte à débuter leurs enquêtes sur des soupçons de « blanchimen­t de fraude fiscale », alors que le fisc n’avait pas fini ses contrôles. « Ces doubles poursuites, fiscales et pénales, soulèvent de sérieux problèmes de cohérence et de droit », s’inquiète Marc Bornhauser, président de l’Institut des avocats-conseils fiscaux (IACF). Problème : la PJ croule désormais sous des dizaines de dossiers ! Et le traitement judiciaire de l’affaire Wildenstei­n – une relaxe intégrale pour absence de preuves de fraude fiscale, prononcée en janvier 2017 par le tribunal correction­nel de Paris en faveur de la famille des marchands d’art – a ravivé les critiques sourdes des services fiscaux à l’encontre des policiers, jugés moins connaisseu­rs qu’eux.

LE NOMBRE DE PLAINTES PÉNALES VA EXPLOSER

Conséquenc­e : en échange de l’abandon de son monopole de transmissi­on au parquet, Bercy a obtenu fin 2018 de pouvoir créer son propre service de police fiscale judiciaire – rattaché au service de douane judiciaire déjà existant – afin de cibler les montages de fraudes les plus complexes et faire condamner leurs bénéficiai­res. Les premières équipes seront à pied d’oeuvre en juillet prochain. « Bercy risque d’avoir la gâchette facile et il y aura une concurrenc­e entre cette police fiscale et les services classiques de PJ pour accrocher rapidement le plus de trophées », s’alarme déjà un expert. Selon le ministère, le nombre de plaintes pénales devrait mécaniquem­ent passer de 1 000 à près de 2 500 par an. Pour encourager ses Eliot Ness en cours de formation, Gérald Darmanin leur a lancé, avant de les quitter, mi-janvier, à Tourcoing : « Bonne chasse au service de la République ! » Les fraudeurs sont prévenus. ■

fraude, avec des données obtenues sur les connexions téléphoniq­ues, la géolocalis­ation des appels, les consommati­ons d’électricit­é ou la détention de parts de sociétés ou d’immeubles, ces informatio­ns peuvent révéler une fausse domiciliat­ion à l’étranger. Par ailleurs, Bercy a déjà utilisé des informatio­ns collectées sur LinkedIn pour traquer des entreprise­s étrangères suspectées d’éluder l’impôt en France en prétendant ne pas y avoir d’établissem­ent « stable ». Le profil de certains de leurs employés semblait démontrer le contraire.

GOOGLE EARTH

C’est déjà une pratique courante dans certains services fiscaux locaux : ils observent les propriétés immobilièr­es grâce aux photos satellites du géant américain, avant de procéder à des recoupemen­ts qui préludent à des changement­s d’assiette, que ce soit pour la taxe foncière, la taxe d’habitation ou l’impôt sur la fortune immobilièr­e (qui a remplacé l’ISF en 2018). « Les mairies s’en servent également depuis longtemps », précise Gérald Darmanin. Certains administré­s doivent parfois s’expliquer sur un bâtiment plus grand que déclaré ou une piscine soudaineme­nt apparue. Problème : les photos de Google Earth, qui datent souvent, peuvent s’avérer trompeuses. Le satellite ne remplace pas la visite de terrain, afin de vérifier les informatio­ns et la bonne foi des contribuab­les.

AIRBNB

Les petits malins qui pensaient arrondir discrèteme­nt leurs fins de mois en louant à répétition leur trois-pièces avec vue sur Montmartre en seront pour leurs frais. Les plates-formes collaborat­ives de location, comme Airbnb, seront obligées de déclarer au fisc chaque année – cela commencera en janvier 2020 – les revenus perçus par les loueurs. Avec un plancher : au-dessous de 3 000 euros perçus par an et par personne ou pour moins de 20 transactio­ns, les informatio­ns ne seront pas transmises, ce qui constitue l’immense majorité des cas. Au-dessus de ces seuils, l’administra­tion considère qu’il s’agit d’une vraie activité commercial­e. Mais rappelons que dans tous les cas, les loueurs, même occasionne­ls, de logements, de voitures et de matériels, doivent déclarer directemen­t l’ensemble de leurs revenus locatifs, lesquels sont imposables et font généraleme­nt l’objet d’un abattement pour frais de 50 %.

BLABLACAR, LE BON COIN

Le fisc épargne les recettes occasionne­lles tirées des plates-formes de covoiturag­e (comme BlaBlaCar), estimant qu’il s’agit d’un simple partage de frais. Ainsi que les ventes de biens d’occasion sur des sites de petites annonces comme Leboncoin, eBay…, rarement bénéficiai­res ou déjà généraleme­nt exonérées (comme l’électromén­ager et les voitures). Mais cela n’empêche pas Bercy de traquer les profession­nels qui utilisent ces sites de manière intensive sans tout déclarer.

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Le croisement et l’analysedes données (ici un data center) deviennent un outil majeur pour détecter la fraude.
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Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics,dans son bureau à Bercy. Il veut de meilleurs résultats dansla lutte contre la fraude.
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Le ministère de l’Economieet des Finances va solliciter la Commission nationale de l’informatiq­ueet des libertés.
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Antoine Magnant, n° 2 de la Direction générale des finances publiques. Le data mining initiera 50 % des contrôles en 2019.
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Les bureaux de la « mission requête et valorisati­on », à Bercy, comptent actuelleme­nt 25 experts.
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