LES RENDEZ-VOUS
Le président de la Fondation nationale des sciences politiques a accompli son rêve : une oeuvre de fiction où coexisteraient liberté du romancier et rigueur de l’universitaire.
Olivier Duhamel a longtemps attendu. Cet universitaire renommé, auteur d’une trentaine d’ouvrages de droit constitutionnel, de science politique ou d’histoire des idées, rôdait depuis longtemps autour du roman. On peut ne jamais parvenir à franchir ce Rubicon intérieur qu’est celui de la fiction. A plus forte raison lorsque l’on a été marqué par la rigueur d’études de droit public. L’Université s’est toujours méfiée du roman parce qu’il est en mesure d’envoyer valser toutes les certitudes et conventions édifiées au cours des siècles par les sciences humaines ou sociales. Olivier Duhamel a su vaincre ses inhibitions d’universitaire. Il faut s’en réjouir.
Sa première oeuvre de fiction relate la vie mouvementée, et donc très romanesque, de ses parents, Jacques Duhamel, brillant homme politique des IVe et Ve Républiques, et son épouse Colette, longtemps éditrice auprès de Claude Gallimard. Mari et
COLETTE ET JACQUES, d’Olivier Duhamel, Plon, 270 p., 18,90 €. femme restèrent liés jusqu’à leur mort par une histoire d’amour où furent autorisées bien des libertés.
« On ne chante bien que dans son arbre », disait Cocteau. Par arbre, il entendait généalogique, bien sûr. Olivier Duhamel a suivi ce conseil, et c’est sans doute la raison pour laquelle son roman est si abouti. On y trouve une description de la bourgeoisie intellectuelle française d’après-guerre, plus préoccupée d’idées généreuses que de vérités concrètes. A la manière de Camille Pascal avec L’Eté des quatre rois, Olivier Duhamel a développé son récit dans les interstices de la grande histoire. « J’ai découvert ainsi, dit-il,
combien la fiction est une merveilleuse aventure de liberté. » On sait que la querelle entre l’histoire et le roman, aussi ancienne que l’existence de la Sorbonne, a été gagnée par Alexandre Dumas, pour qui « il est permis de violer l’histoire à condition de lui faire de beaux enfants. » En d’autres termes, le romancier a tous les droits… pourvu qu’il réussisse.
La phrase du livre à retenir (p. 112) “L’amour ne s’apprend pas ; le désamour, si.
J’y arriverai”