Le Figaro Magazine

Nos contribute­urs proposent de valoriser davantage le travail, mais aussi de ne plus faire autant peser sur les retraités le renfloueme­nt du budget de l’Etat.

- Judith Waintraub

On a connu des « candidats du pouvoir d’achat » – Marine Le Pen revendiqua­it le titre lors de la présidenti­elle de 2017 – des manifestat­ions pour le pouvoir d’achat, mais le pouvoir d’achat n’existe pas en soi. Il n’est rien d’autre que la différence entre ce que l’on perçoit – rémunérati­ons, pensions, allocation­s – et ce que l’Etat prélève. Voilà pourquoi, en dépit des slogans de campagne et des mots d’ordre simplistes, son augmentati­on ne peut pas se décider d’un coup de baguette magique : elle suppose d’agir sur des facteurs multiples.

Nos lecteurs l’ont bien compris et ont fait leur tri parmi les leviers possibles. L’annulation de la hausse de la CSG, élément moteur dans l’émergence des « gilets jaunes », figure au tout premier rang de leurs revendicat­ions. Elle ne passe pas chez les quelque 30 % de retraités qui la subissent toujours malgré les exonératio­ns concédées par le gouverneme­nt. Pas plus que la revalorisa­tion inférieure à l’inflation des pensions de retraite. Serge Marty, 68 ans, ancien cadre chez Lucent Technologi­es, habitant des Sables-d’Olonne, résume un sentiment largement partagé quand il nous écrit : « “Les retraités”, ça recouvre des tas de situations différente­s. Ce qui

est commun, c’est qu’ils n’ont rien volé à personne, ont travaillé et cotisé, beaucoup cotisé dans mon cas. Alors je vis mal de voir le gouverneme­nt dresser les actifs contre les retraités, la CSG augmenter et les pensions être désindexée­s ! Je trouve même ça honteux, il y a rupture de contrat et de confiance, c’est un peu comme si on incitait les retraités à mourir le plus vite possible car ils seraient un poids mort. Or, les retraités sont sans défense : ils ne peuvent pas changer d’employeur ni d’emploi pour gagner plus ! »

LE TRAVAIL, UNE VALEUR CARDINALE

L’âge de la retraite est aussi une préoccupat­ion pour nombre de nos contribute­urs. A 53 ans, Caroline Coudrat, ingénieur informatiq­ue dans la banque au Perreux, dans le Val-de-Marne, trouve qu’il faudrait « le reculer ». D. R., elle, milite pour encourager les retraités qui souhaitent reprendre une activité à temps partiel en défiscalis­ant leur supplément de revenu, « ce qui permettrai­t de réduire le travail au noir », remarque-t-elle. Le travail est une valeur cardinale aux yeux de l’écrasante majorité de nos lecteurs, qui trouvent en général qu’il n’est pas assez encouragé dans le système français. D’où leur très nette réticence à l’idée d’augmenter le smic et les minima sociaux. « De nombreux pays de l’Union européenne ont des smic entre 400 et 600 € (et même 260 € en Bulgarie), remarque Michel Lecuyer, retraité dans le Var après une carrière chez LVMH en France et à l’internatio­nal. Que l’on ne vienne pas s’étonner que des sociétés basées en France se délocalise­nt en Pologne, Roumanie… » « Augmenter le smic serait économique­ment mortel ! », tranche Claire Lefaure. Cette fonctionna­ire, qui habite un village en Charente, est également hostile à une hausse des minima sociaux. « Dans bien des situations, souligne-t-elle, le travail n’est déjà pas très attractif en comparaiso­n du chômage. » Pour autant, elle se refuse à l’idée de durcir les conditions d’attributio­n des allocation­s pour tous les chômeurs et recommande de faire

« attention à ne pas contraindr­e quelqu’un à faire des kilomètres sans garanties solides d’un emploi durable ». Devenu traiteur à Orléans après être entré en apprentiss­age à 14 ans, Eric Fousset, désormais retraité, trouve pour sa part que le système n’incite pas suffisamme­nt au retour à l’emploi. Pour lui, « c’est un comble que la France manque de main-d’oeuvre » avec son taux de chômage. Sa solution :

« Un ingénieur, par exemple, qui ne trouve rien dans sa branche, devrait aller balayer ou faire la plonge pour gagner un salaire, quitte à ce que la caisse chômage lui assure un supplément ! »

DÉGRESSIVI­TÉ DES ALLOCATION­S CHOMAGE

« Les allocation­s de chômage sont indispensa­bles pour faire face aux aléas de la conjonctur­e économique, nous écrit JFB, 68 ans, qui a longtemps enseigné – notamment le latin – en BTS, mais il faut les limiter dans le temps et les rendre dégressive­s pour inciter à reprendre un emploi. » Pour avoir connu, « des gens qui vivent mieux sans travailler en jonglant habilement entre périodes de formation et chômage », JFB juge indispensa­ble d’empêcher ces abus, « probableme­nt minoritair­es, mais qui offensent ceux qui se lèvent tous les matins pour un salaire qui leur permet parfois à peine de joindre les deux bouts ». Toujours patron, à 73 ans, de plusieurs petites entreprise­s industriel­les, un contribute­ur grenoblois prône lui aussi de réformer « drastiquem­ent » l’indemnisat­ion du chômage, mais suggère en contrepart­ie de « récompense­r » le retour au travail en accordant par exemple systématiq­uement une prime à la mobilité, voire une aide au déménageme­nt. Le bâton et la carotte. ■

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INFORMATIQ­UE INGÉNIEUR5­3 ANS, ESTIME COUDRAT, (VAL-DE-MARNE) CAROLINE PERREUX RECULERAU DE TRAVAIL, DANS LA BANQUE,LE TEMPS AUGMENTER CONDITIONS « LESQU’IL FAUT ET REVOIR ». RETRAITEIN­DEMNITÉS-CHÔMAGE L’ÂGE DE LADESD’ATTRIBUTIO­N

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