RETOUR EN ALGÉRIE

UN PAQUEBOT POUR ORAN, de Guillaume de Dieuleveult, La Librairie Vuibert, 249 p., 19,90 €.

Des années durant, Guillaume de Dieuleveult a été grand reporter. Il connaît mieux la planète que le commun des mortels. Pour son premier récit, il aurait pu choisir une contrée lointaine et méconnue qu’il aurait arpentée dans des conditions extrêmes. Au lieu de quoi, il a décidé de raconter quelques jours en Algérie. Une cinquantaine d’heures sur un paquebot ralliant Marseille à Oran où il séjourne et rencontre la famille d’un vieil ami, puis le train jusqu’à Alger, qu’il arpente goulûment. En un sens, l’Algérie est devenue un pays aussi mystérieux et exotique que le Bhoutan : plus personne, et certainement aucun Français, ne souhaite mettre les pieds dans cette nation qui a toujours raté son rendez-vous avec le tourisme depuis son indépendance (il faut dire que certains visiteurs y ont laissé leur tête). L’histoire est sans doute trop compliquée entre ces deux peuples. L’Histoire, justement… Elle occupe une bonne moitié de ce récit composé d’autre part de sensations vécues. L’auteur maîtrise son sujet : d’abord l’histoire de la Méditerranée – cette mythique Mare nostrum –, celle des invasions et des conquêtes arabes et espagnoles, puis la prise d’Alger par les Français, la colonisation et les « événements » de 1962. Dieuleveult aime Oran, ville tournant le dos à la mer, que méprisait Camus. Il adore Alger, puis part sur les traces d’Albert à Tipaza où il découvre des milliers de sacs en plastique couvrant les rochers : « Je savais pourtant depuis longtemps que voyager, c’est surtout découvrir d’autres

formes de laideur », explique-t-il. Il trouvera néanmoins sur place suffisamment de beauté pour en repartir les yeux pleins de rêves.