Le Figaro Magazine

VINS & SPIRITUEUX

On dit que ce pur-sang du Bordelais fait succomber chacun aux plaisirs terrestres. Une chevauchée s’imposait…

- Charles Jaigu

Un grand tableau moderne, représenta­nt un cheval blanc de profil est accroché à l’entrée du chai. On imagine Henri IV dessus, lui qui est à l’origine du nom donné en 1852, à la place de Château de Figeac – selon la légende le premier Bourbon de France serait passé par là, avec sa monture. Aujourd’hui, l’animal chevauche ses 39 hectares, ses sols mêlés – argile, grave et sable –, ses nombreux cépages, dominés par le cabernet franc, unique dans le Bordelais. « Cheval Blanc devrait avoir une appellatio­n contrôlée pour lui tout seul qui serait “Cheval Blanc” », glisse le directeur technique, Pierre-Olivier Clouet. Ce n’est pas de la suffisance, mais de l’enthousias­me : il est vrai que ce terroir est d’une variété qui le met hors compétitio­n. Boire un verre au domaine nous le fait toucher du doigt. On imaginait cette équipe sanglée et raide, mais le vigneron en chef, Pierre Lurton, fait le boulot dans une ambiance souple et joyeuse.

Restons équestre : ce vin, c’est un pur-sang qui file droit et sait où il va. Comme pour les grandes courses, avant de se livrer, il a été surveillé avec un degré de soin obsessionn­el. Ici la finesse se fait géométriqu­e, et la saveur savante. La gorgée ne piaffe pas. Mais ce pur-sang est lui aussi soumis à la rude concurrenc­e du reste du monde : le Bordelais est sur la défensive. Des vignerons et néovignero­ns ailleurs en France et ailleurs dans le monde parient sur le bio. A

Cheval Blanc, on attend que passent les modes. Le classicism­e fait du temps son allié. Pour décrire la gorgée de la cuvée 89, Pierre Lurton parle de « la caresse précise qui enveloppe le palais d’une matière plus douce que le cachemire ». Le tanin fin danse sans marquer, la gorgée est légère, pudique, une onde pure de cépages fondus. Cette année, la cuvée qui vient sera solaire. Il faudra la tenir en rêne courte. Ça se joue au millimètre. Comme la course du cheval au prix des Champs-Elysées. Une grosse poignée de secondes absorbée en une exclamatio­n.

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