SISSI, FEMME D’AUJOURD’HUI
Loin des chromos, un documentaire et le film de Visconti.
Selon Morand, elle se trompe de siècle comme on se trompe de porte : reine pour démocrates, elle remplace le dais du trône par une tente de camping. Si elle vivait aujourd’hui, d’après son arrière-petit-fils, Leopold Altenburg, elle défilerait le lundi pour la Fashion Week à Milan, le mardi à Madrid pour l’indépendance de la Catalogne, publierait entre-temps un recueil de poésies qui ferait un bide, ce qui n’aurait aucune importance puisqu’elle remporterait le concours hippique de Vienne le vendredi. Un documentaire débarrasse Sissi de l’eau de rose et des niaiseries sentimentales de la trilogie tournée avec Romy Schneider par Ernst Marischka dans les années 1950, et que la télévision propose inlassablement aux amateurs de guimauve. La réalité est plus intéressante. Invitée à représenter l’Empire aux côtés de son époux et à produire des héritiers, l’impératrice se lasse vite des commérages de la Cour et mène une vie rêveuse, fuyante, narcissique et malheureuse. Mariée à 16 ans, mère à 17, immature, mal préparée, meurtrie, intrépide, méfiante, mélancolique, anorexique, elle quitte Vienne dès qu’elle le peut pour mener une existence vagabonde, fuyant un monde qui s’écroule. Le film de Stefan Ludwig fait le portrait d’une femme touchante et singulière, facile à aimer, difficile à vivre. Documentaire qui permet de mieux goûter, dans sa version originale, le film de Visconti consacré à Louis II de Bavière, qui ne fut pas plus heureux que sa cousine.
Arte, samedi 14 décembre, 20 h 50 : Sissi, la douleur et la liberté, de Stefan Ludwig. Dimanche 15 décembre, 20 h 55 : Ludwig. Le Crépuscule des dieux, de Luchino Visconti.