Le Figaro Magazine

MICHOU : ÇA, C’ÉTAIT PARIS !

- LES VARIATIONS DE FRANÇOIS DELÉTRAZ

De quelques mètres carrés au rez-de-chaussée d’un immeuble bourgeois de la rue des Martyrs, à Paris, Michou avait fait un lieu mondialeme­nt connu. Un cabaret comme ceux dont Montmartre regorgeait à une époque, et qui fermèrent les uns après les autres. Aujourd’hui, seuls subsistent le Moulin-Rouge, Madame Arthur et La Nouvelle Ève.

Si Michou s’était installé là au milieu des années 1950, ce n’est donc pas un hasard. Montmartre était le quartier où tout le monde sortait, où les lieux gay avoisinaie­nt les bars à filles et les lounges plus sélects. C’était le brassage des genres, le brassage social. Aller chez Michou, sur la butte Montmartre, était toute une expérience. Dans cette salle de seulement 80 places dotée d’une scène grande comme un mouchoir de poche, ses « Michettes » enchaînaie­nt les rôles, se payaient gentiment la tête des célébrités du moment, avec un humour faisant rire aux larmes le public. Son spectacle avait vite fait l’unanimité. Bien avant la mode des drag-queens, Michou avait su popularise­r à Paris le genre transformi­ste qui faisait fureur à Berlin avant la montée du nazisme. Au fil du temps, Michou était devenu une figure de Montmartre. On pouvait l’apercevoir tous les jours à La Mascotte, une brasserie toute proche, une coupe de champagne à la main, vêtu de son éternel costume bleu. Toujours jovial, il accueillai­t volontiers autour du petit bar du cabaret les artistes du quartier et des journalist­es comme votre serviteur. L’ambiance était débonnaire, sans prétention. Figure aussi de la vie gay parisienne, il osait affirmer qu’il avait eu « la chance d’être homosexuel ».

Il y a deux ans, il avait publié sa biographie, Michou, prince bleu de Montmartre (au Cherche Midi).

On y retrouvait le petit Michou, jeune homo provincial qui, à 18 ans, montait à Paris, bien avant ses célèbres lunettes bleues et son costume flashy. À 25 ans, il allait reprendre le bar de nuit chez Madame Untel dont il ferait son cabaret. Celui-là même où l’on s’est pressés pendant soixante ans.

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