Le Figaro Magazine

VENT D’HISTOIRE SUR LE 7e ART

Plusieurs fictions historique­s, parfois très ambitieuse­s, sont à l’affiche jusqu’en mars. Et le cinéma français n’est pas en reste…

- Jean-Christophe Buisson

Culture

Et si le fabuleux 1917 de Sam Mendes était un arbre cachant une forêt ? Et si le genre du film historique, souvent méprisé en France au motif qu’il serait trop « classique », « dépassé », « compassé », voire « nostalgiqu­e », retrouvait ses lettres de noblesse ? Après un automne marqué par deux réussites formelles (J’accuse, de Roman Polanski et Une vie cachée, de Terrence Malick), l’hiver se révèle riche : plus d’une dizaine de longs-métrages dans les prochaines semaines font la part belle à Clio. Avec une bonne surprise : à rebours des films à thèse pesants et manichéens des décennies passées, scénariste­s et metteurs en scène ont compris que raconter l’Histoire impliquait de la montrer sans anachronis­me, sans a priori idéologiqu­e, sans morale contempora­ine. Comme dans Qu’un sang impur…, d’Abdel Raouf Dafri, qui donne à voir le FLN sous un jour terrifiant. Comme dans Lettre à Franco, où Alejandro Amenábar ne fait pas des partisans du Caudillo de simples brutes fascistes assoiffées de sang rouge. Comme dans L’Ombre de Staline, où le visage du communisme soviétique est présenté sans l’indulgence habituelle, avec un focus terrifiant sur la tuerie de masse orchestrée par le Kremlin en Ukraine dans les années 1930. Autre fait nouveau : l’envie de montrer l’Histoire sous des facettes méconnues. En racontant le conflit de 14-18 au Mozambique (Mosquito) ou, moins original, en Artois… mais via une mission de quelques heures de deux soldats messagers (1917) ; en évoquant Cuba à travers l’activité des anticastri­stes en Floride (Cuban Network) ; en s’intéressan­t à la Résistance en France sous l’Occupation par le biais du Réseau Shelburn.

Et si certains s’aventurent à peindre une figure majeure, ce sera plutôt sous l’angle des sentiments : ceux du futur fondateur de la Ve République pour sa fille handicapée (et la France !) dans De Gaulle ; ceux de Léon Blum pour sa maîtresse Jeanne Reichenbac­h (Je ne rêve que de vous) ; ceux de Marie Curie pour son mari Pierre (et la science !) dans Radioactiv­e.

Et que dire de Jojo Rabbit, dont le réalisateu­r, Taika Waititi, comme naguère Roberto Benigni avec La Vie est belle, ose traiter le nazisme sous forme de farce à une époque où l’esprit de sérieux semble avoir définitive­ment pris le dessus, y compris dans les arts ? Le passé, c’est l’avenir. ■

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Scène de tournage de « 1917 » : la guerre à hauteur d’homme.
 ??  ?? « 1917 », de Sam Mendes.
« 1917 », de Sam Mendes.
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« Une vie cachée », de Terrence Malick.
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Raouf Dafri.
« Qu’un sang impur… », d’Abdel Raouf Dafri.

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