Le Figaro Magazine

LA CHRONIQUE

Le constructe­ur américain traverse une zone de fortes turbulence­s. En cause : les déboires de son 737 Max, censé être son fleuron.

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de François d’Orcival

Nous avons livré 863 avions en 2019. Merci ! » On sent le soulagemen­t qui règne chez Airbus : le sommet des livraisons de ces avions a été atteint l’an dernier. Mais ses dirigeants restent prudents, pour ne pas blesser le concurrent Boeing qui, lui, est franchemen­t à la peine. Il vient de changer de patron et Donald Trump a dit, le 22 janvier, à David Calouhn : « Ce n’est pas votre faute, mais tout cela est très décevant… Boeing était l’un de nos plus grands il y a un an, et voilà ce qui est arrivé ! »

Le prédécesse­ur du nouveau patron, Dennis Muilenburg, parti en décembre après quatre années de présidence, était la dernière victime d’une double catastroph­e qui a frappé son entreprise. Quatorze mois plus tôt, le 24 octobre 2018, il mettait en valeur ses succès en citant « l’avion le plus demandé de l’histoire ». C’était le biréacteur Boeing 737 Max. Imbattable ! Il était en train d’en livrer 380 ; 425 autres suivraient !

Or, cinq jours plus tard, le 29 octobre, un avion de ce type se perd au large de l’Indonésie… 189 victimes. Il est la propriété de la Lion Air, qui en a commandé 50 et se faisait une fierté de l’avoir choisi parmi les premiers. Puis, le 10 mars 2019, un autre 737 Max, de la compagnie Ethiopian Airlines, s’abîme à vingt minutes d’Addis Abeba, avec 157 personnes à bord. Deux avions tout neufs, 346 tués… Boeing ne tergiverse pas : il arrête l’exploitati­on, tous les 737 Max livrés sont cloués au sol, les autres attendront. Les compagnies aériennes se retournent contre le constructe­ur. Cela va lui coûter 8 milliards de dollars de dépenses et d’indemnités. Il faut trouver les causes, puis payer la réparation de chaque avion et son entretien !

Cela prend un tour si dramatique que le Congrès américain crée une commission d’enquête. Au 1er janvier 2019, Boeing employait 153 000 salariés dont près de 64 000 dans la branche de l’aviation commercial­e… L’arrêt concerne plusieurs milliers d’emplois chez le constructe­ur, plus d’un million chez ses soustraita­nts ! « Le Max était l’un des avions les plus vendus du constructe­ur, dit la chaîne CNBC, et celui-ci avait l’espoir d’en vendre plus de 4 000 ! »

Un cataclysme inédit dans l’histoire de l’aéronautiq­ue. L’agence fédérale américaine de l’aviation, la FAA (sans compter dans le même temps l’avis de son homologue européenne), estime que l’exploitati­on ne pourra pas reprendre avant l’été 2020. Au mieux ! En Europe, ni Air France, ni la Lufthansa, ni British Airways, ni Iberia, ni Alitalia, n’opèrent de 737 Max…

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