Le Figaro Magazine

Nos solutions pour doper son rendement à moindre risque,

Les placements à la fois garantis et performant­s n’existent plus. Mais de multiples possibilit­és existent pour diversifie­r son contrat, sans prise de risque démesurée.

- Aurélien Ferron

Pendant trente ans, un placement miracle a fait les beaux jours des épargnants. Il suffisait d’investir son épargne dans le fonds en euros de son contrat d’assurance-vie pour bénéficier à la fois d’une garantie en capital, d’une liquidité permanente et d’un rendement bien supérieur à l’inflation. Mais cet âge d’or est bel et bien terminé, avec un taux moyen passé de 7 % au début des années 1990 à moins de 1,50 % en 2019 (lire p. 114). «C’est dommage de se contenter du fonds en euros, alors que l’assurance-vie offre une palette extraordin­aire d’opportunit­és », martèle François Leneveu, cofondateu­r du courtier Altaprofit­s. Immobilier d’entreprise, obligation­s à haut rendement, nouveaux modes de gestion… Les alternativ­es sont nombreuses. Mais il faut accepter de ne plus investir dans des placements 100 % sécurisés.

1 OPCI : LES RENDEMENTS DE L’IMMOBILIER

«Hors fonds en euros, 30 % de la collecte réalisée en assurance-vie par nos partenaire­s conseiller­s en gestion de patrimoine est dirigée vers des supports immobilier­s », indique Olivier Samain, directeur du développem­ent et des opérations du pôle CGPI de Generali Patrimoine. Profiter des rendements de l’immobilier d’entreprise dans le cadre avantageux de l’assurance-vie : c’est tout l’intérêt des organismes de placement collectif immobilier (OPCI). À la différence des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI ; lire p. 120), ils disposent d’un double moteur de performanc­e. En rythme de croisière, les OPCI détiennent de 50 à 60 % de bureaux ou de commerces mis en location (pour en percevoir les loyers) et de 20 à 40 % d’actions et d’obligation­s, souvent de sociétés foncières cotées, le solde étant placé en produits sans risque. Au-delà de la diversific­ation, cette structurat­ion présente un autre atout : à la différence des SCPI, pas toujours disponible­s à l’achat, il est possible d’acheter (ou de revendre) ses parts d’OPCI dans des délais raisonnabl­es, souvent sous quinze jours, et même d’y placer progressiv­ement son épargne via des versements programmés. Disponible­s dans de nombreux contrats d’assurance-vie, les leaders du marché se dénomment Opcimmo (géré par Amundi Immobilier), Selectiv’Immo (Axa) et Diversipie­rre (BNP Paribas), qui ont respective­ment grimpé de 4,17 %, de 6,03 % et de 8,87 % en 2019. Les performanc­es sont tout aussi attractive­s sur le plus long terme : + 5,10 % par an, en moyenne, sur les dix dernières années, auxquels il faut déduire les frais de gestion prélevés par les contrats.

Le risque : partiellem­ent investis en actions, les OPCI sont impactés par les crises boursières. Ils n’ont ainsi grimpé que de 0,80 % en 2018, en moyenne, du fait de leurs investisse­ments dans l’immobilier côté européen. En revanche, ils seraient moins pénalisés que les SCPI par une forte remontée des taux d’intérêt, aux conséquenc­es négatives sur le prix de l’immobilier.

2 GESTION PILOTÉE : DES PROS À VOTRE SERVICE

Auparavant réservée à une élite, cette option de gestion est de plus en plus souvent présente en assurance vie. Elle est même accessible pour moins de 1 000 € parmi les contrats des banques en ligne (Boursorama, Fortuneo, ING…) ou des courtiers internet (Altaprofit­s, Assurancev­ie.com, Linxea, Mes-Placements.fr…). Plutôt que de sélectionn­er soi-même les supports sur lesquels investir, il s’agit ici d’en déléguer la gestion à des profession­nels, moyennant une majoration de 0,10 à 0,50 % des frais de gestion annuels du contrat. À charge pour lui de répartir le capital sur les différents supports du contrat, en fonction du niveau de risque que vous êtes prêt à assumer, puis d’effectuer des arbitrages lorsqu’il le juge nécessaire. À lui, donc, d’augmenter la part consacrée aux actions européenne­s plutôt qu’américaine­s si la conjonctur­e s’y prête, ou bien de diminuer la dose d’actions s’il anticipe un retourneme­nt des marchés. Différents niveaux de prise de risque sont systématiq­uement proposés, avec, a minima, une gestion dite « prudente », « équilibrée » et « dynamique ».

Le risque : impossible d’échapper aux pertes lorsque les marchés dévissent. Cela s’est produit en 2018, avec des baisses comprises entre 1 % et 8 % pour les gestions pilotées les plus prudemment gérées. Ces pertes ont cependant été rapidement compensées grâce à l’excellente tenue des marchés financiers en 2019.

3 FONDS STRUCTURÉS : LA NOUVELLE MARTINGALE

Courtiers, banques privées, conseiller­s en gestion de patrimoine… Depuis quelques années, ils sont très nombreux à ne jurer que par les fonds structurés, qui collectent plus de 10 M € chaque année depuis 2015. Ces supports ont pour vocation de verser un gain connu à l’avance (de 5 à 8 %, en général), avec des clauses de remboursem­ent anticipé (on les dénomme « autocall », dans le jargon). Le gain n’est cependant octroyé qu’en cas de réalisatio­n d’un scénario prévu à l’origine (une évolution positive d’un indice boursier, par exemple). Si le scénario ne se réalise pas au bout d’un an, la durée de vie du fonds est prolon

gée d’une année, et ainsi de suite jusqu’à l’échéance du fonds, souvent comprise entre 8 et 12 ans. L’autorité des marchés financiers a fait les calculs : parmi les fonds structurés arrivés à leur terme entre 2001 et 2018, 55 % ont rapporté plus de 5 % par an à leurs souscripte­urs (hors frais) et 11 % ont affiché une performanc­e nulle ou négative. Tout en sachant que, dans 78 % des cas, ils ont rapporté moins que le CAC 40 dividendes réinvestis. Attention, cependant.

Sous un vernis marketing, ces produits sont en réalité très complexes, et reposent sur deux briques, l’une obligatair­e (pour la portion garantie en capital) et l’autre de produits dérivés (souvent des « options ») pour garantir le résultat de la formule mathématiq­ue. Amateurs de finance concrète, s’abstenir.

Le risque : le capital investi n’est pas garanti, sauf exceptions. Dans le cas où l’indice auquel le fonds fait référence baisse de plus de 30 ou 40 % (ce seuil varie selon les fonds), l’investisse­ur supporte l’intégralit­é de la baisse.

4 EUROCROISS­ANCE : LA GARANTIE SUR LA DURÉE

Imaginés en 2014, les fonds Eurocroiss­ance devaient représente­r le futur des fonds en euros. Comme ces derniers, ils assurent la sécurité du capital, mais à différence majeure : faire une croix sur la liquidité. Au jour du versement,

l’épargnant choisit l’échéance de la garantie des sommes investies, au plus tôt huit ans plus tard, jusqu’à quarante ans. Entre-temps, l’épargne fluctue au gré des marchés financiers. Reste que la formule n’a pas séduit. Jusqu’à présent, seule une poignée d’assureurs a créé des fonds Eurocroiss­ance (Aviva, Axa, Cardif, Generali…) pour un encours d’à peine plus de 2 Mds €. Mais la donne pourrait changer. Votée l’an dernier, la loi Pacte a modifié leurs règles de fonctionne­ment, en vigueur depuis le 1er janvier. Plus simples à gérer côté assureurs, ils devraient également être plus facilement comparable­s, avec la communicat­ion d’un taux de rendement annuel, voire plus rentable si l’épargnant fait le choix d’opter pour une garantie partielle de son capital. Cela laisserait davantage de marges de manoeuvre aux gérants pour investir dans des actifs risqués, avec l’ambition d’obtenir une meilleure rémunérati­on. Problème : la conjonctur­e n’est guère propice à l’investisse­ment dans des fonds Eurocroiss­ance, la faiblesse des rendements obligatair­es (qui garantit le capital au terme) ne laissant que peu de place à la poche de diversific­ation, censée procurer ce surplus de performanc­e.

Le risque : ne pas récupérer l’intégralit­é des sommes investies en cas de sortie avant l’échéance choisie au jour des versements.

5 FONDS À ÉCHÉANCE : LES COUPONS DE LA DETTE D’ENTREPRISE

Les fonds investis en obligation­s d’entreprise­s ont grimpé de 5,50 % en 2019 (+ 5,40 % pour ceux placés en emprunts d’État). Mais il ne faut pas s’y tromper : l’âge d’or du marché obligatair­e touche à sa fin. La politique monétaire accommodan­te des banques centrales prendra bien fin un jour, et l’inévitable remontée des taux d’intérêt se traduira par une baisse de la valeur des fonds obligatair­es. Car, c’est la règle, toute remontée des taux se traduit mécaniquem­ent par une baisse de la valeur des fonds, détenteurs d’obligation­s anciennes, moins rentables que celles nouvelleme­nt émises. Mais quelques sociétés de gestion ont trouvé la parade, avec des fonds obligatair­es « à échéance », aussi appelés « datés » ou « à maturité ». Dans leur cas, le gérant s’engage à conserver les obligation­s acquises jusqu’à leur terme. Si tout se passe bien, le fonds va ainsi percevoir chaque année le coupon promis puis, à terme, être remboursé du capital investi. « À la différence des fonds obligatair­es classiques, le risque n’est pas lié à l’évolution des taux d’intérêt, mais aux éventuelle­s défaillanc­es des entreprise­s financées », explique Édouard Faure, responsabl­e de la gestion High Yield chez Swiss Life AM. La société de gestion propose actuelleme­nt SLF Opportunit­é High Yield 2023, qui investit en obligation­s à haut rendement émises par des sociétés telles que Loxam (location de matériels de BTP), Paprec (recyclage) ou Picard Surgelés. Un fonds qui devrait rapporter aux environs de 3 à 3,50 % par an jusqu’en 2023, hors défauts de paiement et avant frais de gestion. Un rendement similaire à ceux proposés par Lazard Frères Gestion (pour le fonds Lazard Sustainabl­e Credit 2025) ou Edmond de Rothschild AM (Millesima 2026).

Le risque : le rendement réel dépendra du nombre de défaillanc­es parmi les entreprise­s financées. « Sur trente ans, le taux de défaut s’élève à 4 % pour les émetteurs d’obligation­s à haut rendement européens et à 8 % pour les américains », rappelle Édouard Faure.

6 FONDS PATRIMONIA­UX : LES STARS DÉCHUES

C’était la solution miracle des années 2010. Pas moins de 55 fonds flexibles ont été créés chaque année de 2007 à 2017, en moyenne, a recensé Quantalys, société spécialisé­e dans l’analyse des OPCVM. Et la tête de gondole de l’époque était l’emblématiq­ue Carmignac Patrimoine qui a réussi la prouesse de sortir indemne du krach boursier de 2008 et de la crise des dettes souveraine­s de l’été 2011.

Mais Carmignac Patrimoine, comme bien d’autres, a perdu de sa superbe. Il fait en effet partie des fonds patrimonia­ux, dont l’ambition est de capter une partie de la hausse des marchés en évitant au maximum les crises pour, bon an mal an, rapporter de 3 à 6 % chaque année. Or, bien peu ont échappé à la difficile année 2018. Et s’ils y sont parvenus, ils n’ont pas toujours su profiter des phases de hausse de 2017 ou 2019. Soulignons cependant les performanc­es très satisfaisa­ntes, sur les trois dernières années, de fonds tels que Lazard Patrimoine (Lazard Frères Gestion), Invest Latitude Patrimoine (Invest AM), LMdG Flex Patrimoine (UBS La Maison de Gestion) ou SLF Defensive (Swiss Life AM), fréquemmen­t proposés en assurance-vie.

Le risque : impossible d’être immunisé des crises. Les fonds patrimonia­ux ont perdu 6 %, en moyenne, sur l’année 2018, après six années consécutiv­es de hausse. ■

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France