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DITES-NOUS TOUT

- PATRICK POIVRE D’ARVOR Journalist­e, écrivain Propos recueillis par Pierre de Boishue

Patrick Poivre d’Arvor

Où diable Patrick Poivre d’Arvor, grand lecteur devant l’Éternel, trouvet-il le temps d’écrire autant d’ouvrages ? « Durant la nuit et dans les transports », répond l’ancien roi du « 20 heures », qui, dans L’Ambitieux

(Grasset), brosse le portrait savoureux d’un jeune député promis à l’Élysée. Une plongée au coeur du pouvoir où les ressemblan­ces ne sont pas nécessaire­ment fortuites…

L’ambition est-elle un défaut ?

Non ! À la différence de la vanité ou de l’amour-propre.

Auriez-vous pu faire une carrière politique ?

C’est un art noble. À 20 ans, j’ai milité dans un parti. J’ai apprécié cette expérience, avant d’être déçu par les jeux de pouvoir.

Quel mandat vous aurait séduit ?

Celui de maire ! À cette époque, j’ai pensé me présenter dans ma ville natale : Reims. Il s’agit d’une belle fonction : on voit grandir les projets qu’on a initiés, on discute directemen­t avec les habitants…

Avez-vous la nostalgie des ténors de l’Assemblée ?

Quand on entendait Alexandre Sanguinett­i ou Robert-André Vivien, on était impression­nés ! Même sentiment devant les premiers discours de Giscard ou de Fabius. On a retrouvé ce côté « bon élève » chez Emmanuel Macron. Lui, il sait trancher. Pour le reste, il n’y a pas de grandes révélation­s dans le personnel politique d’aujourd’hui. Un conseil au Président ?

Écouter.

Votre avis sur la nouvelle génération de journalist­es de télévision ?

Tout le monde a un peu tendance à entrer dans un moule. Cela se voit dans le choix des sujets et dans le choix des personnali­tés qu’il faut aimer et qu’il faut détester.

Quel regard portez-vous sur le traitement de l’actualité ? Par peur du vide, on comble parfois le vide avec du vide. Je déplore que lorsqu’il tombe trois flocons, cela occupe tout l’espace.

Et sur le coronaviru­s ? Impossible de faire entendre une voix raisonnabl­e qui vous dirait, par exemple, qu’il y a près de 10 000 morts par an de la grippe normale ! Non, on est excités par l’idée de passer au stade 2, au stade 3…

Le « 20 heures » a-t-il perdu son influence ?

Je suis loin de ressentir de la rancoeur ou de la nostalgie, mais j’ai fait le choix de ne plus le regarder. En termes de chiffres, la baisse est incontesta­ble. Plus embêtant, il n’existe plus la réunion de la famille autour du JT.

Désormais, les enfants utilisent d’autres modes de réception.

Un mot sur la polémique « Polanski » ?

Elle m’attriste, parce qu’elle provoque une fracture du pays.

Vos derniers coups de coeur au cinéma ?

J’ai beaucoup aimé 1917, et je trouve que le De Gaulle de Gabriel Le Bomin est très digne.

Quelle est votre manie d’écrivain ?

J’ai écrit mes quelque 70 ouvrages au stylo.

Quels livres récents vous ont plu ?

Laissez-nous la nuit (Grasset) de Pauline Claviere et La Dictatrice

(Flammarion) de Diane Ducret.

Qui aimeriez-vous interviewe­r ?

Le pape François ! Ce sont toujours les êtres de foi qui m’ont laissé la plus forte impression : Jean-Paul II, l’abbé Pierre, soeur Emmanuelle, mère Teresa… Et puis, par curiosité, je souhaitera­is savoir ce que Donald Trump a dans la tête.

Un dîner idéal ?

Avec Rimbaud, Verlaine et Hugo.

Vos vers préférés ?

Le début d’Ophélie.

Un jugement sur notre époque ?

Très franchemen­t, elle ne m’emballe pas. Au XIXe siècle, il y avait de belles ambitions et de grandes causes.

Comment dissoudre la tristesse ?

En lisant. Des ouvrages sont de vrais propagateu­rs de bonheur.

Aurélien d’Aragon me vient immédiatem­ent à l’esprit.

Votre devise ?

Tenir, et se tenir.

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