Le Figaro Magazine

LA PÉNURIE EN PETITE COURONNE POUSSE LES ACHETEURS À CHERCHER PLUS LOIN

Le marché est particuliè­rement dynamique en Île-de-France, où les acheteurs ne trouvant plus leur bonheur à Paris élargissen­t les destinatio­ns possibles.

- Jean-Bernard Litzler

Entre un marché de l’ancien dynamique et celui de la constructi­on à la peine, les stocks de logements disponible­s peinent à satisfaire les besoins. Situation bien connue à Paris depuis des années mais qui affectait moins le reste de l’Îlede-France. C’est désormais terminé puisque la capitale est devenue si inaccessib­le que les acheteurs n’ont jamais été aussi nombreux à franchir le périphériq­ue. « La notion immobilièr­e du Grand Paris prend forme, estime Yann Jéhanno, président du réseau. Les investisse­urs s’intéressen­t au plateau de Saclay, à Colombes, à Bezons… Ces communes, comme Le Kremlin-Bicêtre ou encore Noisy-le-Grand, offrent des immeubles neufs et des maisons individuel­les. De son côté, la Seine-Saint-Denis dispose d’un vaste vivier qui gagne progressiv­ement en attractivi­té. » Même les gros budgets sont sensibles à ces arguments de prix. « En proche périphérie de Paris, les prix s’alignent quasiment sur la capitale, par contre dès que l’on s’éloigne vers Versailles ou Saint-Germain-en-Laye, les budgets sont sensibleme­nt inférieurs », note Marc Foujols, fondateur du réseau de luxe éponyme. Dans ces secteurs, il juge le marché fluide et dynamique jusqu’à 1-1,5 million d’euros, au-delà, les choses se compliquen­t.

NEUILLY, BOULOGNE, LEVALLOIS le XXIe arrondisse­ment

Plus que jamais, le trio de communes huppées de l’Ouest parisien apparaît comme un prolongeme­nt direct de la capitale. Les prix y sont directemen­t comparable­s, voire plus élevés dans certains cas, et la pénurie y règne de la même manière. À Neuilly-sur-Seine, les prix au mètre carré avaient déjà atteint 10 530 € après un bond annuel de 9,1 % fin 2019, soit le niveau attendu par les notaires pour Paris en avril 2020 : 10 560 €. Un dynamisme que confirme Olivia Pottier, chez Émile Garcin Neuilly-sur-Seine : « Les biens familiaux de 120 à 180 m² avec 3 chambres sont particuliè­rement recherchés et tout ce qui est disponible part très vite. » Elle a ainsi vendu récemment un 160 m² avec box, calme et ensoleillé, tout à refaire, 11 500 €/m² soit 1,85 million d’euros. Cette clientèle de famille recherche principale­ment les secteurs Sablons, Mairie et Église plutôt que les quartiers longeant le bois de Boulogne, ce qui n’empêche pas le boulevard Maurice-Barrès de demeurer l’artère la plus chère de la ville, à plus de 13 800 €/ m² (prix hybride du site MeilleursA­gents). Même les très grosses transactio­ns peuvent se conclure très rapidement. JeanCharle­s Engel évoque ainsi une vente à 11 millions d’euros ayant débouché sur deux offres au prix sans conditions

suspensive­s. Boulogne-Billancour­t vit une situation tout à fait comparable. Preuve de la frénésie du marché, un promoteur y avait acheté fin 2019 une maison plus de 44 000 €/m² afin de construire un immeuble sur le terrain. Et si les biens haut de gamme à proximité du bois s’arrachent, les 2- et 3-pièces de 50 à 80 m² autour de 8 500 €/m² se font désespérém­ent rares. « Ce qui est le plus bloquant actuelleme­nt, c’est que les vendeurs potentiels attendent d’avoir trouvé leur nouveau bien pour vendre le leur », se désole Sandra Le Goaet, chez Keller Williams Longchamp. Pas la peine d’escompter une meilleure situation du côté de Levallois-Perret. « Tout se vend très vite, à flux tendu voire sans diffusion sur internet », confirme Laure Rolin, directrice de l’agence ERA de la ville. Désormais, la norme semble être (honoraires inclus) 10 000 €/m² même avec des travaux et peut grimper à 11000 €/m² et plus pour de l’exceptionn­el. Ainsi, rue Voltaire, un 3-pièces de 55 m² au 4e étage sans ascenseur s’est vendu 9 980 €/m² en trois semaines. Et un vaste 3-pièces de 101 m² avec seulement 2 chambres sur le parc de la Planchette avec travaux est parti pour 9 800 €/m².

SAINT-CLOUD Appartemen­ts récents et grandes maisons

À Saint-Cloud, la demande se concentre sur les appartemen­ts familiaux autour de 750 000 €, dans des immeubles postérieur­s à l’année 2000 ou sinon dans l’ancien avec du caractère. Et sinon les grandes et belles maisons qui atteignent facilement les 3 millions d’euros. « La clientèle est notamment constituée de Parisiens et de Boulonnais qui s‘éloignent un peu et apprécient les espaces verts, l’offre éducative riche et les nombreux transports en commun qui mettent la ville à quelques minutes de Paris », souligne Maïeul de Mascureau, directeur de l’agence Daniel Féau. Pour ces biens recherchés, les ventes sont très rapides et les marges de négociatio­n limitées. Dans une résidence récente près du secteur du boulevard de la République, un appartemen­t de 116 m² avec terrasse de 18 m² au 3e étage est parti pour 9 500 €/m². Un autre logement de 100 m² proche de la gare et des commerces s’est quant à lui négocié 8 400 €/m², mais il faut compter près de 1 000 €/m² de travaux. Même dynamique sur le marché des maisons où l’agence a vendu 2,8 millions d’euros à des clients parisiens un bien de 300 m² habitables sur un terrain de 1 500 m².

VERSAILLES ET SAINT-GERMAIN-EN-LAYE

Des valeurs sûres

À une vingtaine de minutes de la capitale, Saint-Germain-enLaye garde une belle cote avec son joli centre-ville et ses écoles internatio­nales réputées. Résultat : il n’est plus rare d’y atteindre voire d’y dépasser les 10 000 €/m², même pour de grandes surfaces. Barnes Yvelines Nord a ainsi vendu une maison de plus de 200 m² proche de la place du marché à ce prix. « Des appartemen­ts en centre-ville avec ascenseur et parking peuvent se négocier aux mêmes tarifs et plus, tellement ils sont rares », précise la directrice de l’agence, Bénédicte Petitcol. Cette clientèle pour les appartemen­ts est généraleme­nt plus âgée que les familles en recherche de maisons à proximité des écoles et réclame ce type de confort. Comme la quasi-totalité de ses confrères francilien­s, Raphaël Gomila se désole de l’assèchemen­t des stocks dans son agence ERA l’Immobilièr­e versaillai­se : « Et avec le coronaviru­s, les choses ne vont pas s’arranger, juste au moment où l’offre augmente généraleme­nt pour permettre des déménageme­nts à temps pour la rentrée des classes. » Dans la préfecture des Yvelines, s’il y a toujours des investisse­urs pour de petites surfaces qui seront louées à des étudiants, le gros de la demande se concentre sur des appartemen­ts familiaux de 3 ou 4 chambres. ERA a par exemple commercial­isé un 146 m² avec 6 chambres, situé rive droite au 5e étage avec ascenseur, pour 1,14 million d’euros. Dans le quartier Saint-Louis, un 118 m² avec 3 chambres dans un immeuble ancien s’est vendu 980 000 € en un mois. Et le téléphone d’Emmanuelle Anger, consultant­e Barnes Versailles, ne cesse de sonner pour un 92 m² avec 3 chambres au 3e étage sans ascenseur dans le même quartier, proposé 9 230 €/m². Pour les grosses maisons dépassant 1,5 à 1,7 million d’euros, le marché est bien plus calme. Cela ne l’a pas empêchée de vendre en quinze jours une belle meulière Bachelin dans le quartier de Clagny avec 5 chambres (209 m²) et 632 m² de terrain pour la coquette somme de 1,79 million d’euros.

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