ENTRE ESPOIRS ET INQUIÉTUDES
Au-delà d’une sensible remontée des taux, c’est surtout le resserrement des conditions d’accès au crédit qui inquiète.
LES TAUX : ATTRACTIFS MALGRÉ LA REMONTÉE
Les taux de crédit immobilier restent historiquement bas, mais depuis février ils remontent. En avril et en mai, les augmentations étaient comprises entre 0,3 et 0,4 %. En juin, quelques baisses ont été enregistrées par la plupart des courtiers, mais pas de quoi bousculer cette tendance haussière. Actuellement, les taux moyens (hors assurance) varient entre 1,15 et 1,2 % sur 15 ans, 1,3 et 1,4 % sur 20 ans et avoisinent les 1,6 % sur 20 ans. Les prêts à moins de 1 % sur 20 ans sont devenus rarissimes et réservés aux emprunteurs avec des revenus exceptionnels. Ces profils peuvent ainsi espérer entre 0,8 et 1,1 % sur 20 ans et 1,05 % et 1,3 % sur 25 ans, selon les banques. En revanche, pour les emprunteurs dont les revenus ont été impactés par la crise, c’est la double peine. Et si les taux d’emprunt restent attractifs, les banques se rattrapent souvent sur les frais annexes (frais de dossier, assurance, frais interbancaires…). Cette hausse des taux est d’autant plus malvenue que les prix de l’immobilier ne sont pas sûrs de baisser fortement.
L’ACTIVITÉ : SOUTENUE DEPUIS LE DÉCONFINEMENT
Après avoir donné priorité aux PME et aux ménages en difficulté pendant le confinement, les banques se penchent sur les nouveaux dossiers.
« Après deux mois de production de crédit presque à l’arrêt, les banques ont la volonté de rattraper le retard accumulé », affirme Sandrine Allonier, de Vousfinancer. « Nous constatons un redémarrage franc et dynamique du marché immobilier, analyse une source proche du Haut Conseil de stabilité financière.
Les Français ont accumulé de l’épargne. L’accès au crédit est abondant, les taux d’emprunt sont faibles. » Les courtiers enregistrent un regain des demandes de crédit, mais il s’agit surtout de projets qui avaient été interrompus à cause du confinement. Il faut désormais voir si les nouvelles demandes pourront aboutir. Ce qui n’est pas assuré du fait du contexte économique dégradé et de la sélectivité des banques.
LES CONDITIONS : DES BANQUES PLUS SÉLECTIVES
Les banques ouvrent à nouveau les vannes du crédit, mais ciblent surtout les profils les moins à risque. Pour espérer obtenir un prêt, votre taux d’endettement ne devra pas dépasser 33 % de vos revenus disponibles. Même des demandeurs aisés peuvent se voir refuser un crédit bien qu’ils aient des revenus ou un reste à vivre élevés. C’est le cas d’un couple de quadragénaires qui touche 84 000 euros par an et dispose d’une épargne de 15 000 euros. Ils souhaitent acquérir une résidence principale à 360 000 euros. Avant le confinement, une banque leur propose un taux de 1,65 % sur 25 ans. Deux mois plus tard, il est passé à 2,1 % (2,86 % avec les frais). Soit un taux supérieur au taux d’usure (au-delà duquel la loi interdit à une banque de prêter, NDLR). Leur demande a été refusée. Les banques sont également très vigilantes quant au secteur d’activité des emprunteurs. « Il n’y a pas de liste rouge mais on peut envisager que les dossiers d’un régisseur dans l’événementiel ou d’un salarié de Renault soient étudiés avec plus de précautions que l’an dernier », reconnaît Maël Bernier, porte-parole de Meilleurtaux.com. « Les banques redoutent une envolée des impayés de crédit et des contentieux sur les en-cours », explique, de son côté, Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi. Une situation que le ministre chargé de la Ville et du Logement va suivre de près. « L’accession à la propriété ne doit pas être réservée à quelques-uns, met en garde Julien Denormandie, interrogé par Le Figaro Immo. Elle doit être accessible à tous, même aux ménages modestes. Il ne doit pas y avoir de frilosité dans l’octroi des prêts immobiliers. » ■