DES OPPORTUNITÉS À SAISIR
La crise a enrayé la dynamique de l’investissement immobilier, très prisé avant le confinement. Les Français y placeront-ils une partie des 60 milliards d’euros d’épargne qu’ils ont accumulés durant cette période ?
IMMOBILIER ANCIEN : RETOUR VERS LA LOCATION CLASSIQUE
Après deux mois d’arrêt dus au confinement, le marché immobilier se remet en ordre de marche. L’intérêt pour la pierre, dont l’investissement en direct dans l’ancien peut rapporter entre 2 et 5 %, ne se dément pas. Mais le contexte économique laisse planer des incertitudes. Longtemps mise de côté au profit de la location touristique, la location traditionnelle de longue durée est, par exemple, en train de retrouver quelques couleurs. « L’absence des touristes pendant la crise sanitaire a remis un nombre important de logements sur le marché locatif du centre de Paris, loués habituellement sur Airbnb. Ils ont rapidement fait le bonheur de clients qui ne trouvaient plus suffisamment d’opportunités avant le Covid-19 », affirme Jean-François Morineau, directeur général délégué Conseil Habitation & Hospitality chez BNP Paribas Real Estate. Quid de la menace des impayés ? « Les locataires d’habitation, à 95 %, paient leur loyer, assure-t-il. L’investissement immobilier repose sur des fondamentaux sains. »
IMMOBILIER NEUF : POUR LES ZONES TENDUES
L’avenir est plus sombre dans le neuf. Les ventes s’effondrent (- 30,8 % pour l’investissement locatif au premier trimestre 2020), les stocks s’épuisent et les prix s’envolent, selon la Fédération des promoteurs immobiliers. Mais le regain d’intérêt pour les villes moyennes, suscité par le télétravail, pourrait relancer la demande locative si certains ménages n’ont pas les moyens d’acheter. Pour inciter plus de ménages à investir dans le neuf, le prêt à taux zéro a été prolongé, au début de l’année, jusqu’à fin 2021 pour l’ensemble du territoire. « Comme pour l’ancien, l’investissement immobilier dans le neuf va rester intéressant, mais uniquement pour les zones tendues. Je ne suis pas sûr que la demande dans les zones détendues soit structurelle », analyse Christian de Kerangal, directeur de l’Institut de l’épargne immobilière et foncière.
RÉSIDENCES GÉRÉES : DU POTENTIEL MALGRÉ LES INQUIÉTUDES
Touristes, seniors, étudiants : l’immobilier géré, attractif avant le confinement, a été sévèrement impacté par la crise. La plupart des établissements n’ont perçu aucune recette depuis au moins deux mois. Ils n’étaient donc pas en mesure de verser aux investisseurs les loyers, pourtant garantis dans les contrats quel que soit le taux de remplissage. « Ces investissements sont structurellement sains, assure Benjamin Nicaise, président de Consultim Groupe. C’est notamment le cas du tourisme, détenu à 70 % par des particuliers, qui offre la sécurité de l’immobilier résidentiel et le rendement de l’immobilier commercial (4 % net d’impôts). »
Quant aux résidences seniors et Ehpad, le virus est entré dans plusieurs établissements. « La qualité de gestion des sociétés d’exploitation a permis d’éviter le pire. Les loyers ont été payés car les établissements n’ont pas fermé », affirme Benjamin Nicaise. Ce qui n’est pas le cas de beaucoup de résidences étudiantes. Leurs occupants en sont partis, pendant le confinement, pour rejoindre leur famille. Certains auront sans doute des difficultés pour payer leur loyer. Pas de quoi rassurer les investisseurs qui, pour la plupart, ont acquis ces résidences à crédit et ont un emprunt à rembourser. « Les résidences seniors vont continuer de rester attractives, ce qui sera moins le cas des résidences étudiantes pendant au moins un an », affirme Christian de Kerangal.
COMMERCES : PÉRIODE DE TURBULENCES
La crise a révélé la difficulté pour les propriétaires de commerces de se faire payer leurs loyers. Dans les centres commerciaux, par exemple, 80 % des loyers dus pendant la période de fermeture sont à ce jour non réglés. La plupart des bailleurs sont des particuliers qui vivent de ces loyers et ont investi dans ces commerces afin de se constituer un complément de revenu pour la retraite. « Cette crise économique est une crise des services qui, généralement, ne disposent pas d’une trésorerie suffisante pour faire face à une crise majeure », décrypte Christian de Kerangal. L’expert immobilier préconise de cibler les grandes métropoles, mais aussi les grandes enseignes « très présentes à la fois sur internet et dans les magasins ».■