L’ÉDITORIAL
de Guillaume Roquette
Les avis sur le nouveau gouvernement divergent : est-il de droite ou non ? Chacun peut se faire son opinion en faisant le compte des ministres venus de LR ou supposés proches de Nicolas Sarkozy, puis en soupesant leur poids personnel et celui de leur portefeuille. L’exercice est distrayant mais un peu vain : il faudra juger sur pièces. On retiendra en tout cas de ce remaniement que le bon vieux clivage gauche/droite demeure le plus pertinent quand il faut apprécier le cap politique d’un gouvernement. Tant pis pour le « en même temps », l’exhortation à se réinventer, la promesse d’un nouveau monde et autres trouvailles langagières chères au président de la République : elles n’ont pas résisté à la réalité.
À dire vrai, les attaches partisanes comptent moins que l’authenticité des convictions. Un Jean-Michel Blanquer n’a jamais été encarté nulle part, mais mène une politique courageuse pour tenter de redresser la barre du bateau ivre qu’est devenue l’Éducation nationale, et c’est tout ce qui compte. De la même façon, on ne demandera pas à Éric Dupond-Moretti d’être de droite, mais simplement de lutter contre les dérives d’une magistrature idéologisée. On n’attendra pas de Gérald Darmanin qu’il soit un copié/collé de Nicolas Sarkozy, mais qu’il rétablisse l’ordre public à un moment où des faits divers tragiques (un chauffard en fuite tuant une gendarme dans le Lotet-Garonne, des délinquants tabassant à mort un chauffeur de bus à Bayonne…) démontrent quotidiennement à quel point l’autorité n’est plus respectée.
Encore un mot sur cette nouvelle équipe : une ministre est en charge de l’Égalité entre les femmes et les hommes, mais personne ne s’y occupe de la famille. Le sujet est trop secondaire sans doute… À moins que le gouvernement ne préfère laisser les mains libres à l’Assemblée nationale au moment où, dans une indifférence quasi générale, celle-ci prépare une loi dite bioéthique qui non seulement pulvérise les règles de filiation (avec la PMA sans père), mais légalise les plus graves transgressions dans la manipulation des embryons humains. Sans faire de polémique politicienne, on conviendra que jamais la droite, quand elle fut au pouvoir, ne consentit à de telles dérives au prétexte de satisfaire des revendications minoritaires. Notons aussi que tous les autres projets de réformes soumis au Parlement sont reportés au moins à la rentrée prochaine sauf celui-là, ce qui donne une idée inquiétante des priorités du moment.
Nous nous préparons des jours difficiles. Pour lutter contre des tensions sociales qui s’annoncent, le nouveau gouvernement ferait mieux de se concentrer sur le redémarrage de l’économie et la reconstruction d’un État qui a montré de vrais signes de faiblesse durant la crise du coronavirus. Sans cacher aux Français la gravité de la situation : si la droite est le parti des devoirs contre celui des droits, alors il n’y a pas à hésiter sur le cap à suivre.