L’ÉLECTRIQUE, TÊTE D’AFFICHE D’UNE NOUVELLE ÈRE
Près de quarante ans après son apparition, le sac gonflable ou airbag demeure l’un des piliers de l’amélioration de la sécurité passive. De nouvelles avancées vont permettre de réduire encore les conséquences d’un choc.
On vit un âge d’or de l’automobile », nous explique Alexandre Malval, le directeur du bureau de design avancé Mercedes, à Sophia Antipolis, près de Nice. « Les gammes des constructeurs ont explosé. Elles montrent une grande diversité de silhouettes et de formes. Les automobilistes disposent d’un choix important, ce qui n’était pas le cas lorsque j’ai commencé ma carrière », ajoute-t-il. Une situation qui pourrait être amenée à évoluer dans les prochaines années. Les constructeurs pourraient être tentés de faire un effort de rationalisation et de réduire le nombre de modèles. PSA a déjà emprunté cette voie avec un certain succès, par souci d’économie. Pour sa part, Luca de Meo, le nouveau président du groupe Renault, a aussi annoncé vouloir réduire l’offre au sein des gammes et des produits de 30 %. Le haut de gamme Renault, représenté par l’Espace, pourrait ainsi être sacrifié. Si la tentation est forte de réduire la voilure, c’est que les constructeurs sont confrontés à une multitude de défis nécessitant des investissements énormes. La crise sanitaire actuelle est un obstacle supplémentaire sur le chemin de nombreux challenges. Le plus important d’entre eux concerne la révolution électrique dans laquelle la Commission européenne, avec la bénédiction des États membres, nous entraîne. La voiture décarbonée serait pourtant loin d’être propre si l’on s’intéresse au bilan écologique du puits à la roue. Le tout-électrique soulève autant de questions qu’il n’en résout. À en croire certains experts, l’extraction et la transformation des métaux rares essentiels à la production des véhicules électriques (batterie et moteur) mais aussi le recyclage des batte
ries en fin de vie, sont un désastre pour l’environnement. Le véhicule électrique n’aurait alors plus que le privilège de se déplacer sans pollution locale. Pour le moment, les constructeurs n’ont pas vraiment le choix. C’est à marche forcée qu’ils électrifient une grande partie de leurs gammes. Ces nouveaux modèles, qui s’apprêtent à déferler sur le marché, les automobilistes n’auront même pas le loisir de les découvrir dans un Salon.
SALE TEMPS POUR LES SALONS
Les uns après les autres, ces grands rendez-vous internationaux, qui rythment l’actualité de l’industrie automobile depuis des lustres et que l’on pensait inamovibles, sont en train de disparaître. La faute au coronavirus qui chamboule tout. Le Parc des expositions de la Porte de Versailles, qui aurait dû accueillir dans quelques jours le Salon de Paris, restera portes closes. Une première pour le plus grand Salon automobile au monde en termes de fréquentation. Annulée cette année à la dernière minute par les autorités helvétiques, la manifestation de Genève n’aura pas lieu l’an prochain. Tous les espoirs se reportent désormais à 2022. De son côté, l’exposition de Francfort, en alternance avec Paris, déménage à Munich. Aux ÉtatsUnis, le Salon de Los Angeles, qui clôture la saison, n’aura pas lieu, tandis que l’événement de Detroit, vacillant, est désormais programmé en juin. Dans ce contexte, est-ce la fin des concept cars ? Sans Salons, les constructeurs vontils continuer à produire ces pièces uniques, qui ont pour mission d’éveiller le désir, d’exciter l’envie des automobilistes et de préparer l’avenir ? Les designers sont unanimes : ces prototypes, qui subliment des formes à venir, déflorent des tendances et habituent le regard à un style déroutant ou en rupture, ont vocation à perdurer. «Il est encore un peu tôt pour savoir ce qui va se passer, mais la créativité doit pouvoir continuer à s’exprimer. Si ce n’est pas dans les Salons, nous trouverons d’autres manières de communiquer », explique Alexandre Malval. Matthias Hossann, devenu directeur du style Peugeot après le départ de Gilles Vidal pour Renault, ne dit pas autre chose. Dans L’Automobile Magazine, il avouait « que les études sont nécessaires, peut-être encore plus qu’avant. Le public doit pouvoir en apprécier l’échelle et les volumes ».
Pas de répit pour les constructeurs. Sans attendre qu’ils surmontent la crise actuelle et digèrent les
objectifs de CO2 de 2021 et les étapes de 2025, la Commission européenne milite pour accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030. L’ambition actuelle de Bruxelles est de baisser de 40 % les émissions de CO2. Insuffisant, juge l’Union européenne qui souhaite fixer un objectif plus contraignant de réduction d’au moins 60 %.
TIR GROUPÉ DE SUV ET DE BERLINES ÉLECTRIQUES
Sans attendre, le monde de demain, électrique, sonne à la porte avec, à l’instar des véhicules à moteur thermique, une incroyable richesse de modèles. Plus d’une centaine de voitures 100 % électrique s’apprêtent à inonder le marché. Pour accompagner cette révolution, de nombreux constructeurs ont décidé de créer une nouvelle marque parallèle. C’est le cas de Hyundai qui va abriter son offre électrique sous la griffe Ioniq. La firme coréenne va lancer trois modèles au cours des quatre prochaines années. Prévu début 2021, le premier sera dérivé du concept 45 du Salon de Francfort 2019. Le suivant sera la berline Ioniq 6, basée sur le concept Prophecy. Un SUV suivra en 2024. Cela pourra interpeller : aucune des trois Ioniq ne partage les mêmes codes stylistiques. Ce n’est pas la voie suivie par BMW pour ses premières familiales électriques. Premier d’une famille de 12 modèles zéro émission lancés d’ici à 2023, le iX3 n’est ni plus ni moins qu’un X3 animé par un moteur électrique installé sur l’essieu arrière et affichant la même puissance (286 ch) que la première M3 6 cylindres. Il est alimenté par une batterie de 80 kWh (74 kWh utiles) autorisant une autonomie homologuée à 460km selon la norme WLTP. Le iX3 est lancé en mars 2021 au tarif de 72950€. Suivront, quelques mois plus tard, deux modèles inédits : la berline i4 et le crossover iNext. Si ces modèles prennent le soin de se distinguer de la gamme actuelle, ils restent néanmoins immédiatement identifiables comme des membres à part entière de la famille BMW. Volkswagen
a également pris le parti de différencier les modèles de sa gamme électrique. Après la citadine ID.3, le second modèle de l’offensive zéro émission de VW est un SUV de 4,58 m de long et 1,61 m de haut. Basée sur l’inédite plate-forme MEB, cette familiale hérite de nombreux éléments de l’ID.3, à commencer par son système multimédia et sa technologie. Il s’agit d’une machine électrique de 204 ch installée sur l’essieu arrière et alimentée par une batterie de 77 kWh. Annoncée avec une autonomie de 520 km, l’ID.4 sera lancée fin 2020 au tarif de 49950€ (Allemagne). L’an prochain, une version à transmission intégrale complétera l’offre. Elle partagera son système avec la Skoda Enyaq iV, un SUV de 4,64 m qui fait entrer la marque dans la nouvelle ère de l’électromobilité. Ce SUV tchèque va se décliner en cinq niveaux de puissance et trois tailles de batterie. La version d’entrée de gamme, la iV 50, combine une machine électrique de 148 ch à une batterie de 55 kWh (52 kWh utiles). L’offre se compose ensuite de la iV 60 – puissance de 180 ch et batterie de 62 kWh (58 kWh utiles) –, et de la iV 80, dont la batterie de 82 kWh (77 kWh) alimente un moteur électrique de 204 ch. Enfin, les deux dernières versions disposent de la grosse batterie et de la transmission intégrale grâce à l’adoption d’un petit moteur électrique à l’avant. La version iV 80 4 x 4 avoue 265 ch et le modèle RS revendique 306 ch. L’Enyaq iV annonce une autonomie de respectivement 340, 390, 510 et 460km pour les deux versions les plus puissantes. Pas de surprise côté recharge. Sur une borne rapide type Ionity, récupérer 80 % de l’énergie demandera près de 40 minutes. En passant à l’électrique, Skoda ne renonce pas à son positionnement
L’ÉLECTROMANIA GAGNE TOUS LES SEGMENTS DU MARCHÉ
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particulièrement attractif. La version iV 60 sera lancée au tarif de 40800euros (hors bonus).
Autre membre de la galaxie VW, Seat a décidé d’abriter le haut de gamme de son offensive électrique sous la marque Cupra. Son premier modèle, conçu à partir de la structure MEB, sera le crossover el-Born.
Il s’agit d’un véhicule aux formes très dynamiques et doté d’une suspension pilotée DCC Sport. Quant à Audi, en raison de son positionnement, son offre de véhicules électriques va s’articuler autour de différentes plates-formes. La e-tron GT, commercialisée au premier semestre 2021, empruntera sa technologie à la Porsche Taycan. Ce coupé 4 portes de près de 5m de long accueillera une batterie de 90kWh. Dévoilée l’été dernier, la Nissan Ariya étrenne la nouvelle plate-forme électrique qui servira à ses partenaires de l’Alliance Renault. Présentant des formes élancées de SUV coupé, cette familiale de 4,60m sera proposée en traction ou 4 roues motrices avec deux types de batteries (63 ou 87 kWh) et cinq niveaux de puissance, de 217 à 394 ch. En attendant l’arrivée de sa première familiale électrique, Renault multiplie les versions hybrides. Après le Captur, la Mégane est désormais disponible en version hybride rechargeable (160 ch) avec la technologie E-Tech. Chez PSA, la plate-forme modulaire multiénergies CMF va servir de base à la nouvelle génération de l’Opel Mokka. La deuxième génération de ce SUV urbain de 4,15 m, qui inaugure le nouveau langage stylistique de la marque allemande, sera ainsi proposée avec la chaîne de traction électrique de 136 ch et la batterie de 50 kWh. Une technologie que l’on va retrouver sur la nouvelle Citroën C4 (35800€), qui se réinvente pour adopter une architecture surélevée, type crossover. En voie de fusionner avec le groupe sochalien, l’italo-américain Fiat Chrysler Automobiles peaufine son programme de réduction de l’empreinte carbone. Fiat s’appuie sur une plate-forme inédite pour commercialiser une 500 électrique accueillant un moteur de
SANS CESSE RENOUVELÉE, L’AUTOMOBILE CONSERVE SON POUVOIR D’ATTRACTION
118 ch et une batterie de 42 kWh. Déclinée en découvrable et en 3 portes, la 500 sera disponible en 2021 avec une batterie de plus petite capacité. Devenue le pôle d’excellence de FCA en matière de véhicules électriques, l’usine turinoise de Mirafiori devrait assurer une grande partie de la stratégie d’électrification de Maserati dénommée Folgore.
L’INVASION DES ÉCRANS
Un programme d’investissement ambitieux devra permettre la commercialisation d’une nouvelle génération de Gran Turismo et Gran Cabrio 100 % électrique. Ces modèles précéderont le lancement d’une version zéro émission de la supercar MC20. Révélée à Modène début septembre, cette berlinette d’une grande sobriété sera lancée au cours du premier trimestre 2021 avec un V6 biturbo 3litres entièrement développé par les motoristes du trident. Dénommé Nettuno (Neptune en italien), ce V6 compact inaugure en série un système de préchambre de combustion issu de la Formule 1 et reposant sur une double injection (directe et indirecte). Développée autour d’une structure monocoque en carbone, la MC20 affiche une puissance 630ch à 7500 tr/min et un couple de 730Nm dès 3000 tr/min.
Ce mois de septembre a également été marqué par la présentation de la septième génération de la Mercedes Classe S. Autour d’une silhouette fluidifiée (Cx aérodynamique de 0,22) recelant des poignées de porte affleurantes, le porte-drapeau de la firme à l’étoile s’allonge encore un peu plus : 5179mm (+ 54mm) pour la version à empattement court et 5289mm (+ 34mm) pour le modèle à empattement long. Monstre de technologie, cette limousine multiplie les innovations. Elle pourra accueillir jusqu’à cinq écrans numériques, dont la dalle géante dans le prolongement de la console centrale. Si une version EQ S 100 % électrique figure au programme, elle arrivera dans un second temps. D’ici à la fin de l’année 2020, Mercedes a donné la priorité aux versions diesel. L’an prochain, un hybride rechargeable revendiquant pas moins de 100km de rayon d’action électrique sera lancé. Enfin, chez Rolls-Royce, à défaut de convertir ses clients à l’électrique, la Ghost s’appuie sur une plate-forme réalisée en aluminium spaceframe et son discret V12 6,75litres biturbo de 571ch pour transporter les passagers dans une autre dimension. Les quatre roues motrices et directrices font partie de l’équipement de série de ce vaisseau de la route. ■
Qui sait combien son véhicule compte de coussins gonflables ? Un sondage donnerait des résultats édifiants. Peu d’automobilistes s’en soucient. Introduit en première mondiale par Mercedes, sur sa Classe S de 1981, le premier coussin gonflable constituait, à l’époque, une avancée considérable en matière de sécurité passive. Il palliait dans de nombreux cas l’absence du port de la ceinture de sécurité, notamment aux États-Unis où ce n’était vraiment pas dans les moeurs et où un débat ceinture contre airbag occupait l’espace public. Avec le concours des équipementiers, Mercedes avait mis treize ans à mettre au point ce sac en tissu qui se gonflait en une fraction de seconde après un accident, afin d’absorber l’impact du corps du conducteur contre le volant. Le client n’a pas tout de suite compris l’intérêt de cet équipement. Aujourd’hui encore, il préfère une voiture équipée d’airbags à condition que ceux-ci soient de série. C’est pourquoi, la réglementation l’a progressivement imposé. L’airbag conducteur est monté de série dans toutes les Mercedes depuis 1992. Deux ans plus tard, l’airbag passager devenait un équipement standard pour l’intégralité de la gamme de la firme à l’étoile. Depuis, il a beaucoup progressé. Les brûlures occasionnées par le gaz de gonflage ne sont plus qu’un lointain souvenir. L’époque où la présence d’un coussin gonflable constituait un argument commercial et un moyen pour les constructeurs de se distinguer de la concurrence est révolue. Depuis que les crash tests de l’Euro NCAP ont imposé le diktat des fameuses cinq étoiles, le sac gonflable est devenu un objet familier de l’habitacle du véhicule. Ces coussins tapissent désormais l’intérieur. Sur les voitures les plus récentes, la norme est ainsi de six airbags. C’est le cas de la troisième génération de la Dacia Sandero commercialisée dans quelques mois. Sur certains modèles haut de gamme, on peut en trouver jusqu’à onze (Lexus LS600h). Cet indispensable de la sécurité représente un marché annuel de plus de 200 millions d’unités. Pour être
pleinement efficace, l’airbag doit se conjuguer avec la ceinture de sécurité. Deux précautions valent mieux qu’une. Les prétensionneurs ont contribué à réduire les conséquences d’un choc en plaquant, au début de la décélération, le passager au fond de son siège, assurant ainsi une retenue maximale. Si la ceinture est admise à l’avant, tous les passagers arrière ne la bouclent pas. Loin de là. Il ressort de nombreuses études qu’elle est médiocrement portée à l’arrière. Surtout chez les plus jeunes. Selon une récente étude des assureurs, près de 50 % des enfants ne sont pas correctement attachés. C’est pourquoi, dans le secret des bureaux d’études, les constructeurs et les équipementiers poursuivent leurs expérimentations pour compenser la négligence qui reste la principale source de mortalité. On sait, hélas, que les automobilistes ne sont pas prêts à payer pour leur sécurité, surtout s’il s’agit d’un véhicule d’entrée de gamme. Le lent renouvellement du parc automobile réduit d’autant l’amélioration des statistiques. C’est pourquoi, il faut encourager, voire rendre obligatoires, ces systèmes dernier cri sur toutes les voitures neuves.
UN AIRBAG FRONTAL POUR LES PASSAGERS ARRIÈRE
Les chiffres font froid dans le dos. La route tue 3 700 personnes chaque jour dans le monde. Elle en blesse 50 millions par an. En Inde, 150 000 personnes perdent la vie chaque année. Sur les routes françaises, 3 239 personnes sont décédées l’an dernier – 9 morts de moins qu’en 2018. Soit une baisse de 0,3 %. La courbe ne fléchit plus malgré une répression toujours plus importante. En Allemagne, où de nombreux tronçons d’autoroutes ne sont toujours pas limités, la mortalité est identique à la France. La preuve, s’il en est, que le facteur vitesse ne saurait être le coupable parfait, pourtant si bien désigné comme tel par les apôtres de la Sécurité routière. Certains constructeurs n’attendent pas une évolution de la réglementation pour enrichir la sécurité passive de leurs modèles. Mercedes va introduire, en option, sur sa dernière Classe S Limousine, sur le marché à la fin de l’année, l’airbag avant pour le siège arrière. Apparu sur l’ESF 2019 – le démonstrateur de sécurité expérimental présenté l’an dernier –, ce dispositif a pour mission de réduire les contraintes exercées sur la tête, la nuque et le thorax des occupants des places latérales en cas de collisions frontales graves. L’airbag s’appuie sur une structure tubulaire en forme de boîte présentant un volume d’environ 16 litres et rapidement gonflée avec le gaz comprimé issu du générateur de gaz froid. Des valves brevetées veillent à ce que l’air reste emprisonné lorsque le passager s’enfonce dans le coussin et que l’effet protecteur souhaité soit bien garanti.
La sécurité des passagers n’est pas uniquement l’apanage des modèles haut de gamme. Le durcissement des tests Euro NCAP amène les citadines à intégrer, de série, un airbag central avant. La Toyota Yaris et la Honda Jazz sont les deux premiers véhicules à l’introduire. En cas de collision latérale, cet équipement logé dans la partie latérale du dossier du siège conducteur évite aux deux occupants des places avant de se télescoper. Selon Honda, ce nouvel airbag central avant réduirait les blessures à la tête de 85 % pour le passager du côté proche de l’impact et de 98 % pour le passager du côté opposé. La prochaine étape ? Après avoir investi les habitacles et le pare-brise pour protéger les piétons, l’airbag pourrait gagner les flancs. L’équipementier ZF travaille sur un coussin gonflable extérieur latéral qui représenterait la meilleure parade contre le choc latéral, responsable d’un tiers des victimes de la route. Ce dispositif réduirait jusqu’à 40 % la gravité des blessures des occupants des véhicules percutés. ■
CERTAINS VÉHICULES COMPTENT DÉSORMAIS PLUS DE 10 AIRBAGS