PORCHERIE À L’ITALIENNE
★★★ LES BONS GARÇONS, de Pierre Adrian, Les Équateurs, 267 p., 19 €.
Elles sont deux à faire de la mobylette dans les rues de Rome, en 1975. Raffaella conduit. « Elle était plutôt grande pour une lycéenne de son âge. Avec un regard triste sous d’épais sourcils déçus ; ils racontaient mal son obstination, sa joie désordonnée. Raffaella agissait, elle forçait les décisions, elle entraînait. » Derrière elle, Maria Grazia, « plus fragile, semblait encore égarée dans l’adolescence. Elle l’était sans subir l’ingratitude de son âge. Elle avait la peau mate qui disait ses origines siciliennes, comme son nom plein de piété. Fille aînée, Maria était venue au monde comme une grâce accordée par Dieu. » Les deux filles viennent des quartiers pauvres. Un jour, à la sortie d’un cinéma où elles ont vu Le Parrain 2, elles décident de faire du stop pour rentrer chez elles, et rencontrent trois garçons très différents. Ils viennent des beaux quartiers, mènent une vie de dilettante, vont de fête en fête et donnent dans le genre néofasciste. Les filles sont impressionnées, les garçons s’amusent avec ces deux gamines du peuple. Ils s’amusent tellement qu’ils les emmènent dans une somptueuse villa, celle du Circeo, qui surplombe la mer. C’est là, diton, que « les bateaux d’Ulysse et de ses compagnons avaient débarqué non loin du palais de Circé. Au cours d’un banquet de fête, la magicienne avait ensorcelé les marins. Et les hommes s’étaient transformés en porcs. » Les trois garçons se transformeront à leur tour en porcs, l’enfer se déchaînera pour déboucher sur ce que l’on a appelé le « massacre du Circeo ». Pierre Adrian, qui écrit divinement, s’était fait remarquer avec son premier livre, La Piste Pasolini. Pier Paolo se serait sans doute reconnu dans Les Bons Garçons, roman glaçant des « années de plomb » italiennes.