LA PAGE HISTOIRE
Le 23 août 1939, le traité de non-agression entre l’Allemagne nazie et l’URSS révélait une étrange complicité entre les deux totalitarismes.
Le 23 août 1939, un traité de non-agression est conclu à Moscou entre l’Allemagne et l’Union soviétique, signé par leurs ministres des Affaires étrangères respectifs, l’Allemand Ribbentrop et le Russe Molotov. Staline est hautement satisfait, tout comme Hitler : chacun des deux est persuadé de jouer gagnant. Le chancelier du IIIe Reich parce qu’il veut attaquer la Pologne avant de s’en prendre à l’Europe de l’Ouest et que ce pacte lui garantit la paix à l’est. Le maître du Kremlin parce que le traité éloigne la menace d’un conflit avec l’Allemagne et lui accorde un délai pour renforcer l’Armée rouge, mais surtout parce que l’accord contient des clauses secrètes qui prévoient le partage de la Pologne entre l’Allemagne et l’Union soviétique, et l’annexion par cette dernière des trois pays Baltes et de la Bessarabie, région de Roumanie limitrophe avec l’URSS.
Le traité fait scandale dans les démocraties occidentales, provoquant l’interdiction du PCF, mais la suite s’enchaîne mécaniquement. Le 1er septembre, les Allemands envahissent la Pologne, ce qui conduit la France et l’Angleterre, le 3 septembre, à déclarer la guerre à Berlin. Le 17 septembre, l’Armée rouge envahit à son tour la Pologne, qui est totalement occupée le 27 septembre. Le lendemain est signé un second traité germano-soviétique, « d’amitié et de délimitation des frontières » : la Pologne disparaît en tant qu’État.
« Loin d’être un détail ou une curiosité, le pacte germanosoviétique est essentiel pour comprendre la Seconde Guerre mondiale, mais aussi, plus généralement, l’histoire de l’Europe au XXe siècle », souligne Roger Moorhouse. Cet historien britannique consacre une solide étude au pacte Hitler-Staline, analysant le cynisme absolu des deux dictateurs, la parenté idéologique et politique, par-delà leurs différences, entre le communisme et le nazisme, les conséquences à long terme de cet accord puisque l’URSS, entrée en guerre contre le Reich en 1941 et victorieuse en 1945, mettra la main, à travers les communistes locaux et en s’appuyant sur l’Armée rouge, sur les pays que lui avait attribué le traité de 1939. À l’ouest, après-guerre, les communistes ont tout entrepris pour faire silence sur le pacte Hitler-Staline. En Pologne et dans les pays Baltes, ce forfait n’a jamais été oublié.
Le Pacte des diables. Histoire de l’alliance Staline et Hitler (1939-1941),
de Roger Moorhouse, Buchet-Chastel, 508 p., 26 €.