BAL TRAGIQUE EN ISÈRE

★★★ LA NUIT DU 5-7, de Jean-Pierre Montal, Séguier, 252 p., 20 €.

Cela commence par l’enterrement de Jacques Chirac vu à la télévision, dans un café. Peu de temps avant avait eu lieu l’incendie de l’usine chimique Lubrizol à Rouen, rapidement éclipsé par la mort de l’ancien président. Parmi les clients, un septuagénaire en proie aux « vieux cauchemars enfouis avec soin depuis des siècles » : pour lui, l’Histoire se répète… Flash-back, 1963. Le jeune Michel Mancielli, originaire de SaintLaurent-du-Pont, en Isère, est monté à Paris. Il joue de la guitare, reprend Apache, des Shadows, puis se passionne pour la pop anglaise. Il rencontre Hector, « le Chopin du twist », qui a essayé de cuire un oeuf sur la tombe du Soldat inconnu avant que la police n’intervienne. Michel fait partie d’un groupe qui doit jouer dans un night-club de sa ville de SaintLaurent-du-Pont, le 5-7, le 31 octobre 1970. Mais Mancielli est persona non grata. Il est viré. Tant mieux pour lui : cette nuit-là, 146 jeunes, dont les musiciens, périront brûlés vifs dans un incendie. Le drame est terrible, la presse parle de « bal tragique ». Il se murmure que le SAC serait impliqué : les fans de rock ne sont pas le genre de beauté du « bras armé du gaullisme ». Justement, huit jours plus tard, le Général meurt (Hara-Kiri titrera Bal tragique à Colombey – 1 mort, en référence au drame de l’Isère), l’affaire est enterrée. La Nuit du 5-7, écrit au scalpel, raconte cela. C’est le roman d’une époque, mais également celui d’un traumatisme : comment survivre à la culpabilité lorsqu’on a échappé à pareil drame ? Le très doué Jean-Pierre Montal, révélé en 2015 avec Les Années Foch, premier roman d’exception, vient de se surpasser…