Le Figaro Magazine

LE BRUT NATURE SELON DRAPPIER

La maison champenois­e se distingue avec son “Brut Zéro”, un vin remarquabl­e sans ajout de sucre ni soufre.

- Stéphane Reynaud

Michel Drappier donne une définition en creux du champagne brut nature, à savoir « un vin qui prend le contre-pied de tout ce qu’ont fait les Champenois depuis deux siècles pour plaire aux dames qui mangent des macarons à 5 heures ou à ceux qui s’amusent en boîte de nuit ». Les Drappier n’ont pas inventé le brut nature, dont on parle de plus en plus : eux, ont juste commercial­isé le vin qu’ils dégustaien­t à la maison. « Depuis le début des années 1990, nous étions quelques-uns dans la famille, dont moi-même, à aimer boire le champagne non dosé, sans ajout de sucre. Mais nous ne voulions pas le mettre sur le marché, car nous avions l’impression que c’était comme vendre une voiture sans roues », raconte-t-il. Puis, ils franchisse­nt le pas en 1998. « La décision prise, nous nous sommes aperçus que ce vin ne pouvait pas être conçu de la même façon que les autres. Nous avons alors choisi un pinot noir de Chablis. » Ils le baptisent « Brut Zéro » : nature, sans filtration ni soufre. « L’exercice se révèle difficile. Il faut que la matière première soit irréprocha­ble. Cette méthode ne pardonne aucune faute », reprend Hugo, le fils, ingénieur oenologue très impliqué dans la production. À propos de cette création, le père parle de « nudité absolue. Mais ce n’est pas un vin sauvage pour autant ». En bouche, il ne se montre ni acide, ni mordant ou crispant, comme d’autres pétillants « sans sucre ajouté ». La légèreté et la qualité du fruit sont remarquabl­es. La clientèle est plus jeune que celle des amateurs de bulles classiques : « La nouvelle génération apprécie l’amertume, la tension de cette cuvée. En fait, nous avons été surpris par son succès. Certains nous le commandent pour des mariages. » L’élargissem­ent de la gamme vers ce type de jus correspond à un changement plus général, qui commence à la vigne. Cette dernière, libérée de l’utilisatio­n outrancièr­e de pesticides, bien obligée de s’adapter à l’évolution du climat, change d’aspect. Le vigneron s’est rappelé les vertus de l’herbe qui pousse entre les rangs, la taille de la plante évolue. Désormais, les vignes exposées au nord retrouvent grâce à leurs yeux. « Nous devons reconnaîtr­e que le raisin est naturellem­ent meilleur aujourd’hui », lâche Michel Drappier. Le vin suit la tendance.

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