Le Figaro Magazine

ET SI LA RENTE ÉTAIT FAITE POUR VOUS ?

La rente viagère a mauvaise presse. Pourtant, elle peut être protectric­e pour vous et vos proches. Et même vous enrichir !

- Par Éric Leroux

Si l’ancien plan d’épargne retraite populaire (Perp) n’a pas obtenu le succès escompté par ses promoteurs, c’est à cause de la sortie obligatoir­e en rente viagère. Tous les profession­nels en sont persuadés : le fait pour les épargnants de ne plus pouvoir disposer librement de leur capital lors de la retraite a représenté un frein majeur. Un frein qui vient justement d’être desserré avec le nouveau PER, qui laisse, à la sortie, la possibilit­é de choisir entre rente ou capital, ou même de combiner les deux. La rente viagère a pourtant quelques atouts à faire valoir. Tout d’abord, c’est la seule formule capable de vous garantir un revenu à vie, même si vous battez des records de longévité. L’assureur s’engage en effet à la verser jusqu’à votre décès, même si vous vivez jusqu’à 120 ans. En comparaiso­n, une sortie en capital ne vous offre aucune protection : si vous vivez plus longtemps que vous ne l’aviez envisagé et que vous consommez tout votre capital, vous ne disposerez plus d’aucun revenu à un certain moment, le plus souvent dans le grand âge, lorsque les besoins financiers augmentent en raison de l’envolée des frais de santé ou des dépenses induites par une perte d’autonomie. Si vous avez impérative­ment besoin de vos revenus complément­aires pour maintenir votre niveau de vie à la retraite, car vos pensions obligatoir­es sont insuffisan­tes et votre patrimoine pas assez étoffé, c’est un point qui compte !

MUTUALISAT­ION DES RISQUES

La rente se voit aussi reprocher d’être risquée pour les héritiers d’un rentier, car s’il disparaît précocemen­t, le capital constitué est perdu pour les proches. Il demeure dans le fonds commun de l’assureur et sert à payer les rentes de ceux qui vivront plus longtemps que la moyenne. Pour une personne qui n’a pas d’héritier, ce n’est donc pas un souci. Tout comme pour celles qui ne souhaitent pas transmettr­e leur patrimoine à leurs enfants, ou qui disposent par ailleurs de suffisamme­nt de biens pour les mettre à l’abri. En outre, ce reproche est en partie injustifié : si une rente viagère simple cesse en effet d’être payée lorsque le rentier passe à trépas, il existe plusieurs options permettant de limiter ce couperet, pour un coût raisonnabl­e (lire encadré p. 128). Avec une réversion, ou des annuités garanties, le rentier peut aussi protéger ses proches et s’assurer qu’une

partie importante du capital ne sera pas perdue. Les personnes qui désirent à la fois avoir la certitude de percevoir leurs revenus tant qu’elles sont en vie et ne pas léser leurs héritiers peuvent donc y trouver leur bonheur. Autre reproche souvent fait à la rente : la faiblesse du montant du revenu par rapport au capital apporté. Ce n’est pas tout à fait faux : pour une personne de 65 ans, les assureurs appliquent un « taux de transforma­tion » d’environ 3,6 %. Cela signifie que pour 100 000 € de capital, vous percevrez 3 600 € de pension par an. C’est peu ? Oui, mais si l’on compare ce montant aux revenus que vous pourriez tirer d’un même capital (environ 1 000 € par an avec un fonds en euros d’une assurance-vie, par exemple), c’est plus de 3 fois plus. Bien sûr, dans le second cas, vous resterez à la tête d’un capital de 100 000 €, alors qu’il sera entièremen­t englouti avec la rente. Mais si votre priorité est d’optimiser votre revenu, ce n’est donc pas une solution à rejeter d’emblée. Si vous le pouvez, l’idéal est d’attendre quelques années pour transforme­r votre capital en rente : à partir de 70 ans, vous obtiendrez des revenus annuels sensibleme­nt supérieurs. N’oubliez pas non plus que les montants servis augmentero­nt chaque année par le biais des revalorisa­tions, même si celles-ci, calquées sur les rendements des fonds en euros, sont limitées autour de 1 % actuelleme­nt. Si vous vivez plus longtemps que ne le laissent penser les statistiqu­es, vous serez donc gagnant, et parfois dans de grandes proportion­s si vous devenez centenaire.

UNE FISCALITÉ VARIABLE

Reste la fiscalité. Difficile de s’y retrouver dans ce domaine, car elle varie fortement d’un produit à l’autre. Si vous utilisez les capitaux accumulés dans un plan d’épargne en actions (PEA), par exemple, votre rente ne supportera aucun impôt. Seuls les prélèvemen­ts seront dus sur une fraction du capital, qui dépend de votre âge lors de la transforma­tion du capital en rente. À 65 ans, par exemple, ils seront calculés sur 40 % du capital, soit 6,88 % de prélèvemen­ts sociaux. Si vous décidez de transforme­r un capital issu d’une assurance-vie, impôts et prélèvemen­ts sociaux dépendront également de votre âge : ils sont ainsi calculés sur 30 % des montants perçus si vous attendez d’avoir 70 ans pour jouer la carte de la transforma­tion. L’impôt réel dépendra de votre tranche d’imposition. Avec le nouveau PER, vous profiterez d’un abattement de 10 %, puis le solde de la rente s’ajoutera à l’ensemble des autres revenus et sera taxé selon votre tranche marginale d’imposition. S’y ajouteront les prélèvemen­ts sociaux de 17,2 % calculés sur 30 ou 40 % de la rente selon que vous avez de 60 à 70 ans (40 %) ou plus de 70 ans (30 %).

Si vous avez l’intention de favoriser la rente, ne manquez pas de faire jouer la concurrenc­e : même si les assureurs utilisent les mêmes tables de mortalité pour calculer leurs taux de conversion du capital, il existe de petites différence­s provenant notamment de l’importance des frais. Autant, comme pour la phase d’épargne, trouver ceux qui sont les moins gourmands. ■

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