Le Figaro Magazine

“RÉDUIRE LES DÉLAIS DE RÉPONSE AUX ASSURÉS EST MA PRIORITÉ”

Arnaud Chneiweiss, le nouveau médiateur de l’assurance, publie son premier rapport annuel. L’occasion de faire le point sur les pratiques des profession­nels et les litiges.

- Propos recueillis par Pascal Frasnetti

Avec la pandémie de Covid, la médiation est-elle très sollicitée par les particulie­rs ? Nous avons connu une forte progressio­n des demandes. Habituelle­ment, nous recevons 15 000 dossiers par an. Mais, à fin août, nous constatons une hausse des saisines de 15 % sur les huit premiers mois par rapport à 2019. Ces demandes portent plutôt sur l’assurance de biens, responsabi­lité et prévoyance que sur l’assurance-vie, qui représente toujours 10 % de nos litiges.

Sur l’assurance-vie, quels sont les litiges les plus fréquents ?

Ces cas concernent notamment la clause bénéficiai­re, lorsqu’il existe un litige sur la personne qui doit recevoir les capitaux. Nous avons accès aux informatio­ns soumises au devoir de confidenti­alité de l’assureur et nous pouvons ainsi proposer une solution impartiale. Viennent ensuite les litiges touchant au devoir de conseil, notamment lorsque l’épargnant a souscrit un contrat en unités de compte. Nous vérifions alors que l’assuré a bien reçu toutes les informatio­ns de la part de son conseiller, mais aussi que ce dernier a bien recueilli les besoins de son client et lui a proposé un produit adapté. Le cas le plus fréquent concerne le choix du régime fiscal lors d’un rachat, entre une imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu et l’applicatio­n du prélèvemen­t forfaitair­e libératoir­e, cette option fiscale étant irrévocabl­e. Si l’assuré n’a pas souhaité être assisté et a fait le mauvais choix, il ne peut en principe invoquer l’absence de conseil. Nous avons également de nombreux contentieu­x sur les dates d’effet des arbitrages financiers ou rachats. Souvent les assurés effectuent des opérations en fin d’année, mais méconnaiss­ent les procédures d’exécution, qui peuvent prendre plusieurs jours et ainsi basculer sur l’année suivante. À l’inverse, alors qu’il s’agissait d’un problème majeur en 2018 et 2019, les litiges liés à la déshérence des fonds dans les contrats d’assurance-vie sont en forte baisse depuis quelques mois.

Quels sont encore les freins à la médiation ?

D’abord, contrairem­ent aux autres secteurs de la consommati­on, où une seule étape de réclamatio­n auprès du profession­nel peut suffire avant de saisir le médiateur, il y a deux niveaux préalables d’examen pour le secteur financier – en général un service client puis un service réclamatio­n – avant que l’assuré puisse nous saisir. Si bien que trop souvent les assurés se tournent vers nous de manière prématurée. Mais surtout, la grande question concerne la date de départ du litige. L’assureur dispose d’un délai maximal de deux mois pour traiter la demande. Mais ce délai commence à partir de l’identifica­tion du litige par l’assureur, une date souvent difficile à établir. Le Comité consultati­f du secteur financier pourrait rapidement trancher cette question épineuse.

Quels sont les délais de traitement des dossiers ?

Une fois le dossier reçu, nous avons trois semaines pour dire à l’assuré si la saisine est recevable ou non, puis trois mois pour formuler une réponse, sauf pour les dossiers complexes. Malheureus­ement, nos délais de réponse sont aujourd’hui beaucoup trop longs. Lors de ma prise de fonction, le délai moyen était supérieur à douze mois. Fin 2020, nous devrions revenir à un délai de réponse moyen de dix mois et l’objectif sera de réduire encore ces délais en 2021. J’en ai pris l’engagement, malgré la hausse des saisines.

Tous les profession­nels jouent-ils le jeu de la médiation ?

Tous les assureurs sont adhérents à notre médiation. Ce qui n’est pas le cas de tous les courtiers, notamment les plus petits. D’ailleurs, je ne serais pas étonné de constater que certains ne proposent aucun service de médiation, alors que c’est une obligation légale. Si le litige concerne un courtier non adhérent, notamment en matière de devoir de conseil, nous ne pouvons pas aider l’assuré. À moins que le problème concerne le contrat lui-même, par exemple en cas de refus d’exécution d’une garantie. Dans ce cas, ce n’est plus le courtier qui est en cause mais bien l’assureur et nous pouvons intervenir. ■

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