PRÊTS EN FAMILLE : PRENEZ VOS PRÉCAUTIONS
Avec la crise actuelle, certains de vos proches auront sans doute besoin d’un coup de pouce financier temporaire. Formalisez le prêt pour éviter toute déconvenue.
Vous envisagez de prêter de l’argent à un parent ou un ami dans une situation financière difficile liée à la crise sanitaire actuelle ? Rien ne vous l’interdit. Il est même parfaitement possible de convenir que le prêt ne sera remboursable qu’en une seule fois, à l’échéance prévue, et de ne pas prévoir d’intérêts ou un taux nettement plus faible que celui pratiqué par les banques. Mais un minimum de précautions s’impose surtout si le prêt est relativement important. Aussi bien dans votre intérêt – il peut arriver, hélas, que vos relations avec l’emprunteur se dégradent et qu’il prétende que vous lui avez donné les sommes en question – que pour éviter toute contestation ultérieure tant de la part de vos héritiers que du fisc. « Le principal risque est que l’administration fiscale considère qu’il s’agit d’une donation déguisée. Pour l’écarter, il faut éviter de prêter une somme qui dépasse manifestement la capacité de remboursement de l’emprunteur. Il faut fixer un cadre réaliste », conseille Xaviera Favrie, notaire chez KL Conseil.
Si les sommes en jeu sont supérieures à 1 500 €, le seul moyen de prouver qu’il s’agit bien d’un prêt et non d’un don est de laisser une trace écrite. Il peut s’agir d’une reconnaissance de dettes signée de la main de l’emprunteur ou d’un contrat de prêt signé par les deux parties, mentionnant le montant prêté, les modalités de remboursement et, le cas échéant, le montant des intérêts. Bien que cela ne soit pas obligatoire, il est possible de faire enregistrer ce document. L’enregistrement s’effectue dans n’importe quel service des impôts des entreprises (SIE), moyennant un coût fixe de 125 €. Cette formalité permet de donner une date certaine, difficilement contestable. Elle peut permettre à l’emprunteur de prouver l’origine des fonds et d’échapper à leur taxation d’office en cas de contrôle fiscal. Pour des sommes importantes, il est aussi possible de passer par un notaire pour lui faire établir un acte authentique.
OBLIGATIONS DÉCLARATIVES ALLÉGÉES
Que le prêt ait été consenti avec ou sans intérêts, qu’il ait ou non été constaté par un acte et/ou enregistré ou non auprès du SIE, il doit, en outre, être déclaré à l’administration fiscale. La déclaration doit mentionner les noms et adresses des deux parties, la date, le montant et les conditions du prêt, notamment sa durée, le taux et la périodicité des intérêts ainsi que les modalités de remboursement. « Jusqu’à présent, cette obligation concernait les prêts d’un montant supérieur à 760 €.
Depuis le 27 septembre 2020, ce seuil de dispense a été porté à 5 000 € afin d’alléger les obligations déclaratives », précise Xaviera Favrie. La déclaration doit être effectuée par l’emprunteur en même temps que sa déclaration de revenus (formulaire n° 2062). Le notaire se charge de cette formalité lorsque le prêt fait l’objet d’un acte authentique. Si des intérêts ont été prévus, le prêteur doit reporter chaque année leur montant sur sa déclaration de revenus. Sauf option globale pour le barème progressif de l’impôt sur le revenu, ils sont soumis au prélèvement forfaitaire unique de 30 % (12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu et 17,2 % au titre des prélèvements sociaux). En cas de prêt à un enfant, si le prêteur décède avant d’avoir été remboursé, le montant restant constitue une créance qui doit être portée à l’actif de la succession. Cette dette viendra en diminution de la part de l’emprunteur dans la succession. « Ce qui peut être source de déséquilibre si le défunt avait consenti des donations à ses autres enfants. Car à la différence d’une donation, le montant prêté ne sera pas revalorisé en fonction de l’usage que le bénéficiaire a fait de la somme transmise. Les enfants qui ont reçu des donations risquent d’être désavantagés », prévient Xaviera Favrie.
À l’échéance prévue, le prêt devra être remboursé et, si une reconnaissance de dette avait été établie, elle devra être remise à l’emprunteur. Rien ne vous empêche, si l’emprunteur éprouve des difficultés à vous rembourser, de transformer tout ou partie de la somme prêtée en don. Mais là encore, il est préférable de faire les choses dans les règles de l’art, c’est-à-dire de constater le don en l’enregistrant au SIE. ■