LES CLIENTS AISÉS, ENTRE PRÉCAUTION ET OPPORTUNISME
Les clients aisés des banques ont eux aussi gonflé leur épargne de précaution en prévision d’une crise qui peut durer, souligne une enquête récente. Mais pour beaucoup, le marché offre aussi de belles opportunités.
La crise de la Covid-19 a bouleversé notre quotidien, mais également modifié en profondeur nos comportements d’épargne. En témoignent les montagnes d’argent déposées sur les comptes courants et les Livrets A depuis le confinement. Cette épargne « forcée » devrait atteindre 100 milliards d’euros à la fin de l’année. Du jamais-vu. Dans un contexte très incertain, les particuliers jouent la prudence. Et les plus aisés ne dérogent pas à la règle, comme le confirme une étude de Swiss Life Banque Privée, réalisée après le confinement auprès de trois types de clients : les clients « aisés », avec plus de 72 000 € de revenus annuels et 100 000 € d’épargne financière, ceux des banques privées, et les hauts patrimoines (plus de 500 000 € d’avoirs financiers).
DAVANTAGE D’ÉPARGNE
L’enjeu ? « Avoir une photo à chaud du comportement d’épargne et des attentes », souligne Hervé Mercier Ythier, à la tête de Swiss Life Banque Privée. Premier enseignement de l’enquête : la crise du coronavirus a modifié la façon d’épargner de près d’un client sur deux. Comment ? En les rendant majoritairement plus prudents. C’est vrai pour 72 % des Français dits aisés et 69 % des utilisateurs de banques privées. Dans ce contexte trouble, les sondés indiquent à plus de 80 %, quel que soit leur niveau de revenus, qu’ils souhaitent stabiliser ou accroître leur épargne dans les mois qui viennent. En cela, ils ne se différencient guère de l’ensemble des Français. « Ce qui est frappant, c’est qu’aujourd’hui la recherche de placements liquides transcende les catégories et les niveaux de revenus », relève Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Épargne.
DES OCCASIONS À SAISIR
Mais là où les différences se creusent sans doute, c’est dans l’appréciation des effets de la crise, perçue aussi comme source d’opportunités. Et plus les clients ont les épaules financières larges, plus ils le pensent. Ainsi, ceux qui détiennent un compte dans une banque privée et les hauts patrimoines sont respectivement 77 % et 78 % à juger que la conjoncture actuelle crée une fenêtre de tir pour placer son argent (contre 67 % des Français aisés). Ces mêmes clients sont aussi plus nombreux à estimer que la crise est propice à la création de gains rapides (plus de 62 % pour les hauts patrimoines et les clients de banques privées, 53 % pour les Français aisés).
Dès lors, quels produits choisir pour profiter du marché ? Pour les trois catégories de revenus citées par l’étude, l’immobilier arrive à la première place du podium. La pierre profite de son statut de valeur refuge et de sa faculté à générer des loyers sur un temps long. Mais, surprise, les actions ne sont pas loin. On l’a vu, la tempête financière de février-mars a conduit beaucoup de particuliers à fondre sur les actions en Bourse pour profiter d’un niveau de cours considéré comme attractif. De fin février à début avril, près de 150 000 nouveaux investisseurs sont allés sur les 120 principales valeurs hexagonales. Cet appétit pour les produits plus financiers est davantage marqué dans les plus hautes tranches de revenus, rappelle l’étude. C’est aussi vrai quand il s’agit d’investir dans les produits structurés ou dans des fonds de capital-investissement pour du financement de PME. Quant à l’épargne durable, elle gagne chaque mois un peu plus de place dans le coeur des particuliers. C’est ce que montre une autre étude, publiée récemment par le gestionnaire d’actifs BlackRock. Selon cette enquête, les investisseurs sont 84 % à considérer que leurs placements doivent avoir un impact positif. Cette préoccupation se retrouve dans l’appétit pour les fonds ESG (environnement, social et gouvernance). Au premier trimestre 2020, ces fonds durables ont collecté 40,5 milliards de dollars, soit 41 % de plus qu’en 2019 à pareille époque, selon BlackRock. Cette envie d’épargner plus responsable devrait se poursuivre. Les fonds labellisés « durables » ont bien mieux résisté à la tempête de février-mars 2020 que les fonds traditionnels. ■