SPÉCIAL SANTÉ
1 / QUAND LA GRIPPE SE MÊLE À LA COVID-19 Produisant des symptômes identiques à ceux de la pandémie qui nous touche, cette maladie apparemment banale pourrait aggraver la situation sanitaire en France. Les autorités craignent également une pénurie de vac
Si vous avez les signes de la grippe en période d’épidémie, c’est que vous avez attrapé la grippe ! Voilà ce que les médecins assuraient à leurs patients jusqu’à l’hiver dernier, jusqu’à l’arrivée du Sars-CoV-2 qui a bouleversé nos habitudes de vie et le travail des infectiologues. En réalité, en présence de symptômes, on était assuré d’être confronté à la grippe dans 50 % des cas seulement. Diverses infections virales saisonnières se partageant les pourcentages restants. Il existe bien des tests mais ils s’avèrent peu spécifiques, donc peu efficaces, et relativement onéreux. Depuis le début de l’année 2020, la Covid-19 a compliqué les diagnostics en présentant les mêmes signes caractéristiques (fièvre, toux, courbatures) que la grippe alors qu’elle affiche un taux de mortalité supérieur, même chez des sujets jeunes et bien portants, et peut engendrer des séquelles importantes dont on ignore encore l’ampleur. Pire, elle pourrait se mêler à une grippe et terrasser les personnes les plus robustes…
DES MUTATIONS IMPRÉVISIBLES
L’épidémie de grippe survient entre les mois de novembre et d’avril, plus fréquemment fin décembre-début janvier, et touche chaque année 2 à 8 millions de personnes en France, avec un excès de mortalité de 8 000 à 14 000 décès durant les trois dernières saisons, principalement chez les sujets fragiles. Suivant les années, elle peut se montrer plus ou moins virulente car il existe plusieurs virus de la grippe, imprévisibles, qui peuvent muter très rapidement et se révéler extrêmement dangereux. L’histoire récente garde les stigmates de pandémies dévastatrices avec notamment 40 millions de morts de la grippe espagnole en 1918, 4 millions de la grippe asiatique en 1958 ou encore 2 millions de la grippe de Hongkong en 1968.
La grippe est une maladie infectieuse fréquente et contagieuse causée par un virus influenza, virus à ARN enveloppé de la famille des Orthomyxoviridae, qui s’attaque aux voies respiratoires supérieures comme le nez, la gorge ou les bronches. Il existe trois types de virus influenza : A, B et C. Les virus de type A contaminent l’homme et de nombreuses espèces animales mais ce sont les espèces aviaires (oiseaux aquatiques sauvages, volailles) qui en constituent le réservoir. Les virus de type B infectent quasi exclusivement l’homme. A et B sont responsables des épidémies saisonnières, alors que les virus de type C provoquent une maladie généralement bénigne chez l’humain. Seuls les virus de type A ont un potentiel pandémique. Contrairement à certaines croyances, la grippe n’est pas un simple gros rhume. Elle n’épargne personne dans le monde et peut entraîner des complications mortelles. Pour la plupart des malades, elle se limite à quelques symptômes qui disparaissent en quelques jours. En dehors d’une fatigue importante qui va durer quinze jours, l’épisode se termine généralement bien. Pourtant, une fois sur 100, elle va entraîner des complications sévères nécessitant une hospitalisation. Parmi les 700 cas graves qui atterrissent chaque année en réanimation, un sur 5 se conclut par un décès.
DES VACCINS IMPARFAITS
Ce scénario catastrophe peut être causé par un emballement du système immunitaire qui provoque une réaction violente, nocive pour les autres cellules. Le germe peut aussi tuer indirectement en favorisant des surinfections bactériennes provoquant des pneumonies gravissimes. Enfin, les personnes affectées par une maladie chronique grave peuvent développer une réaction immunitaire intense, liée à l’infection virale, qui va déséquilibrer leur maladie. Les enfants de moins de 2 ans, les plus de 65 ans, les obèses, les femmes enceintes et les personnes présentant certaines maladies chroniques (bronchite chronique, insuffisance cardiaque…) ou un affaiblissement du système immunitaire restent les plus exposés à ces complications.
Les traitements de cette maladie ne s’attaquent qu’aux symptômes. Ce sont des médicaments contre la
fièvre, les maux de tête ainsi que les douleurs articulaires et musculaires. Il est également possible de se faire prescrire un traitement antiviral, l’oseltamivir (le fameux Tamiflu américain), mais la prise doit intervenir dans les deux premiers jours de l’apparition de la maladie. Et le patient consulte souvent trop tard… De ce fait, la meilleure défense demeure la vaccination. Une étude de l’Institut de veille sanitaire sur dix ans a montré que l’efficacité de ce type de vaccin varie selon les âges, oscillant de 42 à 76 % chez les moins de 65 ans et de 24 à 48 % chez les plus âgés. Cette imprécision découle du pouvoir de mutation des virus qui sont capables d’évoluer entre l’élaboration du vaccin et l’apparition de l’épidémie. Faut-il alors se faire vacciner ? Oui car la vaccination va, dans tous les cas, éviter les atteintes sévères. D’ailleurs, chaque année, l’assurance-maladie invite plus de 10 millions de personnes à se faire vacciner. Et seule la moitié suit ses recommandations ! Un geste d’autant plus important cette année afin de ne pas confondre les symptômes de la grippe avec ceux de la Covid-19 et de pouvoir appliquer le bon traitement le plus rapidement possible, ainsi que de stopper la diffusion du coronavirus dans la population.
PÉNURIE EN VUE
Pour cet hiver, 15,8 millions de personnes à risques ont reçu ou vont recevoir de l’assurance-maladie, un bon de prise en charge du vaccin. Les 310 000 professionnels de santé libéraux sont également invités à se protéger. Mais alors que la campagne de vaccination a officiellement commencé le 13 octobre et que les stocks de vaccins ont été revus à la hausse pour faire face à des besoins accrus, on ignore s’ils permettront de répondre à la demande, imprévisible par essence. Dans l’intervalle, il paraît urgent de prendre toutes les précautions. Ce qui revient tout simplement à appliquer les gestes barrières préconisés par le gouvernement et les autorités médicales dans la lutte contre la Covid-19… ■