L’ÉDITORIAL
de Guillaume Roquette
Est-ce un tournant ? Depuis quelques jours, l’offensive du pouvoir contre les islamistes ne se limite plus aux discours. Fermeture de mosquée, dissolutions d’associations, procédures d’expulsion…, des actes concrets sont enfin engagés après l’atroce assassinat de Samuel Paty. Tout ce qui était jugé impossible il y a encore une semaine devient tout à coup urgent. Ce sursaut est à l’évidence trop tardif mais l’heure est suffisamment grave pour ne pas chicaner aux autorités le soutien dont elles ont besoin.
Pour autant, l’État, même déterminé, ne pourra pas tout. Le mal est si profond qu’il nécessite la mobilisation de la société tout entière, et en premier lieu celle des musulmans. C’est à eux qu’il revient de prouver qu’entre l’islam et l’islamisme il y a une différence de nature et non de degré. C’est à eux de rejeter avec plus de force les prêcheurs de haine qui prospèrent sur les réseaux sociaux. C’est à eux de dénoncer à l’unisson la violence véhiculée par le Coran (sur quelque 6 200 versets, 300 contiennent des mots tels que combattre ou tuer). C’est à tous les imams de France, à la suite du courageux Hassen Chalghoumi, d’exhorter leurs ouailles « à se réveiller et à veiller sur leurs enfants ». Quand on voit que 45 % des Français musulmans de moins de 25 ans considèrent que leur religion n’est pas compatible avec les valeurs de la société française (sondage Ifop d’août 2020), on se dit que ce n’est pas gagné.
L’affrontement sera aussi civique. Le gouvernement ne pourra pas dissoudre tous les mouvements complices de l’islam politique et gageons que ceux qui seront à juste titre interdits renaîtront tôt ou tard sous un autre nom mais avec la même idéologie. Il nous faut donc plus que jamais soutenir tous ceux qui se battent quotidiennement contre le séparatisme, qu’il s’agisse des professeurs enseignant en banlieue, des intellectuels résistant crânement aux accusations d’islamophobie ou des valeureuses jeunes femmes que nous mettions en couverture du Fig Mag le week-end dernier, sans imaginer que l’actualité rappellerait si vite et si tragiquement combien leur combat est vital pour notre pays.
Ne nous trompons pas : le terrorisme est l’expression la plus hideuse de l’islamisme, mais pas forcément le plus grand danger pour les sociétés occidentales. Nos forces de sécurité peuvent lui porter des coups fatals, surtout si la justice cesse de se montrer complaisante avec les individus potentiellement dangereux. Le danger mortel, ce sont les attaques quotidiennes contre notre façon de vivre, cette colonisation diffuse qui revendique un jour des menus halal, le lendemain des horaires séparés à la piscine, le surlendemain l’adaptation des programmes scolaires. Il faudra à tous, et d’abord à nos élus, un courage sans faille pour résister à ce grand noyautage. Nous le devons à Samuel Paty et à tous ceux qui ont été assassinés avant lui pour avoir refusé de se soumettre.