L’ÉLECTRIQUE SOUS CONDITION
Les Français ne sont pas contre la voiture à batterie mais conditionnent son achat à la levée de quelques freins.
C’est peu dire que la voiture électrique divise. Les moralisateurs voudraient qu’elle inonde nos routes. Les industriels pointent, à juste titre, les conséquences économiques et sociales d’une conversion à grande échelle du parc automobile à cette technologie. Les écologistes et ceux qui s’en revendiquent sont plus expéditifs. Ils plaident de leur côté pour la suppression de la voiture individuelle. Quant aux automobilistes, ils hésitent entre défiance et adhésion. Depuis quelques mois, la filière automobile mais également les acteurs de cette nouvelle forme de mobilité multiplient les études pour essayer de percer le rapport des Français à la mobilité individuelle et leur intérêt pour l’électrique. Cela va rassurer une filière qui emploie 10 % de la population active en France. Selon une étude réalisée par l’institut Odoxa pour BMW, les Français ne peuvent pas se passer de bagnole. Malgré l’avènement de nouvelles mobilités, la voiture reste, de loin, le mode de transport le plus utilisé et le plus apprécié. Mais les consommateurs sont-ils prêts à passer à l’électrique ?
TROIS FREINS À L’ACHAT
Alors que le gouvernement français a donné un coup de pouce financier à son développement en relevant le montant de la prime pour accélérer la transition écologique, les consommateurs semblent, dans une grande majorité, prêts à acheter un véhicule électrique d’ici à 2024, en moyenne. Selon une étude Accelerating the Evolution commandée par la société Castrol et réalisée auprès d’un panel de consommateurs, de responsables de parcs et de leaders de l’industrie automobile, l’évolution des technologies et le développement du parc de bornes de recharge seraient de nature à les encourager à se convertir. Plus de la moitié (56 %) des responsables de parc indique, pour leur part, attendre de leurs concurrents qu’ils franchissent le pas pour faire de même. Toujours selon cette étude, trois freins ralentissent l’essor du véhicule électrique : le prix, le temps de recharge et l’autonomie. Pour 75 % des consommateurs français, la voiture électrique est encore trop chère. Cette perception est faussée par le fait que beaucoup d’entre eux ignorent que le coût d’entretien et d’exploitation de ces véhicules est bien inférieur à celui d’un véhicule à moteur thermique. De l’ordre de 27 % selon les dernières études. Il n’en reste pas moins qu’il faudrait que le prix d’un véhicule électrique ne dépasse pas 28 000 euros pour que les consommateurs français l’adoptent. C’est 4 000 euros de moins que la moyenne mondiale.
Deuxième facteur pouvant expliquer la frilosité des consommateurs français : la durée de la recharge. La majorité des personnes interrogées la trouve encore trop longue. Il faudrait que le temps moyen ne dépasse pas 27 minutes pour les encourager à franchir le pas. Enfin et c’est le troisième frein à l’adoption généralisée des véhicules électriques : la peur de la panne. Ces modèles souffrent en effet d’une autonomie limitée. Pour que les automobilistes franchissent le pas, il faudrait que les véhicules puissent effectuer un Paris-Lyon avec une seule charge. C’est loin d’être le cas aujourd’hui. Audessus de 100-110 km, la consommation d’un véhicule électrique devient presque exponentielle.
Force est de constater qu’aujourd’hui sur le marché, aucun véhicule électrique ne remplit ces trois conditions – un prix moyen de 28 000 euros, un temps de recharge de 27 minutes et une autonomie de 465 km. La Renault Zoé s’en rapproche, mais son architecture de citadine ne permet pas de satisfaire tous les usages. Pour que les trois freins soient totalement levés, il faudra certainement attendre une rupture technologique. ■