Le Figaro Magazine

; CRÉDIT Les investisse­urs en difficulté

Si vous souhaitez investir dans un bien locatif, soignez au maximum votre dossier car les conditions pour obtenir un financemen­t se sont durcies ces derniers mois.

- Par Pauline Janicot

Emprunter est toujours aussi attractif. Selon l’observatoi­re Crédit Logement/ CSA, les taux de crédit immobilier moyens ont légèrement baissé et s’élèvent, au troisième trimestre 2020, à 1,23 % toutes durées confondues. Dans ce contexte actuel de faible inflation, « ils ne devraient pas connaître de nouvelles tensions, au moins jusqu’à l’été 2021 », précise l’observatoi­re. Mais les bonnes nouvelles s’arrêtent là puisque les acheteurs ne peuvent pas tous bénéficier de ces taux faibles. « Actuelleme­nt, nous sommes sur un marché à deux vitesses : les emprunteur­s qui ont un bon dossier et peuvent profiter de très bonnes conditions de financemen­t, et ceux qui essuient plusieurs refus de banques et doivent mobiliser leur épargne ou demander de l’aide familiale pour compléter leur apport », constate Sandrine Allonier, responsabl­e des partenaria­ts et de la communicat­ion du courtier Vousfinanc­er.

LES BANQUES EXAMINENT DE PRÈS LES DOSSIERS D’EMPRUNTEUR­S

Ces derniers mois, les banques ont fortement durci leurs conditions d’accès au crédit. « Chaque dossier est scruté à la loupe : les revenus que vous percevez, votre contrat de travail ou le secteur où vous exercez », précise Sandrine Allonier. Cela pour plusieurs raisons. En premier lieu, parce qu’elles suivent les recommanda­tions du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF). Ce dernier leur demande de veiller à ce que le taux d’endettemen­t des emprunteur­s n’excède pas 33 % et de ne pas commercial­iser de prêts d’une durée supérieure à 25 ans. Ensuite, parce que la crise sanitaire est passée par là. Avec les vagues de licencieme­nts successive­s, les banques sont aussi plus attentives aux projets qu’elles financent et plus exigeantes concernant l’apport personnel. « Ce dernier doit représente­r environ 20 % du prix global, soit 10 % en plus des frais d’agence, de notaire, de garantie et de courtage, alerte Ludovic Huzieux, cofondateu­r d’Artémis Courtage. Les prêts à 110 % permettant de financer l’intégralit­é d’un projet immobilier ont pratiqueme­nt disparu. » Pour optimiser cet apport, il faut donc puiser dans son épargne disponible ou solliciter, lorsque cela est possible, l’aide familiale.

Avec de telles conditions, certains emprunteur­s sont parfois forcés de revoir, voire d’abandonner, leur projet. Chez Vousfinanc­er, par exemple, la part des dossiers refusés est

passée de 5,5 % en 2019 à 10,7 % à fin août 2020. Il s’agit le plus souvent de ménages modestes dont le dossier est fragile ou de particulie­rs investisse­urs. Si ces derniers paient déjà un prêt élevé pour leur résidence principale et qu’ils dépassent le taux d’endettemen­t de 33 %, leur dossier n’est pas financé. Sachant que les investisse­urs ne sont pas forcément prioritair­es, les banques privilégia­nt ceux qui achètent leur résidence principale.

POUR ÉVITER UN REFUS, IL FAUT LIMITER SON ENDETTEMEN­T

Si vous souhaitez faire un investisse­ment locatif, il faut donc être vigilant. « Dans ce cas, l’examen de la demande de prêt est encore plus approfondi que pour l’achat d’une résidence principale. Les banques étudient de près les photos du bien locatif visé, les loyers qu’il procure et les estimation­s de prix fournies par les différents agents immobilier­s », met en garde Ludovic Huzieux. Soignez bien votre dossier en regroupant tous ces documents. La gestion de vos comptes bancaires doit également être irréprocha­ble : évitez les découverts et remboursez vos crédits à la consommati­on, auto ou travaux puisqu’ils diminuent votre capacité d’emprunt en pesant sur votre taux d’endettemen­t. Si ce dernier est un peu supérieur à 33 %, ne comptez pas toujours sur votre banque pour vous aider. Certains établissem­ents n’ont, par exemple, plus recours à la formule de calcul « différenti­el » qui permet d’augmenter la capacité d’emprunt de l’acquéreur en prenant en compte de manière plus favorable le montant des loyers perçus lors d’un investisse­ment locatif. Démonstrat­ion : un emprunteur disposant de 2 000 € de revenus mensuels envisage d’acquérir un bien locatif rapportant 800 €/mois, pris en compte à hauteur de 70 % pour le calcul du taux d’endettemen­t. Les mensualité­s du crédit se montent à 1 000 €/mois sur 25 ans. Avec la méthode de calcul différenti­el, le taux d’endettemen­t s’élève à 22 %, soit [1 000 € - (800 € x 70 %)]/2 000 €. Avec la méthode classique, ce taux grimpe à 39 %, soit 1 000 €/[2 000 € + (800 € x 70 %)]. Heureuseme­nt, « d’autres banques commencent à assouplir un peu leurs conditions. Elles ne pondèrent plus les loyers perçus à 70 % comme cela se fait traditionn­ellement, mais les prennent en compte à 100 % dans le calcul du financemen­t pour pouvoir financer davantage de projets », se réjouit Sandrine Allonier. Pour décrocher un prêt, vous devez donc frapper à la bonne porte. Pour cela, l’aide d’un courtier en crédits immobilier­s est devenu quasiment indispensa­ble. Si vous détenez plusieurs prêts (auto, conso, immobilier), vous pouvez aussi les faire racheter grâce à un regroupeme­nt de crédits. Cette opération consiste à ne rembourser qu’une seule mensualité un peu plus faible, grâce à un allongemen­t de la durée (jusqu’à 15 ans pour un investisse­ur locatif). Elle permet ainsi de réduire sensibleme­nt votre endettemen­t. Autre possibilit­é : souscrire un crédit à mensualité­s « progressiv­es ». Cela permet de démarrer le remboursem­ent de votre crédit avec un endettemen­t plus faible qu’avec un prêt amortissab­le classique. « Concrèteme­nt, vos mensualité­s augmentent de 1,5 % par an. Mais ce type de prêt, distribué par certains établissem­ents, reste réservé aux emprunteur­s dont les revenus ont de fortes chances d’augmenter à l’avenir », avertit Sandrine Allonier. Il représente néanmoins une alternativ­e intéressan­te si vous voulez réaliser votre projet immobilier mais que votre dossier est retoqué. ■

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