LES RENDEZ-VOUS

Le prix Goncourt 1985 publie un portrait âpre et émouvant de Florence Arthaud, égérie du « Fig Mag », qui participa à l’aventure des « quatre filles sur un bateau ».

de J-R Van der Plaetsen

Yann Queffélec ressemble à un personnage de ses romans. Il en a la haute taille, la carrure, un visage marqué par les embruns, un nez aux arêtes granitiques, un coffre d’où surgit une voix profonde. C’est un homme qui aime le romanesque, sans freins ni limites, qui se délecte des tempêtes de mer et de la violence des éléments, copine avec quelques personnages à sa mesure et ne s’intéresse, au fond, qu’aux destins d’infortune. C’est un vrai Breton, aux airs de menhir dans un caban bleu marine, mais qui sait s’émouvoir après plusieurs tournées de vieux rhum – trait de caractère que l’on retrouve chez la plupart des hommes qui naviguent sur les océans.

Avec les années, le temps presse, et Queffélec a décidé de ne plus s’embarrasser de politesses convenues ou de précautions inutiles. Il écrit sur ses deux passions : la mer et la Bretagne, qui forment, dans son imaginaire, comme deux personnages féminins. Dans son nouvel ouvrage, intitulé La Mer et au-delà,

il dresse le portrait, plein de lyrisme et d’émotion, d’une femme, Florence Arthaud, navigatrice entrée dans la légende des mers puisqu’elle fut surnommée « la petite fiancée de l’Atlantique » après avoir remporté la Route du Rhum en 1990. « Je me suis senti sot d’avoir toujours refusé d’écrire un livre avec elle alors qu’elle me suppliait de le faire, dit Queffélec, qui ajoute : J’ai voulu réparer cette erreur. »

Le résultat est un superbe récit qui possède la force du roman, tant il y eut d’événements rocambolesques dans l’existence de cette sirène disparue tragiquement dans les airs. Yann Queffélec édifie un tombeau maritime pour cette femme qui aimait la mer – et les hommes qui aiment la mer. « Le bel amour de la vie de Florence fut Jean-Claude Parisis,

dit-il, mais le grand amour de sa vie reste Olivier de Kersauson. » La mer, pour ceux qui l’habitent, est une histoire de famille.

La phrase du livre à retenir (p. 140)

“Un secret pour vous, ça reste entre nous : l’enfance est l’horizon

des marins quand ils regardent la mer”

LA MER ET AU-DELÀ,

de Yann Queffélec, Calmann-Lévy, 250 p., 18,50 €.