LITRES ET RATURES
La nuit n’en finit plus. La chanson de Petula Clark risque de devenir le tube du reconfinement. L’insomnie prospère. Les journées aussi se posent un peu là. Elles ont beaucoup plus de vingt-quatre heures. La perversion suprême consisterait à regarder en boucle Un jour sans fin. La France entière ressemble à Bill Murray (phénoménal dans le dernier Sofia Coppola, On the Rocks). La 7e compagnie revient en force. Robert Lamoureux est une vieille connaissance. Sinon, on n’y comprend plus rien. Les prix littéraires ne savent plus où donner de la tête. On les décerne ou pas ? Les rares lauréats font une tête de six pieds de long. Où acheter leur roman ? L’heure est grave. Nos compatriotes, dont l’appétit de lecture ne nous avait pas frappés, sont en manque de caractères d’imprimerie. Cette soif de culture a quelque chose d’inédit. Rendez-nous notre Proust quotidien. Virginia Woolf forever. Cloîtrés, ils piaffent. C’est tout juste si, pour apaiser ce besoin impérieux, ils ne se précipitent pas sur les notices de médicaments, n’apprennent pas par coeur le mode d’emploi de leur four à micro-ondes. Cela balance à longueur d’année des tweets bourrés de fautes d’orthographe et voudrait nous faire croire que la littérature est un produit de première nécessité. La belle affaire. Comment vivre, oui, sans Marc Levy ? Qui va nous fournir notre dose de Léna Situations ? La Rue de Valois est aux abois. Anne Hidalgo menace d’adopter de sévères mesures. Les libraires, les libraires, tout le monde n’a que ce mot à la bouche. Nous, du moment que les cavistes restent ouverts… On the rocks ?