Le Figaro Magazine

LA CHRONIQUE de François d’Orcival CULTURELLE­MENT

La place forte de la finance mondiale estime que le succès étroit du démocrate le prive d’espace politique sur sa gauche.

- LA CHRONIQUE DE FRANÇOIS D’ORCIVAL

Les investisse­urs américains ont soudain repris confiance. Le jour de l’élection présidenti­elle, le 3 novembre, le Dow Jones, l’indice de référence de la Bourse de New York, cotait 27 000 points. Trois jours plus tard, le 6, il avait gagné 1 500 points. Wall Street saluait-il la victoire de Joe Biden avant que les agences de presse ne le fassent le lendemain ? Certes. Mais il faut savoir qu’au début de cette année, le Dow Jones avait atteint les 30 000 points, dont il allait perdre le tiers – 10 000 points ! – deux mois plus tard quand la Covid-19 commença à faire ses ravages.

L’indice phare des affaires américaine­s devait pourtant reprendre par la suite les trois quarts de cette perte. La fracture s’effaçait sous Donald Trump. Joe Biden fera-t-il aussi bien – ou mieux ? Il est évidemment trop tôt pour répondre. Mais les investisse­urs sont, on l’a vu, en train de parier sur lui. Au moment où Trump prit la relève de Barack Obama, en 2017, le taux de chômage était à 4,9, soit un point de moins que la moyenne des pays de l’OCDE – et presque la moitié du nôtre ! Trump donna à sa première loi de finances, à la fin de 2017, un tour expansionn­iste : le taux de l’impôt sur le revenu pour les huit années à venir (deux mandats !) était réduit de 39,6 à 37 (pour le taux marginal supérieur), l’impôt sur les sociétés ramené de 35 à 21, tandis que l’investisse­ment devenait hyperprior­itaire en rendant ces dépenses déductible­s à 100 % jusqu’en 2022 !

« La progressio­n plus forte des salaires face aux tensions de plus en plus vives sur le marché du travail, écrivaient alors les analystes de la Coface, et l’impact des réformes fiscales devraient permettre un accroissem­ent du revenu disponible réel, favorisant ainsi des gains de consommati­on. » C’est exactement ce qui allait se produire, « la confiance est solide », dira-t-on bientôt – et le taux de chômage ramené à 3,5, avant que l’arrivée subite de la Covid-19 ne vienne abattre tous ces bons chiffres. Ceux-ci sont alors remplacés par d’autres et Donald Trump doit en passer par là : un déficit public, une dette et un chômage records, des dépenses publiques et des plans de relance généralisé­s. Pour quelle raison Wall Street a-t-il salué la victoire de Joe Biden ? Parce qu’on y compte bien que ce succès étroit et l’espoir que le Sénat reste plutôt républicai­n laisseront peu d’espace à gauche au nouveau président. Son principal collaborat­eur est d’ailleurs un ancien de chez Clinton et Obama, Gary Gensler, qui a fait sa carrière chez Goldman Sachs, au Trésor, dans une agence fédérale de régulation, et… à Wall Street !

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France